Il s'appelait Renaud, il avait 17 ans, et il a été emporté par une avalanche de blocs, mercredi 28 janvier, alors qu'il participait à une sortie en ski dans le Vercors. Au lendemain du drame, le parquet de Grenoble va ouvrir une information judiciaire pour homicide involontaire.
Alors que l'avalanche a emporté trois personnes, -un guide et deux lycéens-, seul Renaud n'a pu être sorti de la coulée. Le lycéen de 17 ans ne portait pas de Détecteur de Victimes d'Avalanches (DVA), ou d'ARVA, et les secours ont mis près de deux heures pour le retrouver. Il était sous 1,5m de neige. Au lendemain du drame, le procureur de la République de Grenoble, Jean-Yves Coquillat a tenu une conférence de presse au cours de laquelle il a fait part des premiers éléments de l'enquête. "Renaud ne portait jamais d'ARVA, il n'aimait pas ça", a-t-il expliqué, "il pensait que c'était inutile et trouvait même que les ondes pouvaient être nocives. Ses encadrants l'ignoraient." Preuve de leur ignorance, ils ont lancé une recherche ARVA.
En revanche, les camarades de l'adolescent connaissaient, eux, l'aversion de leur copain pour ce matériel. C'est sûrement pourquoi celui qui était chargé de faire les vérifications l'a couvert. C'est à l'arrivée d'un médecin-secouriste que la vérité a éclaté.
Reportage Jordan Guéant et Dominique Semet
Le parquet envisage aujourd'hui l'ouverture d'une enquête poussée pour homicide involontaire.
Trois questions sont posées:
- y-a-t-il eu une prise de risque inconsidérée?
- comment s'est produit l'avalanche?
- comment et pourquoi l'adolescent est-il mort?
Sur ce dernier point, une autopsie doit être pratiquée vendredi. Elle devra déterminer si Renaud est mort des suites des blessures provoquées par la puissance de l'avalanche ou s'il est mort "noyé" dans la neige ou victime d'une hypothermie. Dans ce dernier cas, l'absence de DVA ou d'ARVA pourrait entrer le ligne de compte pour expliquer son décès et les éventuelles responsabilités.
Sur la randonnée en elle-même, le parquet estime que "toutes les précautions ont été prises" par le guide chargé de ces jeunes du lycée du Diois, "notamment en terme de distance de sécurité entre les membres qui participaient à cette randonnée." L'itinéraire choisi n'était peut-être pas judicieux mais l'encadrement en a tenu compte. "Si toutes les précautions n'avaient pas été prises, il y aurait eu beaucoup plus de victimes", a déclaré Jean-Yves Coquillat, "il y a eu une vraie réflexion du guide et de l'aspirant pour limiter les risques."
"Pour l'instant, l'accident est une succession d'événements non significatifs", a conclu le procureur, autrement dit, une succession de petits événements sont à l'origine du drame.
Ces futurs adultes apprennent l'autonomie"
Après avoir passé la nuit dans le Vercors, les élèves qui ont assisté à ce drame, et qui ont perdu un camarade, sont rentrés à Die où une cellule psychologique a été montée pour les prendre en charge. Ils appartiennent tous à la section "sport nature" du lycée du Diois. Sur le site internet de l'établissement, on apprend qu'il s'agit là "d'une forme d'éducation innovante pour des lycéens de 15 à 18 ans, un projet axé sur le déplacement des jeunes dans une nature préservée."
Cela fait une trentaine d'années que la section a vu le jour. "C'est une section où les encadrants sont particulièrement au fait des problèmes de sécurité", explique Bruno Pelicier du Syndicat National des Guides. "Ils ont mis en place des principes pédagogiques qui font que ces futurs adultes apprennent l'autonomie, apprennent à comprendre que la montagne se pratique mais qu'il faut pour ça être responsable, d'où le fait de les engager dans la préparation des courses", ajoute-t-il. D'où le fait qu'un lycéen ait été chargé de vérifier l'équipement de ses camarades. Le procureur a d'ailleurs signifié que le guide-professeur n'a pas d'obligation légale de vérifier les équipements, il avait à faire à un public averti.