Le château de Grignan dans la Drôme, rendu célèbre grâce à la correspondance entre Madame de Sévigné et sa fille, est méconnaissable. Des échafaudages recouvrent sa façade depuis quelques semaines déjà. La raison ? La réfection de la toiture, quasiment centenaire et plus étanche.
Dans une lettre adressée à sa fille et datée du premier octobre 1684, Madame de Sévigné s'inquiète des multiples travaux en cours au château. "Que je vous plains, ma fille, d'avoir à rebâtir votre château ! Quelle dépense hors de saison".
Un accès compliqué
On s'imagine aisément l'inquiétude de la célèbre épistolière française lorsque l'on s'aventure sur ce nouveau chantier. L'accès au château, perché en haut du village de Grignan, n'est pas facile, même en 2023. "La particularité de ce chantier, c'est d'abord l'accès. On est en haut d'un piton rocheux. On a des accès très compliqués", explique Fabien Lanvin, conducteur de travaux principal dans la société Bourgeois. "Vous avez pu le voir en venant à pied." Effectivement, nous avons dû nous faufiler tout en haut de l'échafaudage en empruntant un long escalier tortueux.
Pour acheminer le matériel, l'échafaudage a même été agrémenté d'un ascenseur. La marquise de Sévigné aurait sans nul doute apprécié le progrès. "On a eu plus de 100 palettes de tuiles neuves à acheminer dans les rues de Grignan. Donc c'est pour cela que l'on a installé un ascenseur de chantier pour éviter de déambuler dans les différentes pièces du château, et d'éviter d'abîmer l'environnement", précise Fabien Lanvin.
Une toiture centenaire
Au début du XXè siècle, Marie Fontaine, une riche veuve, a totalement reconstruit le château, malmené par les siècles. "Elle achète un château presque intégralement en ruine", détaille Noémie Gruère, responsable des publics du château. "Elle va vraiment entièrement le reconstruire. C'était un chantier titanesque qui a eu lieu pendant la Première Guerre mondiale, dans un contexte particulier."
Les travaux s'achèvent dans les années 20, et la toiture n'avait pratiquement pas été touchée depuis. Quelques problèmes de fuite ont été signalés, mais rien de bien grave. "On n'a pas eu de surprise notable constate Philippe Donjerkovic, l'architecte. L'idée, c'était surtout d'éviter les problèmes de fuite, problèmes que l'on a pu rencontrer jusqu'à présent. Par des petites malfaçons."
Une pose traditionnelle
Certaines tuiles, en bon état, ont été récupérées. Les autres ont été refaites à l'identique. "Ici, on est sur de la pose traditionnelle scellée", détaille Fabien Lanvin. Une tuile de courant canal, une tuile de couvert. Au milieu, on vient bâtir au mortier pour les fixer au support charpente."
Un autre élément, pas présent sur la toiture initiale, a été ajouté. Le roseau, issue d'une vieille technique provençale. Il est venu alléger le mortier et bien imbriquer les tuiles.
Des travaux, intégrés au parcours des visiteurs
Si vous avez le vertige, rassurez-vous, vous ne pourrez pas accéder aux travaux sur le toit. En revanche, le château reste ouvert aux visiteurs et les intègre même dans un parcours intitulé "un château enchanté, en chantier." "Ce chantier fait vraiment partie des 1000 ans d'histoire de Grignan, s'enthousiasme Noémie. Il y a eu plusieurs grands bâtisseurs, de la renaissance jusqu'au XXème siècle. Aujourd'hui, ce chantier, il est porté par le Département de la Drôme. Il est vraiment colossal et c'était vraiment notre souhait que le public comprenne de quoi il est question, pourquoi on restaure ce château."
La nouvelle toiture a coûté environ 880 000 euros au Département et les travaux devraient s'achever en février 2024.