Enorme vedette de la chanson dans les années 70, notamment en duo avec Eric Charden, la chanteuse Stone est toujours régulièrement sur scène. Elle vient de chanter en duo avec Fabienne Thibaut. Installée en Auvergne, elle est venue raconter son quotidien et son engagement pour le droit à mourir dans la dignité, dans "Vous êtes formidables" sur France 3
Son vrai prénom, dans la vie…c’est Annie. Mais tout le monde l’appelle Stone. Chanteuse marquante de la variété française, comédienne de théâtre, et, évidemment, moitié du célébrissime duo à succès des années 70 Stone et Charden. Ensemble, ils ont interprété des chansons inoubliables comme « l’Avventura », « Il y a du soleil sur la France » ou en encore l’incontournable « Made in Normandie »… Autant de tubes remis au-devant de la scène grâce à la tournée « Age tendre et tête de bois » il y a quelques années.
Des racines bourbonnaises
Stone puise ses racines en Auvergne, à Commentry, dans l’Allier, à l’est de Montluçon. « Mon arrière-grand-père, déjà originaire de la région, s’était installé dans cette commune », confirme l’artiste. « Mes grands-parents ont dû la quitter ensuite. A l’époque, ils n’avaient pas de boulot. Ils ne voulaient pas faire mineurs, comme leurs parents. Alors ils se sont installés à Paris où il y avait plus de possibilité de travailler », résume-t-elle. « Ils sont montés à Paris, comme on dit. Mais n’avaient qu’une envie… Celle de redescendre très vite. Ils ont gardé la maison. Ma mère est née là-bas. »
Le Bourbonnais a donc été le terrain de jeu d’enfance de Stone. Elle en garde de nombreux souvenirs. « J’avais un grand-père très sportif. Alors il m’emmenait faire du vélo, on allait sa baigner. Il me jetait dans la rivière… Ce sont des souvenirs formidables », se souvient-elle.
Annie y a vécu toutes ses vacances scolaires. Et aujourd’hui, elle y passe encore beaucoup de temps. « Le confinement a un peu accéléré les choses. On s’est rendu compte, en s’y installant avec les enfants et les petits-enfants, qu’on y était très bien. On a passé des moments formidables et on s’est dit qu’on était mieux là qu’à Paris ! », rit-elle.
Ma mère étant passionnée de chanson, j’ai été baignée toute petite là-dedans
C’est pourtant bien à Paris qu’est née Annie. Enfant, elle ne rêvait déjà que de spectacle. « J’avais la chance d’avoir une maman qui avait été chanteuse. Elle avait chanté dans des opérettes célèbres, notamment à Mogador. » Une carrière néanmoins écourtée « Malheureusement, la guerre est arrivée et il a fallu tout arrêter. Elle s’est alors mariée avec mon papa qui était à la SNCF. Il a donc fallu qu’elle abandonne ses idéaux pour accompagner mon père lors de différentes mutations. » Mais le virus était déjà transmis « Ma mère étant passionnée de chanson, j’ai été baignée toute petite là-dedans. »
Un peu plus tard, elle participe à un concours Miss Beatnik. « J’avais déjà 18 ans. C’était à l’époque de l’explosion de la jeunesse. On avait tous les avantages du moment… j’ai été élue et c’est là que j’ai rencontré Eric Charden. » Ce dernier faisait effectivement partie des membres du jury.
Je n’avais pas encore 21 ans. Il a fallu que mes parents soient derrière pour signer à ma place.
Le coup de foudre n’a pas été réciproque. « Eric traversait une période un peu difficile. Il était un peu torturé. La soirée avait été un peu chaotique. Il est revenu ensuite sur les mêmes endroits pour essayer de me recroiser. Et quand il m’a dit : je suis auteur-compositeur… Il a marqué un point très fort. Ce n’était pas rien. J’étais au début de ma carrière et je cherchais des chansons. C’était essentiel ! » rit-elle.
