Auvergne-Rhône-Alpes est la principale zone française de production de cerises. La récolte a commencé dans le sud de l'Ardèche, où les vergers ont souffert de la sécheresse. Dans le Rhône, les premiers fruits seront mûrs dès la semaine prochaine. Mais selon les terroirs, la production 2023 s'annonce contrastée.
Une peau rebondie qui croque sous la dent, une chair vermillon et un goût inimitable : la cerise est le premier fruit des beaux jours revenus. Elle vient de faire son apparition sur les marchés d'Auvergne-Rhône Alpes, à des prix qui oscillent entre 7 et 9 euros le kilo.
Des premières cerises que la pluie a fait éclater
Dans les vergers de Christel Cesana, arboricultrice à Orgnac l'Aven, aux confins de l'Ardèche et du Gard, la récolte a commencé aux alentours du 10 mai et les premières impressions sont mitigées. "On n'a quasiment pas eu de pluie pendant six mois. Début mai, on a eu pas mal d'eau, un peu de grêle. Résultat : une bonne moitié des cerises qu'on récolte en ce moment sont fendues" déplore-t-elle. "On croise les doigts pour que les variétés plus tardives ne fendent pas".
De toute façon, dans le sud de l'Ardèche, la récolte ne s'annonçait pas très abondante, à cause d'une mauvaise nouaison. La nouaison, c'est le moment où le fruit se forme juste après la floraison. Cette année, il y avait pas mal de fleurs stériles, qui n'ont pas donné de fruit. Plusieurs facteurs peuvent expliquer une mauvaise nouaison. "Entre autres, la sécheresse de l'été dernier. En arboriculture, les aléas climatiques ont des répercussions sur l'année suivante. 2023, c'est un peu une année de m..." confie Christel.
Quand les arbres souffrent, ils se mettent en quelque sorte en mode sécurité.
Christel Cesana,productrice de cerises en Ardèche
Dans le nord de l'Ardèche, les cerises ne seront pas mûres avant plusieurs semaines. Les vergers sont situés plus haut, le climat est moins méditerranéen et les variétés plus tardives.
Dans le Rhône, une récolte qui s'annonce abondante
Autre fief régional de la cerise au nord de la région, le secteur de Bessenay dans le Rhône. La récolte des cerises, pour l'instant des burlats, devrait commencer la semaine prochaine, pile pour la Pentecôte. "C'est le moment où les consommateurs ont envie de croquer les premières cerises" souligne Alain Coquard. Dans les vergers de cet arboriculteur, "la récolte des variétés précoces, comme la burlat, s'annonce abondante. Les variétés dites tardives, comme la Régina, qui ne se cueille pas avant la fin juin, sont un peu en retard, mais les volumes devraient être bons."
Pour l'instant, Alain Coquard est raisonnablement optimiste. "Ce printemps, on n'a pas eu de gel au moment critique, il a plu ce qu'il fallait donc on devrait attaquer les premières récoltes la semaine prochaine dans de bonnes conditions."
La menace de la mouche suzukii
En revanche, Alain Coquard est moins optimiste sur la question des attaques de la mouche drosophila suzukii. "On n'a aucune parade efficace, à présent que les traitements qui existaient sont interdits, on ne nous a proposé aucune solution de remplacement. Certains arboriculteurs essaient les filets de protection sur les cerisiers, mais c'est cher et pas complètement satisfaisant. Et quand la suzukii attaque un verger, toute la production de cerises est immangeable : ça donne un goût de vinaigre et la cerise est fichue..."
Même inquiétude pour l'Ardéchoise Christel Cesana. "Début mai, on a eu quelques jours de températures élevées, ce qui a immédiatement entraîné des attaques très fortes de la suzukii. Heureusement, la chaleur n'a pas duré. Mais on surveille nos arbres de près."
Plus de traitement chimique, mais aucune autre solution
En janvier dernier, les producteurs ardéchois de cerises avaient manifesté à Tournon. Ils demandaient aux pouvoirs publics de pouvoir continuer à utiliser un insecticide efficace contre la mouche suzukii mais récemment interdit en France. Le temps de trouver un produit phytosanitaire de remplacement qui ne soit pas toxique. Ils n'ont pas obtenu gain de cause.
"On a vraiment besoin du soutien des consommateurs. Il faut qu'ils privilégient les cerises françaises pour que l'on puisse continuer " conclut Christel. Cette année, la production de cerises françaises devrait progresser de 2% par rapport à 2022. Cependant, le recul des surfaces cultivées se confirme. En Auvergne-Rhône-Alpes, principale zone de production française, 2500 hectares de cerisiers ont disparu en un an.