INSOLITE. Cette peintre a fait de son daltonisme une force : "Je ne sais pas ce que je prends réellement comme couleurs"

Peut-on être peintre et daltonien ? Janik’Acrylik, qui vit dans l'Allier, ne s’est pas embarrassée avec cette question. Sa passion a commencé comme une thérapie. Elle a choisi de transmettre à son tour, notamment par des ateliers auprès des enfants.

Une peintre autodidacte. C’est ainsi que se présente Janik’Acrylik. Agée de 41 ans, elle vit à Estivareilles, près de Montluçon, dans l’Allier. Son amour de la peinture l’a saisie, comme une révélation, en 2017. Janik raconte : « Suite à des soucis d’ordre professionnel, j’ai découvert la peinture. On m’avait conseillé de faire des mandalas en guise de thérapie. Mais cela ne me correspondait pas du tout. J’ai alors pris une toile et de la peinture. J’ai commencé en noir et blanc parce que je suis daltonienne. Je n’osais pas mettre de couleurs. Cela m’a plu et j’ai continué. Petit à petit j’ai rajouté des couleurs. Maintenant, je m’amuse avec les couleurs. Cette thérapie est devenue une passion ».

Une peintre daltonienne

En effet, chose peu commune pour une peintre, Janik est atteinte de daltonisme :  « J’avais à peu près 10 ans quand on m’a diagnostiquée. Mon papa était daltonien. Ma grand-mère nous faisait faire des dessins avec mes cousins. Elle a remarqué que je me trompais tout le temps pour faire les arbres, je mettais les troncs verts et les feuilles marron. Un jour elle m’a dit clairement de faire une maison avec les volets roses, les portes bleues. Ca n’allait pas du tout. Mes parents m’ont emmenée chez l’ophtalmologue qui m’a dit qu’il n’y avait pas de doute possible. Je suis atteinte de protanopie : j’ai l’absence des cônes rouges ». Elle a réussi à dépasser cette difficulté en faisant preuve d’audace : « Je n’osais pas prendre les couleurs parce que je ne savais pas si ça allait ensemble. Mais j’ai finalement osé, en me disant que cela pourrait faire au mieux quelque chose d’original. Au final, ça fonctionne : personne ne me dit que je fais des fautes de goût au niveau des couleurs ».

"Je suis dans ma bulle quand je peins"

Janik évoque le plaisir que lui procure la peinture : « Je suis dans ma bulle quand je peins. J’oublie tout. Je suis bien. Je ne pense à rien. Cela me libère et cela me fait du bien. Cela peut me prendre à n’importe quelle heure, le soir, le matin. Je suis vraiment détendue ». Avec des maîtres comme Miro, Delaunay ou Picasso, la Bourbonnaise a une préférence pour la peinture à l’acrylique. Elle explique le processus de création : « Je n’ai pas de modèle. Je suis complètement autodidacte. Je n’ai pris aucun cours de dessin ou de peinture. J’essaie : c’est mon mot favori. Je ne me mets pas de limite. Je prends des couleurs, je les mélange. Je ne sais pas ce que je prends réellement comme couleurs. C’est ce que je vois avec mes yeux. Au niveau des textures, plus on bat la peinture, plus elle va devenir liquide. Si je veux mettre du relief, soit je mets beaucoup de peinture, soit j’aurai une peinture un peu plus solide. Je peins au feeling. Quand je prends une toile, je ne sais jamais ce que je vais faire. Je mélange les couleurs jusqu’à ce que cela me plaise ».

Le choix de l'abstraction

Janik a choisi de s’exprimer à travers l’abstraction : « Je suis nulle en dessin. Je fais de l’abstrait parce que je trouve que c’est quelque chose qui ne ressemble à rien mais que chacun peut s’approprier. Les gens regardent les tableaux et ils ont chacun un œil différent ». Son daltonisme n’est pas caché, au contraire, elle en fait une force : « Quand je dis que je suis daltonienne et que je n’ai pas le cône rouge, alors que j’utilise a priori beaucoup de rouge, les gens sont surpris ». Janik peint chez elle. Elle rêve d’avoir un jour un atelier avec une partie galerie. Elle se lance dans une nouvelle aventure en proposant des ateliers aux plus jeunes, mais pas seulement : « Je me lance dans des ateliers dans des écoles pour faire découvrir l’art aux enfants. C’est super car je leur partage ma passion pour l’art. Ils sont hyper créatifs et très curieux. Je leur explique que ce n’est pas parce que je suis daltonienne que cela m’a empêchée de faire de la peinture. C’est aussi un message d’espoir que je leur délivre, en leur disant que, malgré une différence, il faut aller de l’avant et faire de sa différence une force. J’aimerais aussi toucher les personnes âgées dans les EHPAD. J’ai commencé la peinture comme une art-thérapie ». 


A partir du samedi 1er avril et jusqu’au 27 mai, ses œuvres seront exposées au musée du canal de Berry, près de Montluçon, puis du 3 au 11 juin, au fonds d’art moderne et contemporain, toujours à Montluçon. L’occasion idéale de découvrir des peintures réalisées par une daltonienne mais avant tout une artiste.

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