Mais que faisaient des lycéens et leur professeur sur une piste noire fermée aux skieurs? L'enquête sur l'avalanche mortelle de mercredi 13 janvier aux Deux Alpes devra clarifier ce qui apparaît comme une tragique imprudence.
A 15H41 mercredi, un groupe de lycéens est emporté par une avalanche déclenchée vers 2.800 mètres d'altitude sur la piste noire de Bellecombes. Trois victimes meurent ensevelies: deux élèves d'une classe de première option sport à Lyon et un skieur ukrainien de 57 ans.
Le professeur qui encadrait le groupe de dix lycéens est grièvement blessé et hospitalisé à Grenoble.
Les recherches, à l'aide de sondes, se sont poursuivies jusqu'au milieu de la nuit pour s'assurer qu'il n'y avait pas d'autres victimes dans l'avalanche dont l'épaisseur atteignait 7 à 8 mètres à son extrémité, vers 2.350 mètres d'altitude.
Une enquête sous l'autorité du parquet
Après les secours, "priorité à l'enquête", a souligné jeudi le procureur de la République à Grenoble, Jean-Yves Coquillat.Celle-ci, confiée à la gendarmerie, s'attachera "à déterminer les conditions dans lesquelles les choses se sont passées", a souligné le magistrat.
La responsabilité du professeur en question
"Il faut qu'on fasse entendre dès qu'on le pourra le professeur hospitalisé. La question est: pourquoi est-ce qu'ils skiaient sur une piste fermée?", a pointé le procureur. Le groupe de lycéens était en effet censé évoluer sur les pistes qui sont sécurisées par des tirs préventifs d'avalanches en cas de chutes de neige importantes comme ces derniers jours.Le groupe ayant emprunté une piste fermée, "ils se sont retrouvés de fait en hors piste", souligne Dominique Létang, directeur de l'Agence nationale pour l'étude de la neige et des avalanches (Anena). Et "on ne peut pas imaginer qu'ils soient allés faire du hors piste sans le matériel adéquat", à savoir une sonde, une pelle et un détecteur de victimes d'avalanches (DVA), ajoute-t-il.
Or, les lycéens n'étaient a priori pas équipés de DVA, selon le parquet. "Il y a des risques inconsidérés qui ont été pris", estime Stéphane Sauvebois, maire de Mont-de-Lans, commune sur laquelle se situe la station.
La piste était-elle bien fermée?
"Si la piste était fermée, comment était matérialisée cette fermeture ?", interroge aussi le parquet. "Il n'y a aucun doute là-dessus. Les filets étaient en place", assure Didier Bobillier, directeur de Deux-Alpes Loisirs, la société des remontées mécaniques. Pour le préfet de l'Isère, Jean-Paul Bonnetain, "les choses paraissent claires et le groupe n'a sûrement pas emprunté la piste par mégarde". "A ce stade des constations, les éléments de signalétique étaient installés". "Personne ne pourra soutenir qu'il ignorait être sur une piste fermée", ajoute M. Bonnetain.La piste de Bellecombes était fermée depuis le début de la saison, faute de neige. "Il y avait très peu de neige, plein de cailloux. C'était pas très bon à skier", souligne Dominique Létang. D'autres skieurs avaient vraisemblablement emprunté cette piste dans la journée, pour profiter des récentes chutes de neige. "La transgression est courante chez les skieurs d'un bon niveau", regrette le préfet.
Gregory Lespinasse, en direct du sommet de la piste noire de Bellecombes
Quel était le risque d'avalanche ?
C'était un risque "marqué", de niveau trois sur une échelle qui en compte cinq. A ce niveau, des avalanches peuvent se déclencher au passage d'un seul skieur. "Dans 90% des cas, c'est l'action d'un être humain qui déclenche l'avalanche", note M. Létang. Le risque 4 (fort) est le niveau de risque maximum pour les skieurs car au niveau cinq "les stations sont fermées, on ne peut pas bouger", souligne-t-il.Ce jeudi 14 janvier, de nombreux massifs alpins étaient justement placés en risque 4. "Il ne faut pas skier hors piste. Il faut s'en tenir aux pistes ouvertes", insiste M. Bonnetain.