Le train du Picodon a circulé de 1893 à 1936 entre Dieulefit et Montélimar. Il a complètement désenclavé Dieulefit dans la Drôme en permettant aux habitants et aux industriels de rejoindre la vallée du Rhône.
La première ligne de chemin de fer secondaire de la Drôme a vu le jour le 16 juillet 1893 dans le cadre du Plan Freycinet. Elle sera la dernière ligne fermée après 43 ans de service. Surnommée le train du Picodon en référence à l'odeur que laissait ce fromage de la Drôme transporté dans les wagons, elle relit Montélimar à Dieulefit.
28 kilomètres - pour une dizaine de villages de campagne desservis - construits en 1 an environ. Cette rapidité s'explique par le fait que la voie était métrique (un mètre de large) donc construite sur la route existante pour des questions d'économie.
Une révolution pour les habitants et les industriels
C'est la révolution pour les habitants et pourtant question confort, c'est assez spartiate, les bancs sont en bois. Point de petit cousin pour le séant des voyageurs. "À l'époque, il y a des gens à Dieulefit qui n'ont jamais quitté leur bourgade. Ça a permis aux industriels comme les poteries, les Tissus Morin... de pouvoir emporter leurs marchandises à Montélimar pour les distribuer dans la vallée du Rhône, voire au-delà et en retour la train permettait d'avoir des engrais et du charbon acheminé jusqu'à présent en attelage de chevaux" rappelle Michel Coulon, président de l'association du petit train du Picodon. Le train a permis de gagner en tonnage et en temps même si le train mettait plus d'une heure et demie pour parcourir les 28 km entre Dieulefit et Montélimar.
Des anecdotes
La gare de Dieulefit n'accueille plus de locomotive aujourd'hui, et fait office de musée. Le petit train du Picodon a disparu en 1936 sans laisser beaucoup de traces en raison de l'augmentation du trafic routier et faute de rentabilité.
Louis à cent ans. Le train, il le prenait régulièrement pour aller à Montélimar et des anecdotes, il en a encore plein la tête. Comme les arrêts intempestifs du train à l'heure de l'apéritif.
"Tchou tchou ! le train envoyait le signal pour avertir de son arrivée. Les gens se pressaient pour boire l'apéritif" explique-t-il. Le train s'arrêtait. "Les retards, ça ne comptait pas !", précise-t-il. "Il repartait après !"
Autre souvenir : la galère du train lorsqu'il neigeait. "Avant d'arriver à la gendarmerie, à la Bégude, ça montait plus. Arrivé là, il patinait, il n'avançait plus. Alors, on descendait pour le pousser !" conclut-il avec un grand sourire.
Émile Loubet, président de la république (1899), originaire de Marsanne, l'a beaucoup emprunté pour ses voyages personnels, mais aussi lors de visite officielle dans le département.
L'orgue du temple de Dieulefit a, lui aussi, voyagé dans le train, seul moyen de transport possible. Il a fait le trajet en mode décapotable, car il a fallu démonter le toit du wagon pour le glisser à l'intérieur.
Un wagon vestige
Pour éviter l'oubli, des passionnés ont retapé un wagon de marchandise qui allait finir à la casse. "Il a fallu complètement enlever les boiseries et les parties de ferrailles qui étaient pourries. Sabler pour enlever la rouille. Le repeindre avec de l'antirouille, remettre les parties métalliques et le rhabiller en planches, en zinc pour la toiture" détaille Bernard Moulin, trésorier de l'association "Le petit train du picodon". 1700 heures de travail au total !
Un wagon restauré comme il était à la fin du XIXe siècle et, tradition oblige, est célébré à l'heure de l'apéritif avec un morceau de Picodon.
Même s'il ne circule plus, le souvenir du train du Picodon reste encore bien présent chez les anciens. Tous se souviennent du bouleversement qu'il a provoqué dans leur vie en les reliant au reste du territoire.