Loup : après une recrudescence d'attaques ces dernières semaines, l'Ardèche impuissante

En Ardèche, le loup est de retour et les attaques contre les troupeaux se multiplient. Les éleveurs exigent de pouvoir défendre leurs bêtes avec des tirs de défense contre le prédateur. Mais certains scientifiques estiment que ces tirs sont peu efficaces.

Dans les montagnes ardéchoises, le mois de novembre n'a pas seulement été chaud par les températures anormalement élevées. Sur les hauteurs, les éleveurs ont fait face à de nombreuses attaques de loups, principalement sur le plateau du Coiron.

On est sûrement face à un individu solitaire, car les attaques ont eu lieu dans le même périmètre

Nicolas Jean, OGB

Ce massif d'une altitude moyenne de 700 mètres est prisé des éleveurs qui font paître leurs troupeaux sur des pentes verdoyantes, dominées par des crêtes de couleur sombre. 

En novembre 2022, la préfecture de l'Ardèche a comptabilisé sept attaques dans la région pour un total de 40 bêtes tuées. "On est sûrement face à un individu solitaire, car les attaques ont eu lieu dans le même périmètre", analyse Nicolas Jean, directeur adjoint de la direction grands prédateurs terrestres de l'Office français de la biodiversité (OGB). 

Face à ce retour du loup, les éleveurs ont demandé à l'Etat de pouvoir effectuer davantage de tir de défense. Une procédure qui autorise un éleveur à tirer sur des loups lors d'attaques ou suite à des attaques, à la condition que ces éleveurs aient déjà mis en place en amont des moyens de protection contre le loup. 

Des autorisations de tir de défense

Actuellement, cinq éleveurs bénéficient d'une autorisation de tir de défense simple. C'est-à-dire qu'ils peuvent tirer sur un loup ou une meute qui attaquerait leur troupeau. La préfecture ajoute que les 14 éleveurs qui bénéficiaient de l'autorisation jusqu'au 30 novembre 2022 ont été informés de la possibilité de solliciter le renouvellement de leur autorisation.

Un arrêté préfectoral autorise les louvetiers de l’Ardèche à intervenir en appui des éleveurs dans les secteurs de Berzeme, Freyssenet, Saint-Martin sur Lavezon et Saint-Pierre-la-Roche. 

On ne sait jamais si on tue le loup qui a attaqué de moutons ou si c'est un autre qui est abattu à sa place

Denis Doublet, vice-président de l'association Ferus

Mais ces tirs de défense sont-ils vraiment efficaces contre les attaques de meutes ou de loups solitaires ? "A priori, aucune étude ne montre que les tirs sont efficaces. Selon les massifs, un tir peut-être parfois efficace, parfois pas du tout. On ne sait jamais si on tue le loup qui a attaqué de moutons ou si c'est un autre qui est abattu à sa place", raconte Denis Doublet, vice-président de l'association Ferus, qui a mis en place depuis plus de 20 ans un programme de soutien chez les éleveurs en zone à loups. 

Selon Nicolas Jean de l'OFB, le tir n'arrive qu'en dernier recours. "Ce qui va être efficace, c'est d'abord le gardiennage, l'installation de clôture, la présence de chiens. Si tout cela ne marche pas, l'étape supérieure c'est le tir". Mais les louvetiers ou éleveurs autorisés à tirer sur un loup font souvent chou blanc. "La probabilité de voir un loup et de le tirer est faible", juge Nicolas JeanEn 2022, aucun loup n'a été abattu officiellement en Ardèche. 

"Les éleveurs qui sont confrontés à des attaques peuvent vite se dire, il n'y a rien qui marche sauf les tirs"

Denis Doublet

coordinateur loup de l'association Ferus

Autre limite au tir, un loup abattu peut être vite remplacé par un autre animal. "Le tir, il ne faut pas rêver. Vu la densité de loup qu'il y a dans les Alpes, il est très probable qu'un autre individu s'installe à la place de celui qui a été tiré", souffle le directeur adjoint de l'OFB. 

Pour les éleveurs, les tirs apparaissent pourtant comme le moyen le plus sûr d'éliminer rapidement une menace pour leur troupeau.

"C'est humain que les éleveur soient pour les tirs. Les éleveurs qui sont confrontés à des attaques peuvent vite se dire, "il n'y a rien qui marche sauf les tirs". Mais nous ce qu'on voit sur le terrain, c'est qu'il faut bien utiliser les moyens financés par l'Etat pour protéger les troupeaux. Il y a des éleveurs qui nous disent que leur chien n'a pas pu empêcher une attaque, mais leur chien c'est peut-être encore un chiot. Il faut trois ans avant qu'un chien soit efficace face au loup et c'est beaucoup de travail pour un éleveur de dresser son chien", poursuit Denis Doublet, qui accompagne les bergers et éleveurs face au retour du loup. 

Des pièges photos déployés par la préfecture

Pour tenter de mieux cerner la présence du loup en Ardèche, des pièges photographiques sont déployés par l'administration qui veut aider au mieux les éleveurs en fonction des observations. "La période hivernale qui arrive va être propice en cas de neige pour rechercher et collecter des indices génétiques", indique les services de la préfecture.

Les éleveurs demandent une réponse rapide pour mettre fin aux attaques. "Il ne faut pas que le loup s'installe sur le Coiron, où les bêtes sont à l'extérieur toute l'année. Sinon, c'est le système entier de l'élevage qui est mis en danger", avait déclaré Christel Cesana, la patronne de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles (FDSEA), au journal du Dauphiné en novembre. 

La préfecture a annoncé la tenue le 12 janvier 2023 d'un comité départemental "grand prédateur" qui doit rassembler l'ensemble des parties prenantes concernées par le retour du loup.

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