Témoignage. "Les enfants hors normes n'ont plus de place en France, ils dérangent et coûtent cher, c'est une triste réalité"

Publié le Écrit par Dolores Mazzola

Une mère de famille de Plats, petite commune proche de Tournon-sur-Rhône, en Ardèche, s'indigne et interpelle le président de la République sur les réseaux sociaux. Gabrielle, sa fille de 15 ans, ne trouve aucune solution adaptée à son handicap. Une bouteille à la mer pour cette maman combative.

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"Les promesses au moment des élections. Où sont-elles ? Pauvre France ! Mais où va-t-on !", c'est avec de mots de colère et surtout de désespoir, que Sylvie Cavé, une mère de famille ardéchoise, interpelle le président Macron sur les réseaux sociaux. Sa fille Gabrielle, atteinte d'une maladie génétique, est handicapée. Elle se retrouve privée d'avenir, faute d'une solution véritablement adaptée qui lui permettrait de progresser et de s'épanouir. La maman se sent abandonnée et dénonce le traitement fait en France aux enfants en situation de handicap. 

"Elle n'est pas sotte !"

Début octobre, Sylvie Cavé, énergique maman ardéchoise, a écrit une lettre ouverte au président de la République dans laquelle elle exprime toute sa détresse. Une détresse teintée de colère et de révolte. Quelques mots suffisent à résumer la situation de son enfant : "Notre fille Gabrielle, 15 ans, est très malvoyante. Elle a subi deux ans de chimio à cause d'une tumeur. Elle a des troubles du spectre de l'autisme et des troubles du comportement associé, avec crise clastique. Elle est en échec scolaire au vu de toutes ces difficultés", écrit la maman. 

En effet, Gabrielle n'a que 15 ans et déjà un bien lourd dossier médical. L'adolescente est atteinte d'une maladie génétique : la neurofibromatose de type 1. Si la jeune fille est aujourd'hui malvoyante, avec moins d'un dixième de vue malgré des lunettes, ce sont les conséquences d'une chimiothérapie entamée trop tardivement, d'après Sylvie. Son handicap visuel a de lourdes conséquences. "Elle est en échec scolaire total, mais elle a des compétences. Elle n'est pas sotte, elle n'est pas sotte", martèle Sylvie, jointe par téléphone. 
La jeune fille aimerait trouver sa voie dans l'esthétique ou les massages, selon sa mère. Gabrielle aime aussi le chant et assiste à des concerts. Comme toutes les jeunes filles de son âge.

Dans sa lettre ouverte, qui ressemble davantage à un appel au secours, la maman de Gabrielle explique être à la recherche d'un établissement médicalisé, en internat, dans l'espoir d'offrir une vie meilleure à sa fille. Car cette famille se heurte à un écueil : l'insuffisance de structures médicalisées adaptées, notamment au cas complexe de son enfant. "Il y a très peu d'établissements en France, et où ils sont tous complets !  Alors comment faire ???", a écrit Sylvie. Au téléphone, ses propos ne varient pas : "On ne trouve pas d'établissement. Il n'y a pas d'établissement pour elle, car elle cumule trop de problèmes. Je ne trouve rien !".

Stress et angoisse

"Parfois ma fille me demande si après la mort, on a une autre vie et si c'est une vie sans maladies," confie Sylvie, en ravalant ses larmes. Pour Gabrielle, les problèmes de santé semblent s'accumuler. L'adolescente, qui a déjà été traitée pour une tumeur des voies optiques, souffre à présent d'une nouvelle tumeur bénigne au cerveau. Si le prochain IRM est prévu en décembre, l'annonce du diagnostic à la jeune fille a été prématurée pour cette maman. Une angoisse supplémentaire à gérer pour l'adolescente qui ne l'a pas supportée.

"Son docteur lui a annoncé en juillet une nouvelle tumeur. Elle n'arrive plus à surmonter tout cela", explique sa mère. Cette dernière confie aussi la perte de confiance de sa fille vis-à-vis du corps médical après "beaucoup d'épreuves et d'erreurs".  

Gabrielle est en grande souffrance, elle ne supporte plus cette situation, cette exclusion de notre société.

Sylvie Cavé

Soumise à un important stress, Gabrielle a été admise en hôpital psychiatrique pour adolescents à la rentrée. Une admission temporaire, le temps qu'elle aille un peu mieux. Peut-être le temps de trouver un établissement susceptible de l'accueillir.

Pas de structure adaptée

Combative et bien déterminée à trouver une solution pour le bien-être de sa fille, elle explique avoir sonné en vain à toutes les portes : la MDPH de l'Ardèche, Fadila Khatabbi alors ministre en charge du handicap, la députée du Rhône Anne Brugnera, Olivier Dussopt l'ancien député de l'Ardèche, ARS... Jusqu'à Madame Brigitte Macron.
Si elle obtient des réponses pleines de compassion, des mots de soutien et des lettres de recommandation pour intégrer un institut lyonnais qu'elle a identifié comme pouvant correspondre aux besoins de sa fille, la maman s'est vue opposer une fin de non-recevoir. "Pas de passe-droit, l'établissement est plein, surchargé de demandes et la liste d'attente est longue".

Gabrielle n'est pas la seule dans cette situation. Il y a beaucoup d'enfants autistes notamment. Ils sont chez eux, car il n'y a pas d'accueil.

Sylvie Cavé

Des associations, Sylvie en a pourtant contacté une quantité impensable. Aucune n'a pu lui trouver une solution concrète.

"Au placard"

Comme tous les parents d'enfants handicapés, Sylvie ne cache pas ses craintes pour l'avenir. "Que va-t-elle devenir ? Rester chez nous toute sa vie parce que personne ne peut lui faire une place dans notre société ?", interroge la mère de famille. "Tous ces enfants, on les met au placard. Je veux que plus tard, elle ait un travail, qu'elle se sociabilise. Et pas simplement une allocation handicapée ! Elle a des compétences", ajoute Sylvie. Son souhait dans l'immédiat : trouver un lieu unique où sa fille pourrait évoluer. Un établissement qui "la tire vers le haut".

Heureusement que j'ai le travail. Mais, je n'arrêterai pas, je vais me battre tant que je peux pour ma fille. Si j'avais les moyens, je créerais un établissement pour les enfants comme elle. Mais c'est de toute façon trop long.

Sylvie Cavé

Malgré toutes ses démarches, l'énergie dépensée et des heures passées au téléphone, la pugnace mère de famille se retrouve aujourd'hui dans une impasse. Son souhait avec cette lettre ouverte était d'alerter les pouvoirs publics, mais peut-être attirer l'attention d'un chef d'établissement qui pourrait accueillir sa fille. Pas nécessairement près de chez elle, même si elle sait que la séparation sera pénible.

Au-delà de cette bouteille à la mer, reste le constat d'une maman amère et indignée : tout est affaire d'argent et de volonté politique. "Les enfants 'hors normes' n'ont plus de place chez nous, ils dérangent et coûtent cher, c'est une triste réalité", a écrit Sylvie à l'adresse du chef de l'État."Prenez exemple sur la Belgique ou autre pays du nord, eux, ils savent la vraie valeur de nos enfants différents, et reconnaissent leur qualité et les aident, mais pas vous !".

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