Longtemps présenté comme « itinéraire bis » sur la route des grandes vacances, les départementales pourraient bien être les grands vainqueurs de l'été. Et l’Auvergne de devenir un Eldorado dans l’air du temps... pour partir à la chasse aux trésors oubliés. Voici 5 lieux insolites à découvrir.
Comment peut-on encore l’ignorer ? Montagnes, volcans, rivières, lacs, chemins de rando, paysages à perte de vue, l’Auvergne regorge de lieux grandeur nature. A l’heure des vacances d’été post-confinement, la région se prépare à accueillir des touristes en mal de grands espaces, en quête d’authenticité, loin en tout cas des littoraux où la promiscuité ne semble plus être la norme. Des rivières discrètes des Combrailles aux forêts endormies du Cantal, des locaux ont bien voulu nous ouvrir leur boîte à trésors. Ces trésors cachés d’une Auvergne secrète pour celles et ceux qui savent s’émerveiller du chant d’un ruisseau ou d’un rayon de lumière à travers les arbres que l’on voudrait pourtant garder pour soi, jalousement. Mais pour qui sait observer et être curieux, l’Auvergne sait se montrer généreuse.
Dans l'Allier, le monde souterrain des Gaulois (Destination 1/5)
La Montagne Bourbonnaise et sa voisine la Montagne Thiernoise ont en partage des trésors secrets communs. Des trous creusés dans la terre par la main de l’Homme il y a 1700 ans et qui nourrissent encore l’imaginaire. Car malgré des années d’études réalisées, le mystère reste entier quant à l’usage de ces souterrains.
Si l’on devait reporter sur une carte l’emplacement de ces galeries, on découvrirait d’un seul coup d’œil un territoire, entre Forez et Bourbonnais, truffé d’excavations. Sur la seule commune d’Arfeuilles (Allier), on en dénombre plus d’une trentaine découvertes par un seul et même homme, Maurice Franc, aujourd’hui disparu. Ingénieur de métier, cet habitant d’Avermes vouait une véritable passion pour l’archéologie. « C’est le grand découvreur de ces souterrains » raconte Jacques Terracol, maire du village. « Il s’est passionné pour eux pendant 20 ans et avant sa mort, il a voulu léguer au Syndicat Mixte des Monts de la Madeleine toutes ses archives, ses travaux de recherches, cela représente 300, peut-être 400 kilos de documents ». L’homme cherchait à savoir quelle utilité pouvait bien avoir ces boyaux souterrains, hauts d’1,70 m, et larges d’1 mètre, creusés à la main, avec des outils. « Ils ont tous la même forme, en boucle, c’est pourquoi on les appelle les ‘‘souterrains annulaires’’. On y a retrouvé quelques tessons de poterie mais rien d’autres, hélas » regrette l’édile qui est aussi le président du Syndicat des Monts de la Madeleine. « Hélas », parce que si les maigres trouvailles permettent de dater les lieux entre 300 et 900 de notre ère, la plus grande incertitude plane toujours sur la raison d’être de ces trous qui peuvent atteindre jusqu’à 15 mètres de profondeur.
« Abri ? Culte des morts ? »
Les analyses au carbone 14 sont restées muettes, et plus d’un siècle de recherches n’ont pas permis pour l’heure d’élucider le mystère et les nombreuses interprétations alimentent les débats. « Certains pensent qu’à cette période où les troubles agitaient la Gaule, ces souterrains constituaient des refuges, des abris contre l’ennemi. D’autres avancent l’idée qu’il s’agissait de lieu de culte secret païen à l’heure où le christianisme gagne du terrain. Enfin, l’autre hypothèse est liée au culte des morts. Ces galeries seraient des lieux d’inhumation au service de la réincarnation de l’âme dans le clan, d’après une croyance gauloise ». Reste qu’aujourd’hui beaucoup de ces vestiges renferment à jamais leurs secrets car nombre d’entre eux sont comblés ou l’ont été par des propriétaires agricoles lassés des intrusions sur leurs terres des chasseurs de trésors.
