Les mesures de confinement et les règles de déplacement ont débuté ce midi en France. De son côté, la Suisse a décidé de filtrer aux postes de douane. Une galère pour les travailleurs transfrontaliers français.
Quatre heures de plus que d’ordinaire pour se rendre au travail, une arrivée au bureau à 11 heures ce matin... Olivier a cru craquer. C’est qu’au péage de Bardonnex, les douaniers ont dû examiner les autorisations de déplacement de chaque personne désireuse de se rendre dans l’un ou l’autre pays.
« Ce sera peut-être terminé demain, si la Suisse décide aussi du confinement total » se demande-t-il. Olivier travaille dans l’horlogerie à Plan-les-Ouates, habite à Pringy en Haute-Savoie.
Il fait partie de ces travailleurs transfrontaliers qui chaque jour traversent la frontière franco-suisse. Leur quotidien est lui-aussi bouleversé par l’épidémie de coronavirus. Et plus encore depuis ce 17 mars…
Car depuis 8 heures, des mesures filtrantes ont été mises en place par la Confédération dans les postes de douane. La police genevoise a été appelée en renfort du CGFR, le Corps des Garde-Frontières, pour procéder aux vérifications des permis de travail et des attestations d’employeur.
C’est ce qui explique les embouteillages monstres ce matin au péage de Bardonnex. L’autre raison, plusieurs douanes ont été fermées, ce qui a reporté les flux sur les postes restés ouverts.
Nadège n’a « jamais vu ça en 20 ans »
« Je travaille en Suisse depuis 20 ans, je n’avais jamais vu ça » témoigne Nadège. Agée de 61 ans, elle travaille dans le domaine médical.
Ce matin elle n’a mis « que » 2h30 au lieu d’1 heure pour se rendre à Genève depuis Menthon-Saint-Bernard, à côté d’Annecy. Une chance, elle connaît les petites routes par cœur.
« Depuis le Salève j’ai pu voir les embouteillages dans tout le bassin genevois. »
« Il y avait beaucoup de monde, pas que des transfrontaliers. Des camions du BTP, mais aussi des gens âgés ». Peut-être des personnes qui rejoignaient leur famille avant le confinement total de midi.
Mais tout le monde était calme, pas d’animosité ou de panique remarque-t-elle.
D’habitude Nadège passe par la petite douane de Pierregrand. Mais ce matin elle était fermée. Il a donc fallu se rendre à La Croix-de-Rozon. Un poste situé sur la commune de Bardonnex, plus fréquenté.
« Je n’ai pas eu de soucis », explique-t-elle, « lorsque les douaniers ont vu que j’étais du corps médical, je suis passée sans problème. Mais j’ai eu le temps de voir qu’ils regardaient tous les permis de travail, les cartes d’identité et les attestations ».
Dès la veille son employeur lui avait envoyé une attestation.
Prévoyante, Nadège est partie avec un sac de voyage. Elle est prête s’il le faut à dormir à Genève chez des proches. Seul souci, son chien et ses chats. Elle a prévenu ses voisins en cas d’absence prolongée.
Pour le personnel soignant travaillant en soins intensifs, l’hôpital suisse pourrait débloquer des chambres d’hôtel afin d’éviter les déplacements. Mais elle n’est pas concernée.
Nadège se préparait à cette situation inhabituelle depuis plusieurs jours.
« Dans le domaine médical on est hyper informés et sensibilisés » ajoute-t-elle. Cela fait des semaines qu’elle entend parler des mesures de précaution et qu’elle tente de convaincre sa famille.
« J’ai eu un petit-fils début mars. Il a été confiné à la maternité d’Annemasse à cause du coronavirus. J’en avais envie mais je ne l’ai pas embrassé. Je n’ai pas arrêté de dire à mes enfants de faire attention aux visites, aux contacts. »
Mais les Français ont du mal à prendre conscience de la situation selon elle. « Dimanche j’ai été interpellée de voir le monde au bord du lac d’Annecy. Comme si les gens n’avaient pas compris ou ne voulaient pas entendre… »
Le vélo, plus pratique ?
Stéphanie elle n’a eu aucun problème pour aller travailler ce matin. Cette autre transfrontalière française circule à vélo. Une solution adoptée par de plus en plus de Français pour se rendre en Suisse chaque jour.
« Je passe par les petites routes de campagne, celles qu’empruntent les piétons et les promeneurs » explique-t-elle.
D’ordinaire il lui fait une demi heure pour relier son domicile, Ville-La-Grand, à son travail à Genève.
Pour elle ce serait « un vrai problème » de devoir prendre la voiture pour aller travailler. Ces retards, ces bouchons, « cela oblige à partir plus tôt et cela entraîne de la fatigue en plus ».
Mais Stéphanie ne sait pas si le vélo est encore autorisé vu les circonstances et la fermeture des frontières dans l’espace Schengen.