Le groupe Indexia et son dirigeant, Sadri Fegaier, sont au centre d'un procès à Paris qui démarre ce lundi 23 septembre. Un procès attendu pour des pratiques commerciales jugées trompeuses par les victimes présumées.
C'était une success story à la française. Le personnage principal : un chef d'entreprise audacieux et en quête d'implantation locale, d'abord sur ses terres d'origine, dans la Drôme, à Romans-sur Isère, puis à Roanne dans la Loire. La Société Française d'Assurance Multimédia devient alors un des employeurs les plus recherchés par les salariés, notamment grâce aux rémunérations intéressantes qu'il propose. Mais en cinq ans, l'entreprise, visée par des milliers de plaintes de clients, est placée en liquidation judiciaire.
Que reproche-t-on au groupe Indexia?
Le tribunal judiciaire de Paris devra statuer sur des accusations de pratiques commerciales trompeuses concernant les résiliations et remboursements liés à des contrats d’assurance pour téléphones et produits multimédias. Les sociétés impliquées incluent SFK Group, SFAM Celside Insurance, Foriou, Cyrana, Hubside et Serena. L’enquête, portant sur des infractions présumées ayant eu lieu entre 2014 et 2022, accuse le groupe d’avoir délibérément complexifié les démarches des clients cherchant à résilier leurs contrats, décourageant ainsi leurs efforts.
Des contrats d'assurance à l'origine des accusations
Indexia, connu pour ses assurances proposées dans des enseignes comme Fnac-Darty, est accusé d’avoir piégé des centaines de consommateurs. À l’achat de produits électroniques, une assurance, au coût initial modeste d'environ 15 euros par mois, était souvent ajoutée à la transaction. Cependant, de nombreux clients se sont retrouvés face à des prélèvements croissants, allant jusqu’à des milliers d’euros, sans toujours avoir pleinement compris ou accepté les termes des contrats d'assurance signés.
Une explosion des réclamations
Devant l'ampleur des plaintes, plusieurs consommateurs ont contacté l’association UFC-Que Choisir, poussant la Répression des fraudes à ouvrir une enquête en 2018. Celle-ci a mis en lumière des pratiques trompeuses : les clients pensaient que leurs demandes de résiliation avaient été traitées, alors que les prélèvements continuaient. En 2019, une transaction pénale de 10 millions d’euros avait pourtant été conclue. Cependant, les plaintes ont persisté, avec de nouveaux consommateurs dénonçant des tentatives de résiliation jamais appliquées.
Des témoignages poignants de victimes
De nombreuses victimes ont partagé leurs expériences, souvent dévastatrices. Martine, a assuré son ordinateur pour 5 euros par mois. Petit à petit, les prélèvements se multiplient sous différentes appellations.
"Je me suis rendu compte prélèvement avec des noms différents, je ne savais pas du tout d'où ça venait. J'ai recherché l'identifiant du créancier et je me suis rendu compte que c'était la Sfam, devenue Indexia". Martine a perdu 3000 euros et après des mois de réclamations, l'entreprise lui a proposé 725 euros qu'elle a refusés.
En février 2023, plusieurs dizaines de clients étaient venus en personne au siège de Romans-sur-Isère pour se faire rembourser. "Ils me doivent 17 000 euros ! J'ai tout essayé, j'ai écrit, appelé les associations de consommateurs, j'ai porté plainte, mais on se retrouve toujours face à un mur". Un autre, bien décidé à se faire dédommager du préjudice subi, raconte : " je me suis fait prélever 175 fois, 175 fois, vous vous rendez compte ? L'addition de tout ça correspond à 4600 euros, qu'ils me doivent!"
Des salariés dans le piège du système
En juin dernier, France 3 Rhône-Alpes a recueilli anonymement le témoignage de plusieurs anciens salariés qui ont accepté d'expliquer les méthodes du groupe. "On avait des formations pour refourguer une offre. On avait un script, il fallait demander aux clients d'écrire un mail, mais on savait qu'il n'était pas traité".
Une autre se souvient des réclamations à l'autre bout du fil : "des quadruples prélèvements, des personnes en détresse, on essaie de comprendre et le patron nous dit qu'il ne se passe rien... On se dit qu'il nous a menti". Entre regrets et culpabilité, certains reconnaissent qu'ils avaient des conditions exceptionnelles pour le bassin d'activité où ils se trouvaient.
"Je me faisais entre 2000 et 3000 euros de prime net certains mois, en plus de mon salaire de 3000 euros, vous imaginez ? C'est ça qui amène à fermer les yeux sur certaines pratiques. On nous a tenu avec l'argent et les avantages".
C'est pas moi qui appuyait sur le bouton pour prélever tous ces gens, mais ma culpabilité est encore forte. On appliquait les ordres, mais on aurait dû se réveiller plus tôt, je m'en rends compte maintenant, je m'excuse.
Une salarié d'Indexia
La chute d'Indexia et ses conséquences judiciaires
En mai dernier, la holding Indexia et plusieurs de ses entités ont été placées en liquidation judiciaire, faisant suite à la faillite de la SFAM, la société mère du groupe. Malgré cette liquidation, les actions en justice se poursuivent tant sur le plan pénal que civil. De nombreux clients ont également intenté des actions civiles pour tenter de récupérer les sommes indûment prélevées, et ce procès pourrait marquer un tournant dans cette bataille judiciaire complexe.