Coronavirus : comment, en Haute-Loire, la crise sanitaire dope une entreprise après son redressement judiciaire

La société d’emballages plastiques SES à Saint-Pal-de-Mons en Haute-Loire se relève tout juste d’un redressement judiciaire.  Reprise par un groupe de Côte d'Ivoire, elle enregistre aujourd’hui de nombreuses commandes en lien avec la crise du coronavirus COVID 19.

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En septembre 2019, la société SES (Stephany Emballages et Services) à Saint-Pal-de-Mons en Haute-Loire est placée en redressement judiciaire.
Durant les 6 mois qui suivent, les 36 salariés vont aller de rebondissement en rebondissement. Aujourd’hui, l’entreprise repart et la crise du coronavirus dope même son activité. Les commandes de sacs pour les prélèvements biologiques et de sacs à ouverture soluble pour le transport du linge contaminé des hôpitaux et des EHPAD se multiplient.

« On se donne à fond, on revient de loin ! »


Créée en 1988 sur ce plateau industriel de Sainte-Sigolène (Haute-Loire) dédié à la plasturgie, la société SES a toujours travaillé dans le domaine de l’emballage pour l’agroalimentaire et le secteur médical en particulier. Ses productions sont diverses, de la poche pâtissière à la housse de matelas pour les hôpitaux en passant par les gaines de pressing. Mais aujourd’hui, un produit phare est au centre de son attention : le sac hydrosoluble destiné au transport de linges sales ou contaminés.
« Ce sac représente plus des deux tiers de notre travail actuel », reconnait Joël Cadier, qui a pris provisoirement les rênes de la PME aux côtés d’un administrateur provisoire nommé par le tribunal de commerce de Saint-Etienne.
Ce sac limite les risques lors du transport du linge des hôpitaux et des maisons de retraite vers le pressing.
Il y a également une forte demande de sacs de prélèvements biologiques en ce moment, sacs à fermeture étanche.
Alors, l’atelier tourne à plein régime, avec quasiment l’ensemble des salariés et même quelques intérimaires.
« Plastica, notre repreneur, nous a fourni des masques, des visières, du gel et nos locaux sont désinfectés tous les jours », raconte Yohan Fialon, délégué syndical CGT. Selon lui, « les salariés se donnent à fond, ils reviennent de loin ». « Nous avons vécu une situation assez inédite alors aujourd’hui tous les emplois sont sauvés, c’est le soulagement ! ».

Repris par un chef d’entreprise venu de Côte d’Ivoire


Une situation inédite en effet !  Il y a d’abord le choix du tribunal de commerce du Puy-en-Velay, le 29 janvier 2020. Deux repreneurs ont fait des offres pour relancer l’entreprise de Saint-Pal-de-Mons en redressement judiciaire. Abbas Badreddine, chef d’entreprise d’Abidjan en Côte d’Ivoire, propose de reprendre tous les salariés et d’investir sur place dans une nouvelle usine. Mais le tribunal choisit l’autre proposition, locale, du groupe Leygatech, déjà installé sur ce plateau de la plasturgie. Le patron de Leygatech ne conservera que 22 des 37 emplois de SES.
Cette décision provoque la colère des salariés qui installent un piquet de grève et aussi celle du maire qui désapprouve ce choix contraire aux conclusions du ministère public lors de l’audience du tribunal. Mais, rebondissement, le 31 janvier 2020, le procureur de la République au Puy-en-Velay, Nicolas Rigot-Muller, fait appel de la décision du tribunal de commerce.
Une nouvelle audience a lieu en mars 2020, à la cour d’appel de Riom. Entre temps, Leygatech a retiré son offre, et c’est donc cette fois le dirigeant de Plastica qui est désigné comme repreneur.

Une nouvelle usine et 100 emplois d’ici 3 ans


L’homme d’affaires libanais Abbas Badreddine est à la tête de Plastica, une entreprise implantée en Côte d’Ivoire et au Togo, plus de 40 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2019 et près de 2000 salariés. Une entreprise très diversifiée, du film polyéthylène au mobilier de jardin en passant par la sacherie.
M. Badreddine est présent le 11 mars lors de l'audience de la cour d’appel de Riom. Il en profite pour présenter son projet aux salariés de SES et au maire de Saint-Pal-de-Mons: investir rapidement sur un nouveau site plus moderne avec de nouvelles machines et recruter.
« Il envisage de passer rapidement à 50 emplois puis 100 d’ici 3 ans », précise Joël Cadier, conseiller financier du groupe Plastica, qui assure aujourd’hui le pilotage en France de SES car le nouveau patron est bloqué en Côte d’Ivoire.
Le projet du gérant de Plastica est d’ouvrir la PME de Haute-Loire au marché de l’Afrique de l’Ouest et de diversifier ses activités vers le sac poubelle notamment. Dans le même temps, ce rachat offre à son groupe une porte d'entrée vers le marché européen.

"Ils se battent, je vous assure !"


Un directeur d’exploitation doit prendre ses fonctions début juin à Saint-Pal-de-Mons. Pour l’instant, Joël Cadier supervise la marche de SES.
« Nous avons en effet beaucoup de commandes mais nous n’avons pas pu profiter à plein de cette opportunité liée à la crise sanitaire », explique t-il, mettant en avant plusieurs facteurs. D’une part, une capacité de production affaiblie par les mois de redressement judiciaire ; d’autre part, des difficultés financières pour acheter la matière première et enfin une défaillance commerciale de l’entreprise altiligérienne.
« L’activité n’a pas explosé mais avril sera un bon mois pour les ventes comparé à l’an dernier et aux trois mois précédents », lâche t-il. L’activité a été réorientée massivement vers les commandes passées par les hôpitaux et les EHPAD de sacs à ouverture soluble et de sacs pour les prélèvements biologiques mais sans délaisser les clients historiques restés fidèles à SES.
Mais le plus encourageant pour l'homme de confiance d'Abbas Badreddine, c’est « l’esprit d’équipe » des salariés. « Ils se battent, je vous assure », s’enthousiasme t-il. Et il a hâte que le nouveau responsable du site puisse venir le constater lui-même sur place.
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