C’est donc Charden qui a écrit deux des quatre chansons figurant sur le premier disque de Stone. A leur écoute, l’artiste sourit. « C’était quand même un peu amateur, quelque part. » On évoque le style de Françoise Hardy. « Oui, absolument. On était toutes un peu sur le même rythme. C’était cette mouvance-là… »
Lorsqu’elle signe son premier contrat, Stone n’est pas encore majeure. « Je n’avais pas encore 21 ans. Il a fallu que mes parents soient derrière pour signer à ma place. » Quand à son nom de scène, elle rappelle sans hésiter d’où il vient. « A cause de la coiffure de Brian Jones, qui ressemblait à la mienne. Dès l’instant où je me suis mise à sortir, fréquenter les boites de nuit, on m’a appelée ‘petite Stone’. »
Un look qu’elle s’est elle-même choisi, à Commentry. « A l’époque, j’avais le style de Françoise Hardy. Cheveux châtains raides tout à fait classiques. J’ai pris les ciseaux et, devant la glace, j’ai coupé. Et c’est devenu très vite mon surnom. » Elle n’a d’ailleurs jamais considéré être esclave de cette coupe. « Ca a toujours évolué. Il y a eu plus long, plus court… Même si la base est restée. La frange, quand on a les cheveux raides, c’est pratique. »
L'Aventura déferle sur la France
En 1971, arrive le célèbre duo avec Charden, qu’elle a épousé en 1966. « Comme j’étais mineure, il fallait se marier. Sinon mon père ne m’aurait jamais laissée fréquenter un jeune homme ! » rit-elle. C’est ainsi que la France découvre « l’Avventura » qui fut rapidement un triomphe.
Juste avant, pourtant, le duo avait sorti un autre titre, intitulé « le seul bébé qui ne pleure pas », qui connut déjà un petit succès. « Moi je faisais toujours mes 45 tours. Et quelqu’un a proposé qu’Eric intervienne et mette une voix sur la chanson. On a été les premiers étonnés du résultat. Alors on a décidé de faire un duo à part entière et on a fait l’Aventura».
Leur vie est totalement bouleversée. « Eric écrivait des chansons pour Sheila, Claude François, Hallyday et d’autres…Donc on avait une vie très confortable. J’avais décidé d’avoir un enfant. C’était une période calme, ça tombait très bien… Mais ça n’a donc pas duré longtemps ! » s’exclame l’artiste. « Toute notre vie d’avant a été emportée par cette vague. On n’avait jamais imaginé à quel point se serait aussi énorme, quoi ! »
Tout n’était pas toujours simple. « Il y avait des moments difficiles. J’étais jeune maman et je n’avais qu’une idée : m’occuper de mon bébé. Je ne pouvais pas le faire comme je voulais ! Il a fallu s’adapter au jour le jour. Je n’ai pas eu le choix. » Malgré ce tourbillon, Stone estime n’avoir jamais perdu son bon sens. « Ça doit venir de mes origines auvergnates. On n’était pas des débutants. On avait déjà notre carrière en solo depuis des années. On avait appris notre métier, avec des disques, des galas un peu partout. On connaissait notre affaire, quoi. »
Ils vendront tout de même 20 millions de disques. « Oui, mais c’était des 45 tours ! » tempère la chanteuse. Stone participe ensuite à la comédie musicale « May Flower », écrite par Eric Charden. « On savait déjà chanter. On a eu des cours, on a appris à danser et à jouer la comédie. Parce qu’ils nous fallait dominer les trois disciplines. C’était formidable. Et moi je redécouvrais la scène que je connaissais essentiellement comme chanteuse. »
De la chanson...au théâtre
Puis avec la fin des années 70, et arrivé le disco. Un nouveau tournant de carrière. « Eric a eu deux gros succès intitulés ‘Pense à moi’ et ‘L’été sera chaud‘. Moi, j’avais très envie de passer à autre chose. Je me suis dirigée vers le théâtre et, avec ma copine Charlotte Julian, on a écrit une pièce ensemble, intitulée ‘le plus beau métier du monde’, qu’on a joué un an. C’était un plaisir de passer à un autre contexte. »
Elle a gardé des souvenirs précis de cette collaboration, sur les planches, avec Charlotte, restée son amie depuis 1973. « C’était beaucoup plus rigoureux, je trouve, que la chanson. »
La chanson, qu’elle n’a jamais abandonnée. Stone continue de se produire sur scène et de faire des galas. « Cela continue d’être un plaisir, et ce n’est jamais retombé. » Elle parcourt ainsi toute la France. « On sera prochainement en Normandie ! » annonce-t-elle. La chanteuse ne renie pas non plus les duos. « J’ai en ai fait un récemment avec Gilles Dreu, qui vient de sortir un album. Et un autre duo avec Fabienne Thibaut… et on s’est régalées ! »