Des visites et bientôt un musée
Néanmoins, à Arfeuilles, il est encore possible de plonger dans cette légende rurale. Car un souterrain est encore accessible à celles et ceux qui ne sont pas trop claustrophobes. Pour s’y rendre, il faut en faire une demande, au préalable, auprès du Syndicat Mixte des Monts de la Madeleine. Un accompagnateur conduit ensuite les visiteurs dans cette boucle sous terre. Ceux qui ont mené l’expérience raconte avoir eu l’impression de pénétrer dans une pyramide d’Egypte, dans un lieu sacré, inviolé depuis des siècles. Le maire d’Arfeuilles se souvient lui « d’une équipe de chercheurs américains qui avaient failli y rester par manque d’oxygène ». Pour éviter une telle frayeur et permettre au plus grand nombre cette plongée dans ce monde enfoui Jacques Terracol, fraîchement réélu, annonce l’ouverture, pendant son nouveau mandat, d’un musée dédié à ces souterrains, sur le modèle « d’un Lascaux II ». Une visite virtuelle, les archives de Maurice Franc et des hypothèses. Chacun pourra ainsi repartir avec sa propre interprétation. En attendant, peut-être, un jour que le voile soit définitivement levé sur ce mystère. Car si les recherches ont cessé en France, elles se poursuivent encore en Europe de l’Est. La Basse-Autriche, la République Tchèque possèdent elles aussi des souterrains annulaires identiques. Mais là non plus, pas plus de conclusions que de certitudes. Du moins, pour l’instant.
Bonus :
- La vallée du Barbenan, une rivière et son chapelet de cascades dont celle de la Pisserote. 115 hc labellisés Espace Naturel Sensible depuis fin 2019
- Les Allées des Creux, appelées aussi Allées des Géants à St-Nicolas-des-Biefs, spectaculaire de défilés de hêtres pluriséculaires.
- Le plateau de la Verrerie et les tourbières, valent le détour. Point culminant, le Roc du Vacher : 1000 mètres d’altitude. Belvédère sur le Mont-Blanc et le Sancy
- Les maires des communes en appellent au respect des lieux. Aux déchets laissés sur place s’ajoutent désormais les masques jetables.
A Cotteuge (Puy-de-Dôme) rencontre avec la « demoiselle coiffée » (Destination 2/5)
Saint-Diéry est connu pour son eau minérale naturelle gazeuse mise en bouteille depuis plus d’un siècle sur les contreforts du Sancy. Mais dans ses forêts, à l’ombre d’une curiosité, on peut aussi y coincer la bulle. Une histoire d’eau que l’on vous raconte ici.
Sans aller en Turquie ni en Chine
Elle est la seule en Auvergne à se dresser parmi les arbres. La seule et unique colonne de terre et de roche à s’étirer de la sorte dans les airs. On l’appelle la « demoiselle coiffée » ou « cheminée de fée ». Une rareté en France même si elles sont quelques-unes à peupler les Hautes-Alpes, la Savoie et le Roussillon. Les plus spectaculaires d’entre elles se trouvent en Cappadocce en Turquie, dans le Parc national de Bryce Canyon aux Etats-Unis ou encore dans le sud de la Chine. Sans aller donc si loin, il suffit de se rendre à Cotteuge, petit hameau de la commune de St-Diéry (Puy-de-Dôme). Au prix d’une courte marche de moins d’un kilomètre, vous tomberez nez à nez sur cette excroissance naturelle dont le sommet est coiffé d’une roche qui a mieux résisté à l’érosion que son support.
Légendes et croyances occultes
A première vue, l’ensemble laisse libre-court à bien des évocations. A vous d’en juger. Ailleurs d’autres formes ont donné naissance à nombre de croyances et légendes. Là, des pouvoirs magiques sont conférés à ces cheminées, quand plus loin, elles seraient les restes pétrifiés d'anciens êtres qui avaient été punis pour avoir mal agi. S’il on devait rester les pieds sur terre, il s’agirait seulement de comprendre qu’il est ici question d’activité volcanique dans un premier temps et d’érosion dans un second. Bref, rien d’ésotérique en soi. L’occasion de prendre un cours de géologie au beau milieu des hêtres qui protègent cet arbre minéral.
Cours de géologie à ciel ouvert
Il faut alors se représenter une éruption volcanique, une masse de lave projetée sur un sol argileux. Pendant des millénaires jusqu’à aujourd’hui, la pluie, le vent, le froid, le ruissellement érode les sols. Sauf ici, où ce bloc de basalte, résistant à l’érosion, protège le socle friable sur lequel il repose. Ce casque de protection lourd, par la pression qu’il exerce, permet par son poids de tasser les roches sédimentaires et de renforcer la résistance de la colonne. Cette bombe volcanique, comme tombé du ciel, se retrouve donc ainsi perchée telle une couronne d’où l’autre nom de cette cheminée de fée, appelée aussi « la demoiselle coiffée ». D’ailleurs lorsque la colonne trop usée ne peut plus porter son chapeau, celui-ci finit par tomber et la demoiselle est dite « décoiffée ». A Cotteuge, on n’en est pas encore là.
