Crimes de Montluçon (Allier) : la dangerosité des accusés, point central du procès

Au fil des audiences du procès des crimes de Montluçon, la question de la dangerosité des accusés s’est posée à de nombreuses reprises. Une question qui a aussi été posée aux experts, appelés à la barre de la cours d’assises de Moulins. Parmi eux, le psychiatre Patrick Moreau.

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C’est mandaté par la juge d’instruction que Patrick Moreau, expert-psychiatre, a rencontré Z. A.T., le plus âgé des accusés des crimes de Montluçon (Allier). Un entretien qui s’est déroulé en prison, au quartier disciplinaire pour des violences à l’encontre d’un autre détenu.
Appelé à la barre, le docteur Moreau a d'emblée posé le décor : « De ma longue carrière, c’est la toute première fois qui j’ai été confronté à quelqu’un qui sort de l’adolescence et qui commet de tels actes, à un tel déchaînement de violences de la part de gens si jeunes. »
Ce qui l’a marqué également, c’est la façon dont Z. A.T lui a raconté ses passages à l’acte. « C’était un récit opératoire factuel sans aucune émotion. Strictement aucune émotion. Il décrivait les faits comme s’il en était spectateur, comme il aurait décrit une scène de jeu vidéo, une scène virtuelle ».
De ce face-à-face est ressortie une certitude pour lui : « Il n’est ni psychotique, ni paranoïaque et le diagnostic de psychopathie est totalement écarté ». Catégorique, il l’est aussi concernant le rôle qu’aurait pu jouer sa consommation excessive d’alcool et de cannabis : « La cause psychotoxique, et je l’affirme haut et fort, doit aussi être totalement écartée du point de vue médico-légal ».
 

« J’ai besoin d’être éduqué »



Pour le docteur Moreau, qui a longtemps exercé en tant que pédopsychiatre, il présente malgré tout « une dangerosité psychotique importante (...) Il est dans une violence de destruction où l’autre n’existe pas, est nié. Cette primauté narcissique de la violence est une façon d’échapper à la gestion de son inexistence. Il survit dans la destruction de l’autre. Cette dangerosité est très problématique. »
 Concernant les perspectives d’évolution, il s’est montré très pessimiste. « Il peut peut-être évoluer mais cela nécessite des soins. Et s’il ne s’implique pas, s’il ne prend pas lui-même les choses en main, rien ne pourra changer en ce qui concerne sa dangerosité ».
Quelques heures plus tard, alors qu’il était entendu par la cour sur son parcours de vie, Z. A.T. a fait ce même constat : « J’ai besoin d’être éduqué. Si je n’ai pas d’éducation en prison, je ne pourrai pas grandir ».   
Trois questions au psychiatre Patrick Moreau
Vous avez expliqué à la cour, en préambule de votre exposé, que vous n’aviez jamais été confronté à un tel dossier.  En quoi est-il hors norme ?

Patrick Moreau : "Dans ma carrière, j’ai déjà été confronté à des actes de torture et de barbarie. Mais jusqu’à présent, ça a toujours été avec des sujets adultes, dans des circonstances qui n’étaient pas du tout celles de cette affaire. C’est la première fois que je me suis retrouvé face à la mise en cause d’adolescents, c’est-à-dire de jeunes qui sont encore en formation de personnalité et qui ont commis de tels actes. C’est une affaire grave pour les victimes et pour leurs familles bien évidemment, mais c’est aussi une affaire hors du commun du point de vue médico-légal".

Trois crimes et un viol en très peu de temps. Cet enchaînement est-il lui aussi hors norme ?

Patrick Moreau : "Effectivement, il y a trois scènes, trois théâtres de violences. Une première, puis il se passe une dizaine de jours et ensuite deux scènes concomitantes, sur la même nuit. Mais ce n’est pas tellement la question de la répétition qui se pose. C’est plutôt celle du pourquoi. Pourquoi un tel déchaînement de violences qui aboutit à la destructivité d’au moins trois êtres sur le plan physique et de deux autres sur le plan psychique".

Avez-vous diagnostiqué des pathologies chez les accusés ?

Patrick Moreau :"Non. Concernant celui que j’ai vu, il a un trouble de personnalité qui n’est pas une maladie psychiatrique structurelle, ce qui complètement différent. Mais comme je l’ai dit à l’audience, ce n’est pas sur ce trouble de personnalité que peut reposer une tentative d’explication des actes.  C’est sur quelque chose d’autre : c’est-à-dire la violence fondamentale qui a été appelée barbarie par ma collègue experte qui a pu rencontrer l’autre accusé". 
 
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