Une artiste engagée
Aujourd’hui, Stone est engagée dans l’Association ADMD (pour le droit à mourir dans la dignité), créée par Jean-Luc Romero. « Ma maman a, malheureusement, fini ses jours dans la détresse et l’horreur. Et je trouve que c’est infernal d’en arriver là. Je me suis rendue compte que la loi (réclamée par cette association) devrait vraiment être votée. On devrait au moins avoir le choix, comme en Suisse, ou c‘est normal. Mais aussi en Belgique, ou au Luxembourg et certains états aux Etats-Unis. »
Si vraiment on veut mourir dans la dignité, il faut aller s’exiler en Suisse. Ce qui est une horreur, surtout quand on est malade
Elle dénonce la situation « On se retrouve un peu comme dans le cas de l’avortement à une autre époque. Il y a des dérives, de l’hypocrisie. On sait très bien que des euthanasies sont pratiquées. Et, finalement, si vraiment on veut mourir dans la dignité, il faut aller s’exiler en Suisse. Ce qui est une horreur, surtout quand on est malade. »
Stone a donc décidé d’agir. « Je me suis engagée auprès de Jean-Luc Roméro, qui est aussi quelqu’un de passionné. Je suis déléguée dans le 2ème arrondissement de Paris et je m’occupe de gens qui sont malades. Il y a même une dame qui m’a demandé de l’accompagner en Suisse au mois de septembre…C’est un vrai engagement et ce n’est pas facile tous les jours. »
Une fibre artistique familiale
Si Stone –alias Annie Gautrat- est la fille d’une chanteuse d’opérette, elle est aussi… la maman d’une jeune artiste. Sa fille Daisy D'Alba est comédienne et musicienne. Son père, Mario D'Alba, est lui-même acteur. Et elle a manifestement de qui tenir... A l’âge de 12 ans, elle rêvait déjà d’être une Spice-Girl. A 17 ans, elle est devenue chanteuse gothique dans un groupe. « J’en garde la culture. Je suis encore très rockeuse dans l’âme ! » , revendique la jeune femme.
Puis elle a travaillé en musique avec son père. « On a enregistré un album de chansons folk. Lui a signé la musique et moi les paroles », confirme Daisy. Cette dernière a également appris la scène. « J’ai fait deux écoles. Une de comédie musicale, et une de théâtre, soit 6 années. »
Quand on a des parents professionnels, et qu’on sort de scène, c’est plutôt la lecture de notes sur ce qui n’allait pas… Un regard très enrichissant.
Cette « fille de… » n’a jamais spécialement eu à se plaindre de la notoriété de ses parents. « J’ai eu une enfance joyeuse, remplie de copains, avec des parents qui aimaient faire la fête. Une famille unie, même si recomposée. Tout ça s’est super bien goupillé. On était notamment chez Eric (Charden), même si ce n’était pas notre papa. On a été beaucoup emmenés sur les tournées, les galas. Un vrai bonheur, d’être tout le temps sur scène, dans les coulisses, la régie… »
Sa mère l’a plutôt encouragée à se lancer. « Je crois que, au départ, elle était peut-être un peu frileuse. Elle voulait savoir si j’avais le ‘feu sacré’ en moi. Mes parents ne nous ont pas encouragés –avec mon frère- de manière facile. Ils nous ont bien expliqué à quel point cela allait être compliqué. Quand on a des parents professionnels, et qu’on sort de scène, c’est plutôt la lecture de notes sur ce qui n’allait pas… Un regard très enrichissant. Et quand ils y croient, ils sont des alliés de taille » décrypte-t-elle, devant un sourire approbateur de sa maman.
Daisy D'Alba est l’auteure de la pièce « Tu voulais un coup de foudre », dans laquelle elle joue. « Il s’agit de trois regards féminins sur l’amour. Trois femmes qui ont un regard très différent. Elles débattent sur l’amour avec un regard très féministe, très romantique, et accompagnées par une super musicienne. » Elles se produiront du 7 au 30 juillet au Festival d’Avignon, tous les jours.
Maman sera présente. « Moi, je viens pour garder les enfants », souligne Stone avec humour. Et rappelle « On avait joué une pièce ensemble, intitulée ‘famille, je vous aime’, que j’avais écrite, et qui rassemblait toute notre famille. On avait fait Avignon ensemble et passé deux ans sur scène dans le cadre d’une tournée. »
Mais, cette fois, c’est donc un autre rôle qui attend la chanteuse mythique. « Comme les adultes seront occupés, j’assurerai le rôle de grand-mère ! »
REPLAY : Voir ou découvrir l'intégralité de cette émission
Ecouter "Vous êtes formidables" en podcast