Comment y aller ?
Deux solutions pour dénicher cette perle rare.
- La plus radicale : c’est la voiture. La laisser sur la place principale de Cotteuge, traverser le petit pont à l’entrée du hameau. Un chemin prend la direction d’une forêt. 800 mètres plus loin, la « demoiselle coiffée » trône seule au milieu des hêtres.
- La plus sportive : en rando, 9,5 km, 3h30, facile. Sac à dos depuis le parking de l’église de St-Diéry. Direction St-Diéry-Le-Bas, vue sur le château médiéval et la chapelle. Puis, petite route vers La Bataille, traverser la D978, chemin à gauche pour rejoindre Renlaigue et la Couze Pavin.
Bonus :
Saint-Nectaire : Dolmens et menhirs peuplent les environs.
Cascade de Saillant : sur la couze Chambon, haute de 7 mètres, et visible depuis la route
Gorges de Courgoul : pour les amateurs de deux roues, la route serpente le long du chemin emprunté par la Couze de Valbeleix. Entre Saurier et Compains dans le Cézallier.
Entre Fay-sur-Lignon et Chaudeyrolles, là où le Mont Mézenc (1753 m) coiffe ces paysages de prairies et de tourbières (destination 3/5)
C'est un entre-deux qui vaut le détour. Mieux, il mérite un arrêt ! C'est encore là, les monts de Haute-Loire et pas encore ceux de l’Ardèche. Entre Fay-sur-Lignon et Chaudeyrolles, là où le Mont Mézenc (1753 m) coiffe ces paysages de prairies et de tourbières, il se dit que se cachent ici les secrets les mieux gardés d'Auvergne. Des panoramas à perte de vue, des cascades et un gouffre taillé dans la roche volcanique promettent un voyage immédiat et sans passeport pour l'autre bout du monde. Suivez la guide !
A la conquête du Mont Signon, à tâtons
« Quand on a fait le tour du Mézenc, tout est devenu limpide. On s'est dit que c'est là que l'on devait vivre » raconte Claire, la trentaine. Avec son mari Raphaël ils se sont installés à Fay-sur-Lignon, après avoir vécu à Lyon. Leur maison de campagne est très vite devenue leur résidence principale. Depuis trois ans, ils vont ainsi de découvertes en découvertes au gré de leurs randonnées régulières. Claire se souvient de l'une de leurs toutes premières sorties. « L'objectif était de partir à pied de chez nous une carte en main et d'explorer les chemins. Notre carte signalait la présence du Mont Signon (1449 mètres). Heureusement, sinon on serait passés à côté. Car, sur le terrain, il n'y avait aucune signalisation, aucun balisage, aucune indication de ce sommet » s'en étonne-t-elle encore. Au sommet de ce volcan, les vestiges d'une carrière de lauzes chantantes confèrent à ce lieu une dimension lunaire. « De là, la vue est imprenable sur le Mézenc et même sur les Alpes. C'est incroyable, il y a rarement grand monde. Une fois sur deux, on voit une ou deux personnes, mais jamais plus ». La faute à un marquage qui fait encore défaut ? D’après ce que l’on peut lire sur des sites de randonnée, celles et ceux qui ont voulu atteindre le sommet ces dernières semaines y sont encore parvenus après bien des détours. Leurs commentaires au sortir d'une virée sur le Mont Signon ne font l’ombre d’aucun doute. On y lit que « le sommet est un peu ''paumatoire'' car le balisage est un peu déficient » ou encore « il manque sur le retour des marquages qui font hésiter à deux croisements », « nous nous sommes trompés et avons dû faire demi-tour ». Ce que Claire avait constaté trois ans auparavant semble donc se vérifier aujourd’hui encore.
