Colère et désarroi à la fédération de pêche de l'Ardèche, la vidange du barrage de Collanges décidée par le département a été effectué sans précaution. Des milliers de poissons morts se sont échoués sur les bords de la rivière Eyrieux.
Des milliers de cadavres de poissons jonchent les bords de la rivière Eyrieux. La vidange du barrage de Collanges a provoqué la mort des poissons en aval. Les pêcheurs constatent le désastre écologique avec colère.
Une catastrophe écologique
Brochets, truites fario, carpes et d'autres espèces plus petites de poisson d'eau douce jonchent les bords de la rivière. "Le paradis de la pêche" comme les adeptes le surnommer est devenu un cimetière de poissons. Les membres de la fédération de pêche de l'Ardèche ne peuvent que constater avec amertume la catastrophe écologique.
Emmanuel Vialle, le président de la fédération de pêche pèse chacun de ses mots. Habitué des lieux, le spectacle le scandalise d'autant plus que la fédération s'était opposé à la vidange du barrage et annoncé le carnage. "C’est une désolation pour les gens qui s’occupent des poissons et des rivières. Ce qui est désolant surtout c’est que l’on avait prévenu. On savait que ça allait arriver. Pour nous c’était écrit, on a des compétences techniques qui nous permettaient de l'affirmer. On avait alerté et on a fait savoir qu’on n’était pas d’accord.
Nous avons demandé des mesures de sauvegarde du poisson dans le barrage pour ne pas décimer la rivière en aval".
En aval du barrage, les truites prisées des pêcheurs sont retrouvées mortes. Elles ont succombé par manque d'oxygène, étouffées par les sédiments en suspension trop nombreux.
Gaëtan Habauzit, directeur adjoint de la fédération de pêche de l’Ardèche, n’a jamais vu ça. Il estime qu'il sera possible de remettre des poissons dans le barrage mais l'écosystème est anéanti pour les décennies à venir. Il considère qu'une autre méthode aurait pu être envisagée.
L'eau, une urgence pour les agriculteurs
Les vannes ont été ouvertes trop brutalement, sans barrage filtrant pour retenir les boues, ce mercredi 2 octobre. Pour Emmanuel Vialle, ni en 2022, ni en 2023, années particulièrement arides, le volume d’eau de la rivière n'a été impacté. "Il avait baissé de 2 m, tout au plus, et on était sur une sécheresse historique." Il n’y avait pas de caractère d’urgence à vider le barrage", poursuit-il. "On avait averti, "ça va tuer le poisson existant mais surtout ça va stériliser la rivière en aval car il y a des risques bactériologiques à cause de ces tonnes de poissons en décomposition. Comment les agriculteurs font arroser ?" interroge-t-il.
Gaëtan Habauzit alerte sur les conséquences induites par la mort des poissons. "L’impact sur la santé humaine, on ne peut pas encore le mesurer, dit-il accroupi en saisissant des cadavres de poissons, regardez tous ces poissons, ça va se décomposer, ça va être complètement pourri, ça va se retrouver dans l’eau. En aval, il y a plusieurs captages d’eau potable, j’ai hâte de voir les analyses de l'ARS dans quelques semaines, sans parler des métaux lourds, ni tout ce qui se retrouve dans les bouchons (sédimentaires) déversés là."
Un protocole contesté
Olivier Amrane, le président du Conseil départemental dit ne pas avoir eu le choix, les vannes ne pouvaient être ouvertes "doucement" comme le préconisait la fédération des pêcheurs. Il souligne que les poissons seraient d'ailleurs selon lui impropres à la consommation. "On avait prévu une ligne budgétaire colossale de 100 000 euros pour "réempoissonner", donc nous savions qu'il pouvait y avoir un impact. L’enjeu aujourd'hui c'est que l'on retrouve une eau propre ce qui n'était pas le cas, avec des capacités de stockage optimales (3 000 000)."
Pour lui les conséquences de cette vidange ne touchent pas uniquement les poissons. "La santé humaine, les insectes qui vivent dans l’eau sont touchés. C’est aussi l’économie qui est frappée car le tourisme de la pêche est mort sur la vallée, alors que les pêcheurs viennent de toute l’Europe."
Une plainte a été déposée auprès du procureur de la République jeudi 3 octobre 2024, pour destruction d’espèces et pollution des milieux.
La fédération souhaite également porter plainte au pénal.