Lundi 9 octobre, aux assises de Haute-Loire, au Puy-en-Velay, s'ouvre le procès en appel de Cécile Bourgeon et de Berkane Makhlouf, la mère et le beau-père de la petite Fiona. Tous deux sont accusés de violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner.
Le premier procès, perturbé par une médium, avait failli virer à la farce, sans percer le mystère de la mort de Fiona. La mère de la fillette et son ex-compagnon sont rejugés à partir de lundi 9 octobre devant la cour d'assises de Haute-Loire.
Le 26 novembre dernier, Cécile Bourgeon avait été acquittée par la cour d'assises du Puy-de-Dôme sous les huées de la foule, du chef de violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Elle avait été condamnée à cinq ans de prison pour quatre délits, dont ceux de "non assistance à personne en danger" et "dénonciation de crime imaginaire", pour avoir élaboré le scénario de la disparition de l'enfant. Berkane Makhlouf avait écopé de 20 ans de réclusion criminelle pour l'ensemble des faits. Le parquet général, qui avait requis la peine maximale - 30 ans de réclusion - pour les deux accusés, avait fait appel.
Des mois de mensonges
L'affaire débute le dimanche 12 mai 2013 au soir quand la jeune femme de 26 ans, enceinte de son troisième enfant, signale à la police la disparition de sa fille de cinq ans dans un parc de Clermont-Ferrand pendant qu'elle faisait une courte sieste. Des recherches mobilisent la population. La thèse de l'enlèvement est privilégiée et devant les caméras, la jeune femme, en larmes, lance un déchirant appel pour retrouver Fiona.
Mais les enquêteurs soupçonnent rapidement le couple, connu pour sa toxicomanie et placé sur écoute. Ils attendent l'accouchement de la jeune femme en septembre 2013 à Perpignan, où Cécile Bourgeon et Berkane Makhlouf ont déménagé, pour les réinterroger.
Après plusieurs mois de mensonges, ils passent aux aveux: Fiona est morte et ils ont enterré son corps en bordure d'une forêt près du lac d'Aydat, à une vingtaine de kilomètres de Clermont-Ferrand. Mais tous deux se rejettent la faute.
En garde à vue, la mère accuse son compagnon d'avoir maltraité la fillette et donné des coups plus violents que d'habitude la veille du drame. Des allégations rejetées en bloc par celui qui l'accuse à son tour d'avoir frappé Fiona d'un geste impulsif.
Le flou de leurs souvenirs - ils sont incapables de retrouver le lieu d'inhumation et le corps demeure introuvable quatre ans et demi plus tard - empêche les enquêteurs d'y voir clair et tous deux sont renvoyés sans distinction devant les assises.
Tentative de suicide
A Riom, leur mémoire fait toujours défaut, les débats s'enlisent et le procès tourne au ridicule quand un témoin-surprise, qui s'avère être une médium-radiesthésiste, explique à la barre qu'elle a été "contactée par la fillette"... avant de s'effondrer sur le sol avec fracas.
Poussée dans ses retranchements, Cécile Bourgeon perd son sang-froid à plusieurs reprises et révèle une personnalité complexe. Le verdict de la cour fait un choix entre les deux accusés mais le sort de Fiona reste un mystère.
Au Puy-en-Velay, "ce sera le procès de la seconde chance pour qu'ils puissent nous expliquer ce qui s'est passé", estime l'un des avocats des parties civiles, Me Antoine Portal, en déplorant l'ambiance "irrespirable" du premier procès.
"Qu'on arrête de nous balader, de nous manipuler sur l'accident, les blessures involontaires ou les produits stupéfiants en libre service dans l'appartement. Fiona est morte de violences, c'est d'une évidence limpide", lance Me Charles Fribourg, avocat du père de Fiona, Nicolas Chafoulais. "On lui doit la vérité et lui expliquer comment Fiona est morte et où son corps a été jeté." La défense est pessimiste. "Malheureusement, je ne suis pas certain que ce second procès puisse apporter des réponses supplémentaires", estime Me Renaud Portejoie, conseil de Cécile Bourgeon qui a tenté de se suicider fin juillet en prison.
La parole de Berkane Makhlouf, qui s'estime "injustement condamné", peut-elle être la clé de ce nouveau procès?
"Cette nouvelle confrontation entre eux, je la souhaite parce qu'il n'en sortira pas plus de culpabilité pour mon client. Mais on risque aussi d'être dans un règlement de comptes et de s'égarer dans la recherche de la vérité", prévient son avocat, Me Mohamed Khanifar.