Les déserts médicaux, on en parle régulièrement dans l’actualité. La question concerne souvent les petites communes rurales ou certains quartiers urbains difficiles. A Brioude, 6600 habitants, le problème se pose aussi.
Lorsque Noël Fournier-Montjieux a ouvert son cabinet, il y a 34 ans, il était le 14ème médecin de la ville. Dans deux ans, il prendra sa retraite et ils ne sont plus que 9 généralistes. Alors les journées de travail s’allongent pour lui, fréquemment 10 voire 12 heures de consultations, visites à domicile et tâches administratives chaque jour.
La fatigue du médecin
« Les journées sont longues et fatigantes parce que nous avons une population vieillissante avec des pathologies lourdes et complexes qui prennent beaucoup de temps et donc les fins de journées sont un peu harassantes », explique le généraliste.
Membre du Conseil de l’Ordre des médecins, il s’efforce pourtant d’accueillir tous les patients qui se présentent à lui. « Parce que je suis conscient de la difficulté de trouver un médecin et que je ne peux pas refuser à une personne en situation difficile de la prendre en charge », dit-il simplement.
A Brioude, sous-préfecture de Haute-Loire, la situation a empiré l’an dernier avec un départ de médecin à la retraite et un autre qui a dû arrêter d’exercer suite à une grave maladie.
Pour le Docteur Fournier-Montjieux, ce n’est pas le manque d’attractivité de la petite ville qui est en cause, c’est un problème plus global : « Il y a un vieillissement du corps médical en France, ça n’a pas été anticipé en terme de numerus clausus, il aurait fallu former davantage de médecins, en sachant que les décisions d’aujourd’hui ne produiront des effets que dans 8 ou 10 ans ».
Séduire les internes en stage
Cette situation, Jean-Jacques Faucher, le maire divers-droite de Brioude, en est bien conscient. Voilà plus d’un an, qu’il recherche des solutions avec la communauté de communes du Pays Lafayette. Des locaux déjà. Un bureau peut-être très rapidement proposé à un nouveau médecin dans l’actuel immeuble interconsulaire, bien situé en rez-de-chaussée. Il y a également, à moyen terme, un projet immobilier incluant un cabinet médical au sud de Brioude.
Encore faut-il trouver les « candidats ». Et là, le maire a sa petite idée : « On a la chance d’avoir un centre hospitalier qui accueille de nouveaux internes tous les 6 mois, nous avons aussi un cabinet médical accueillant des stagiaires, donc nous essayons de motiver ces futurs médecins pour qu’ils viennent s’installer ici. L’expérience montre que très souvent les médecins qui s’installent ont déjà une attache sur le territoire ».
Mais jusqu’ici, la méthode n’a rien donné. D’où la réunion en présence des acteurs locaux mais aussi de l’Agence Régionale de Santé ce mardi 31 janvier 2017 pour essayer de passer à la vitesse supérieure.
« Il va falloir faire plus de communication pour rechercher rapidement deux médecins, il faut aussi que nous nous penchions sur le problème de leur logement, voire également faciliter la situation de leurs conjoints ou conjointes », reconnait M. Faucher.
« Ca devient inquiétant »
Dans la salle d’attente du Dr Fournier-Montjieux, ça ne désemplit pas. C’est son quotidien, notamment en période d’épidémie de grippe et de gastro comme actuellement. Une patiente, d’origine libanaise, arrivée à Brioude il y a deux ans, dit qu’elle s’est heurtée à un refus de prise en charge par un autre généraliste. Elle rajoute : « Il y a beaucoup de problèmes ici, de médecins, de rendez-vous, de laboratoire, de scanner, d’IRM, ce n’est pas facile ».
Sa voisine va dans le même sens : « A l’hôpital aussi, on manque de spécialistes, ils viennent d’ailleurs. Il faut un mois et demi pour passer une fibroscopie, trois mois pour une coloscopie, pour consulter un pneumologue il faut aller sur Issoire et il faut 6 mois pour un rendez-vous ! ». Elle conclut, elle aussi : « ça devient inquiétant ».
Rappelons que l’hôpital de Brioude ne dispose toujours pas de scanner, alors que les médecins et les patients réunis dans un comité de vigilance le réclament depuis des années…