En novembre, la Cour d'appel de Chambéry condamnait la société polonaise Manualis à une amende importante pour "complicité de travail illégal". A l'heure des élections européennes, la société décide d'une riposte. Son avocat annonce la création d'un syndicat européen des prestataires de service.
Le 7 novembre 2013, la Cour d'Appel de Chambéry faisait parler d'elle avec un arrêt par lequel le monde du bâtiment semblait découvrir qu'un promoteur immobilier est responsable pénalement s'il travaille avec des sociétés qui pratiquent le travail dissimulé.
L'affaire avait démarré sur un chantier de Pringy, en Haute-Savoie. Pour la justice, ces travaux avaient été confiés par le maître d'ouvrage à une société turque qui aurait elle-même sous-traité à une société polonaise Manualis. Cette dernière étant soupçonné de sous-payer ses salariés en les faisant travailler dans des conditions d'hygiène et de sécurité non conformes.
L'affaire doit être rejugée le 3 juin prochain par le tribunal correctionnel d'Annecy, mais lors d'une conférence de presse qui a eu lieu à Paris, ce mardi 20 mai, l'avocat de Manualis a riposté.
Me François Nicolas Wojcikiewicz explique: "Déjà, la société prétendument turque n'était en fait qu'une société locale dirigée par un Français d'origine turque… un amalgame malheureux. Quant à la société polonaise Manualis, qui a à sa tête un ingénieur du bâtiment, elle intervient tant en Pologne qu'en France par exemple dans le cadre de marchés publics (gendarmerie, lycées)."
Et l'avocat poursuit en pointant du doigt l'enquête, expliquant que les procès-verbaux d'audition sont douteux. Selon lui, on ne sait pas qui a auditionné; les ouvriers n'ont pas eu lecture de leurs droits; les PV n'ont pas été signés; des erreurs de traduction se sont glissées dans les questions écrites sur un formulaire...
Des conditions bien éloignées de ce qui a été qualifié d’esclavagisme"
Et il poursuit: "contrairement à ce qui a été jugé à Chambéry, aucun prêt illicite de main d'oeuvre ne pouvait être reproché, dans la mesure où la société polonaise réalisait sa prestation dans le cadre précis de la sous-traitance. Quant aux salariés, ils étaient rémunérés entre 1600 et 2000 euros nets par mois et hébergés et nourris aux Gîtes de France. Des conditions bien éloignées de ce qui a été qualifié d’esclavagisme!"
A la veille du scrutin européen, Me François Nicolas Wojcikiewicz insiste: "c'est consciente qu'une fermeture de son marché aux entreprises européennes la plongerait dans l'asphyxie que la France devra repenser les conditions dans lesquelles ses administrations contrôlent systématiquement et souvent abusivement ceux qui respectent de leur mieux la règle du jeu et contribuent à l'essor économique commun de leurs pays comme de l’Union Européenne."
Du coup, l'avocat a annoncé la création d'un syndicat européen des prestataires de services. Une dizaine de sociétés européennes seraient déjà prêtes à y adhérer. L'idée est de mieux se défendre, principe premier d'un syndicat.