Le gouffre de la Monette, piscine très privée
De même qu'elle avait entendu parler d'un gouffre tenu tellement secret par les locaux que « ni à la mairie, ni à l'office de tourisme il n'existait de documents pour attester de son existence. Il avait fallu que je cherche sur internet et que j'y passe une bonne demi-heure ». Le gouffre en question est le gouffre de la Monette. Vasque d’orgues basaltique dont l’accès confine au jeu de piste. Car il faut arriver au village des Vastres pour trouver un panneau qui indique un circuit de petite randonnée (le circuit du Marais), sur lequel il faudra faire un crochet pour accéder à cette oasis de fraîcheur, ultra confidentielle, quand vient le temps des grandes chaleurs. Là encore, aucune indication ne vous met directement sur la bonne voie, votre instinct sera alors votre meilleur guide pour rejoindre cette piscine naturelle.Pour trouver la cascade, un indice : « truite »
Pour ceux qui ne seraient pas tout à fait découragés, c’est à une dizaine de kilomètres que l’aventure peut se poursuivre. Sur la route qui mène, après l’église, au « chaudron de Chaudeyrolles » (ou narces)*, il faudra trouver un panneau explicatif concernant la…truite du Lignon. Pas facile de déduire que ce panneau est aussi le point de départ d’un chemin vers un petit joyau. De là, il faut longer un pré à vaches et suivre un sentier qui serpente dans les herbes. Il mène à une gorge creusée dans le basalte par le Lignon et à la fameuse cascade du Salin que l’on peut monter ou descendre par paliers. Le site se trouve dans les Narces de Chaudeyrolles, d’anciennes tourbières qui ont prospéré sur un cratère d’explosion éteint depuis 12.000 ans et qui confèrent au lieu un parfum d’Irlande.Bref, avis aux amateurs, la chasse aux trésors est ouverte.
Bonus / infos pratiques :
*Le circuit du Marais : au départ du village des Vastres, boucle de 11 km, facile.
- Les Narces de Chaudeyrolles, 4,5 km, départ entre l’église et la mairie, 1h30 de marche facile, à la découverte d’anciennes tourbières
- Le Mont Signon (1449 m) : départ à Chaudeyrolles, +3 km, 1h 20 de marche.
- Tour du Mézenc : depuis Chaudeyrolles, 21 km, 7h35. Vue sur les Alpes, le Pilat, les monts d’Ardèche, le très beau cirque des Boutières
- Les Roches : à Fay-sur-Lignon, site naturel d’escalade. 49 voies praticables librement.
- Le lac bleu : à Champclause, petit lac formé sur une ancienne carrière de lauzes qui hésite entre le vert émeraude et le bleu turquoise. Accès par le lieu-dit « les Balayes ». 10 min de marche
La Cascade du Salin ou de Chaudeyrolles https://t.co/KQwTJKGut3 pic.twitter.com/WDX1AApac7
— Eauvergnat.fr (@Eauvergnat) June 1, 2016
La forêt d'Algères dans le nord Cantal : lieu unique en son genre (destination 4/5)
Imaginez une forêt encaissée dans une vallée, fendue par une rivière (La Rhue), au pied de falaises abruptes, là où les espèces végétales et animales prospèrent depuis la nuit des temps sans y être inquiétées ni par les mains, ni par les pas de l’Homme. En France métropolitaine, par sa biodiversité qu’elle recèle, la forêt d’Algères dans le nord Cantal, est unique en son genre. Elle est un sanctuaire du vivant. D’après la communauté scientifique, elle apparaît telle qu’elle est née il y a plus de 10.000 ans. C’était au lendemain de la dernière glaciation. Vertigineux non ? Y descendre, c’est donc remonter le temps.
Sans équivalent au monde
Le Parc Naturel Régional des Volcans d’Auvergne le sait. Il détient là un trésor inestimable, parce que rarissime à l’échelle planétaire. Thomas Darnis, responsable environnement à l’Office National des Forêts confirme : « Le Parc en a bien conscience. Il sait que cette forêt abrite des richesses en matière de faune et de flore, sans égales au niveau mondial ». Des cortèges d’insectes et de végétaux depuis longtemps disparus partout ailleurs sur la planète quand ici, tout ce beau monde vit sa vie entre feuillus et résineux, à l’abri des grands désordres écologiques et climatiques de notre époque. 