Le tatouage est en vogue à Aubenas. Plusieurs boutiques et salons de tatoueurs ont fleuri dans la capitale du sud Ardèche en quelques mois. Comment expliquer cette tendance inédite ?
"On ne pensait pas que cette ville réunirait autant de salons de tatouage", explique une jeune passante. "Et ça continue. Deux salons ont ouvert il y a peu de temps", ajoute son compagnon. Le jeune couple, déjà tatoué, ne s'en cache pas : cette abondance de salon à Aubenas les incite fortement à passer dans les mains d'un professionnel pour un nouveau projet encré.
Si tant de salons de tatouage coexistent aujourd'hui à Aubenas, certains ne se sont effectivement installés que tout récemment. Comment expliquer cette inflation ? Une formation accessible ? Des loyers abordables ? Une clientèle plus importante qu'ailleurs ?
Environnement propice
"Quand j'ai fait mon étude de marché, il y avait trois tatoueurs, pas sept", explique Coralie Poulet Rutherford. Elle a été surprise de constater que plusieurs salons avaient ouvert sur Aubenas quelques mois à peine avant elle. Il y a huit ans, cette commune du sud Ardèche ne comptait en effet que trois salons. Aujourd'hui, ils sont effectivement dix tatoueurs à Aubenas, dont neuf en centre-ville. Une densité plutôt rare : la commune compte un tatoueur pour environ 1200 habitants.
Du côté de la municipalité, on parle d'un environnement "favorable à l'activité". "Aubenas est une ville de patrimoine, de culture, d'art de manière générale. Le centre d'art contemporain a ouvert au château. On vient d'ouvrir le 18A, maison des métiers d'art, dans un hôtel particulier. On voit des galeries ouvrir et on voit des tatoueurs, c'est l'art sur soi d'une certaine manière", explique Émilie Chirouze, chef de service Développement du centre-ville d'Aubenas.
En une seule année, ce sont sept salons qui ont ouvert dans la cité albenassienne. "Beaucoup ont ouvert entre 2023 et 2024. On a des reconversions. Beaucoup ont un talent graphique et se sont dit : pourquoi pas ?", avance-t-elle en guise d'explication.
"Chacun son style"
C'est bel et bien le cas de Coralie. Cette ancienne employée dans les assurances a toujours rêvé d’avoir son propre salon. Aujourd’hui, elle vit de sa passion et accueille les clients librement, sans rendez-vous.
Et si les tatoueurs ne manquent pas à Aubenas, ils ne se font pas tant concurrence. New school, biomécanique, aquarelle, floral, néo-traditionnel ... À chacun sa spécialité. Malgré la présence de ses confrères, Coralie n'est pas inquiète et n'a pas craint de se lancer dans l'aventure. "Mon projet était déjà fait. Et tout le monde propose des trucs différents. Je fais aussi des grosses pièces, mais je fais surtout des tatous rapides, des tabous de groupes et petits tatous. D'autres travaillent sur rendez-vous et refusent les petits ou bien, il faut attendre plusieurs mois pour avoir un rendez-vous".
Même écho chez Samantha Delolme. Elle a ouvert son salon voilà près de huit ans. Elle était la troisième sur la place à l'époque. Comment a-t-elle vécu l'arrivée de la concurrence ? "Je trouve que c'est bien, chacun à son style", assure Samantha. La concurrence ne la trouble pas, au contraire. Hormis à travers les réseaux sociaux, qui leur servent souvent de vitrines pour exposer leurs réalisations, les tatoueurs d'Aubenas se connaissent peu. "On connaît le travail de chacun, mais on ne se connaît pas. C'est un peu dommage", regrette la jeune femme.
Si les salons fleurissent, Samantha en est convaincue, c'est parce que le phénomène répond à une mode. "Le tatouage s'est plus que banalisé, il s'est démocratisé", assure la gérante du salon. Motifs artistiques, insolites ou maquillage permanent, la mode ne semble épargner personne. "Le tatouage touche beaucoup de catégories socio-professionnelles, tous les âges", confirme Émilie Chirouze.
Dynamiser le centre-ville
Dans les rues d'Aubenas, si les salons de tatouage poussent comme des champignons, ils sont loin de se faire de l'ombre. "Les tatoueurs ne sont pas tous les uns à côté des autres. Ils ont vraiment choisi leur emplacement en fonction de leur clientèle et de leur style", assure Émilie Chirouze.
Si la ville est ravie d’accueillir tous ces artistes, elle tend aussi les bras à d’autres professionnels pour varier l’offre commerciale. Avis aux bouchers, poissonniers et autres commerçants d'articles de maison. Une option approuvée par Samantha. Cette dernière est tout à fait favorable à l'installation de commerces plus classiques dans le centre-ville d'Aubenas. "Ce serait bien, si on pouvait avoir plus de choix de commerces. Ils créent une dynamique pour une ville, plus que les salons de tatouage".
Aujourd'hui, ces commerces permettent de redynamiser le centre-ville et donnent une autre image du sud Ardèche, terre de la châtaigne et de canoé...