La chaîne d'informations Euronews inaugurera son nouveau siège le 15 octobre, un spectaculaire cube vert fluo planté dans un quartier branché de Lyon, attestant du chemin parcouru en vingt ans par une entreprise restée longtemps discrète mais qui ne cache plus ses ambitions.
"Lorsque le responsable commercial d'un groupe international venait me voir" dans l'ancien siège de la banlieue lyonnaise, "après avoir visité les quartiers généraux de CNN à Atlanta et de la BBC à Londres, je savais, rien qu'à voir sa tête sur le parking, que j'avais perdu le budget", relève le président du directoire Michael Peters.
Aucun risque de cette nature avec le bâtiment d'avant-garde conçu par le cabinet Jakob + MacFarlane ! Un cube de six étages, revêtu d'une résille métallique verte et dont la façade côté Saône est évidée par deux grands vortex qui aspirent la lumière jusqu'au coeur de l'édifice. "Une oeuvre d'art...", commente M. Peters. Avant d'ajouter: "... dans laquelle il a fallu faire entrer une usine". Une usine à informer en 13 langues qui emploie 800 salariés.
Partout de la lumière. Une esthétique dépouillée, très "high tech", déclinée en noir, blanc et vert. Partout des salles de réunion et des coins repos à la déco "roots" contrastant avec le minimalisme ambiant. Quelques moquettes restent à poser et des moniteurs à fixer aux murs, mais nulle frénésie n'est perceptible à quelques jours du basculement. Euronews travaille,il est vrai, à ce grand soir depuis 2006.
Le bâtiment n'était pas initialement prévu pour accueillir une télévision: d'où d'importants retards et une facture qui, au total, dépassera les 50 millions d'euros, avec les coûts d'aménagement et de déménagement. Mais les difficultés appartiennent au passé et l'inauguration officielle est prévue le 15 octobre. D'ores et déjà, les deux-tiers des personnels concernés sont arrivés. Seuls restent encore dans l'ancien siège d'Ecully les journalistes chargés de l'information "chaude", reliés à leurs collègues de Lyon par une double liaison en fibre optique.
Une naissance modeste
"C'est le bon moment pour nous, car nous avons de grandes ambitions", sourit le directeur de la rédaction Lucian Sârb. Fruit d'une alliance d'une vingtaine de télévisions européennes, soucieuses d'apporter un autre regard sur l'actualité internationale, Euronews avait été lancé modestement, au milieu du scepticisme ambiant, en janvier 1993.
Pour son siège, ses promoteurs avaient voulu une grande ville européenne mais pas une capitale, afin d'instaurer une certaine distance avec le monde politique. Lyon l'avait emporté face à Munich et Valence. Depuis, discrètement, la petite concurrente de CNN et de la BBC est passée de cinq langues de diffusion à treize aujourd'hui. "Nous sommes probablement le seul groupe de médias qui a su se développer dans autant de langues", fait remarquer M. Sârb.
L'émergence de la chaîne lyonnaise a convaincu le milliardaire d'origine égyptienne Naguib Sawiris d'y injecter 35 millions d'euros, lui donnant les moyens de ses ambitions. "Si M. Peters réussit à mener à bien le plan stratégique qu'il m'a présenté, la valeur d'Euronews sera beaucoup plus grande... Je crois en ce business plan qui va amener Euronews vers une nouvelle magnitude", soulignait M. Sawiris en février, lors de l'annonce de son investissement.
Une floraison de projets
Dans ses nouveaux locaux, la chaîne disposera de plus de 10.000 mètres carrés, contre 4.000 jusqu'alors. L'occasion de repenser complètement l'organisation de la rédaction, "de faire tomber tous les murs entre la télévision traditionnelle et le monde numérique", relève M. Sârb. Et aussi d'enrichir ses contenus pour faire taire, une bonne fois pour toutes, ceux qui réduisent Euronews à "une radio avec de l'image".
Nouvel actionnaire, nouvelle gouvernance, nouveau siège. Mais aussi lancement prochain d'une chaîne soeur bilingue (anglais/français) consacrée à l'actualité africaine. Et enfin une nouvelle identité visuelle et un nouveau site web. "Tout cela semble se bousculer. Ce n'est pas une coïncidence mais le résultat d'années de réflexion et de travail", relève M. Peters.
Euronews s'installe dans le nouveau quartier de Confluence dont la municipalité aimerait faire un pôle médias. Elle y a déjà en partie réussi en y attirant le quotidien régional Le Progrès, les radios régionales Espace et RCF, les antennes locales de RTL et M6, ainsi que le groupe spécialisé dans l'événementiel GL Events.