150 propriétaires se partagent ce bout de terre immémoriel où le cycle de la vie n’a jamais été rompu. Parmi eux, Jean-Pierre Juillard, cantalien pur souche, biologiste de formation. « C’est une forêt à part, décrit-il, tellement ancienne qu’il y a des insectes inféodés à certains arbres. Ici, il n’y pas eu de bouleversements majeurs depuis des siècles. Et pour prendre la mesure de cette diversité biologique, deux études ont été menées en deux ans. 300 marqueurs de biodiversité ont été recherchés, les naturalistes en ont trouvé 70. C’est un record national ! ». Thomas Darnis abonde : « Jusque-là, ce record était détenu par la forêt de Fontainebleau avec 68 marqueurs. Et aujourd’hui, la forêt d’Algères le détrône avec le meilleur score de tous les sites forestiers de France métropolitaine. Mieux, si demain, une troisième étude devait être menée, le nombre de ces marqueurs augmenterait alors de 20%. Cela veut donc dire qu’on en découvre tous les jours ! ».Mieux que des Réserves Naturelles et des Parcs Nationaux
Mais alors, ici plus que partout ailleurs, qu’ont-ils bien pu observer tous ces scientifiques ? « Tout un écosystème » répond le forestier, « des mousses exceptionnelles, des lichens (dont une vingtaine d’espèces nouvelles), des champignons, des insectes, des oiseaux, des chauves-souris. Vous vous rendez compte, on a ici 18 espèces différentes de chauves-souris, c’est la moitié des espèces recensées sur le sol français ». Voilà pour ce qui concerne le champ du visible, de l’observation à l’œil nu, car pour tout le reste, c’est à la loupe et au microscope qu’il faut apprécier la profusion, à faire pâlir bien des réserves naturelles et autres parcs nationaux qui ont trouvé là leur maître. La forêt d’Algères s’étire sur 1000 hectares de sapins, de hêtres, de chênes, de tilleuls, de frênes mais dans cette immensité, il faut partir à la recherche de ces « îlots de réserve intégrale » comme les appelle Thomas Darnis. Des bouts de forêts comme autant de joyaux localisés. « On se balade dans des microcosmes, raconte-t-il, dont la conservation exceptionnelle s’explique surtout par le microclimat qui y règne. Les conditions atmosphériques y sont particulières, le climat y est océanique. On retrouve des espèces que l’on connaît en Bretagne ou au Pays Basque par exemple ». La météo mais aussi le relief, très accidenté, explique l’existence de ces fragments de forêt vierge.« Un loup, à 15 mètres »
Pas une seule semaine ne passe sans que Jean-Pierre Juillard ne s’y rende au moins une fois. Il y pratique l’escalade sur des falaises de gneiss et de basalte, hautes de plus de 100 mètres et qui toisent de leur grandeur les eaux de la Rhue. Cette rivière qui prend sa source dans le Sancy pour rejoindre la Dordogne à hauteur de Bort-les-Orgues (Corrèze). Le site, dans sa globalité, est classé Natura 2000. Il a tout d’une forêt enchantée et promet aux marcheurs un voyage onirique, un jeu de pistes, un bond dans le temps que l’on doit faire une carte à la main pour ne pas s’y perdre. Comme pour ce passionné de forêt de montagne, tout un chacun a de quoi satisfaire son goût pour la contemplation. « L’autre jour, j’ai vu une rosalie des Alpes, un coléoptère bleuté de 10 cm sur une grume, j’ai trouvé ça magique ! » raconte-t-il. Un ami m’a dit qu’il y a une semaine, il a vu un loup, à 15 mètres de lui, c’est toujours sympa de voir ça non ? »*. Tout aussi inattendu que le loup, le chat forestier. Algères serait son habitat et Thomas Darnis en possède une preuve, une trace, des griffes. Une photo prise de nuit par un appareil photosensible posé sur un tronc à un endroit où le gros matou avait marqué de son empreinte son territoire. S’il fallait encore le prouver, l’agent de l’ONF considère que « sa présence à elle seule est un bon indicateur de la biodiversité ». Alors pour préserver ce bien précieux immatériel, les propriétaires ont installé quatre barrières métalliques aux entrées de la forêt. Les engins tout terrain (quads, 4/4, motos…) n’y sont donc pas les bienvenus. Seule la promenade à pied y est autorisée. Et pour vous mettre sur la bonne piste, direction la…« Combe Noire ». Carte en main, boussole, ou aucun des deux, en tout cas, frissons garantis.Infos pratiques pour accéder aux gorges de la Rhue (forêt d’Algères) :
A ne pas confondre avec la Forêt Domaniale des Gorges de la Rhue
Trois départs possibles : depuis Journiac, depuis le lac du Mont de Bélier ou depuis Coindre (commune de St-Amadin)
Bonus :
- Découverte du village de Vousseyre : village en alignement avec une chapelle privée
- Découverte du village de St-Etienne de Chomeil, son auberge Les Glycines « Chez Pecoul », son château (13-17ème siècle) et Ronan, son paysan-boulanger.
- Point culminant de la commune : le lac glaciaire du Mont de Bélier (914 mètres d’altitude)
- Le rocher d’Urlande (à St-Etienne de Chomeil) : bloc d’origine volcanique de 15 m de haut, pour les amateurs d’escalade
*Le réseau Loup-Lynx (Office Français de la Biodiversité) estime à 3 individus la population de loups en Auvergne. 2 loups sur les monts du Cantal et 1 loup entre Artense, Monts Dore et Gorges de la Rhue
Autour des gorges de Chouvigny, entre Puy-de-Dôme et Allier (destination 5/5)
Son ancrage à la terre est d’autant plus fort que Fanny est héritière d’une longue lignée de paysans. Son père, son grand-père, et plusieurs générations avant eux ont vécu grâce, avec et pour la terre. Elle prévient : « Je suis chauvine quand il s’agit de parler de ma région. » Sa région, ce sont les Combrailles. L’un des territoires d’Auvergne où la densité de population est la plus faible. A Saint-Quintin-sur-Sioule (Puy-de-Dôme), avec son mari Harold, ils élèvent là leurs trois enfants dans un décor de volcans, de champs, de rivières, de vents, d’intempéries. Et quand vient la nuit, de ciels étoilés qu’aucune lumière ni pollution ne viennent voiler.Loin de la foire d’empoigne
C’est sur les eaux de la Sioule que flottent encore les souvenirs d’adolescent de Fanny. Dans ces eaux poissonneuses qui prennent leur source dans la Chaîne des Monts Dore et qui lèchent leur propriété. 150 kilomètres d’une course tortueuse entre Puy-De-Dôme et Allier dont elle est un affluent. Fanny livre un bien précieux : « Sur la Sioule, les gorges de Chouvigny sont incontournables. Entre le Pont de Menat et le Pont de Saint-Gal, la vallée devient très étroite, des falaises nous dominent et des fleurs sauvages s’y accrochent ». Une haie d’honneur longue de 5 kilomètres pour les canoës, beaucoup moins nombreux à s’y aventurer que dans le Verdon, la Dordogne, le Tarn, le Lot ou l’Ardèche. Ici, donc, point d’embouteillage version rivière, point de guerres des pagaies. C’est aussi là, l’autre bénéfice de ce coin sauvage, à 35 km au nord-ouest de Clermont-Ferrand. Ce n’est pas la foire d’empoigne et c’est heureux.« Ne partez pas comme ça, c’est trop dommage ! »
Harold en est même devenu paysan à son tour. Eleveur de porcs rustiques, salaisonnier, après avoir parcouru les routes et gérer du patrimoine pour le compte d’une mutuelle. Le matin, quand il se lève à 4h, il savoure la promesse de l’aube : « C’est là, pour moi, le meilleur moment de la journée, quand, tout autour, la nature se réveille, il y a tout, les couleurs, les odeurs ». Un instant d’éternité. Les parcelles dominent les gorges de la Sioule et balisent un morceau du GR 463. Harold ajoute : « Les gens viennent quand il fait beau, que le soleil les accompagne, mais ils ne savent pas que même en automne ou en hiver, c’est aussi magnifique quand les éléments s’y mettent ». Fanny, en bonne ambassadrice, ne manque jamais une occasion d’ouvrir les yeux et d’aiguiser la curiosité des visiteurs qu’elle accueille : « Quand des gens viennent à la ferme après avoir fait des dizaines de kilomètres et qu’ils en repartent aussitôt après leurs achats mais je leur dis : ‘‘Mais ne partez pas comme ça, c’est trop dommage !’’ Sans aller dans les gorges, ou sur le GR, il y a un sentier dans un pré qui mène à une source d’eau chaude, la température est constante à 37 degrés toute l’année. Rien que ça, c’est génial ».
Loin des radars des guides touristiques : Saint-Quintin-sur-Sioule. A la croisée des chemins entre Ebreuil, Marcillat, et Saint-Gal-sur-Sioule, ce confetti promet un bain de jouvence. Jusque-là, on était en droit de l’ignorer mais désormais on ne peut plus dire qu’on ne savait pas.
Bonus :
Le GR 463 : passe par Saint-Quintin-sur-Sioule, traverse le sud Allier sur 87 km, d’Est en Ouest entre Ebreuil et la Chabanne
La ferme des cochons heureux : Harold et Fanny vous accueillent pour visite gratuite à la ferme tous les dimanches sans réservation entre 9h et 12h
La source de Charponne : rando au départ de Saint-Quintin-sur-Sioule, boucle de 13 km balisés, 3h de marche facile
Le château de Chouvigny (château-fort du 13ème siècle) : visite ouverte du 11 juillet au 23 août