Au Puy-en-Velay, face aux jurés de la cour d'assises de Haute-Loire, Cécile Bourgeon avait déclaré dès le premier jour du procès en appel : "Pour moi, j'ai pris perpète. Ma fille ne reviendra pas et je devrai vivre avec ». Mais qui est vraiment Cécile Bourgeon, la mère de Fiona ?
Condamnée en première instance à 5 ans de prison pour quatre délits, dont ceux de "non-assistance à personne en danger" et "dénonciation de crime imaginaire", pour avoir élaboré le scénario de la disparition de l'enfant, Cécile Bourgeon, la mère de Fiona, comparaît à nouveau devant la Cour d’assises de Haute-Loire pour violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner.
Dès les premiers jours du procès, la mère de la petite Fiona reconnaissait de graves manquements: « Moi et Berkane, on était polytoxicomanes à fond, on n'était plus nous-mêmes. Je n'ai pas su protéger ma fille, j’ai échoué en tant que mère... ». La drogue faisait en effet partie du quotidien du couple Makhlouf-Bourgeon.
Une "ado rebelle" et un père "maniaque"
A 13-14 ans, Cécile Bourgeon était une « ado rebelle » qui ne disait « jamais pardon » et qui « se sentait supérieure aux autres » révèlent les notes du psychiatre qui la suivait à l’époque. Ses relations avec son père étaient pour le moins difficiles explique-t-elle au président. Cécile Bourgeon parle d'un père "maniaque", aux réactions disproportionnées, qui usait parfois de violence sur elle lorsqu'elle commettait un impair. Elle décrit "une ambiance malsaine" lorsqu'elle était avec lui. Cécile Bourgeon maintient que son père pratiquait le naturisme et qu'il l'avait forcée à se mettre nue lors d'un séjour au Cap-d' Agde. Une déclaration que son père a démentie lors de son témoignage en 1ere instance.
Au fil des années, Cécile Bourgeon refuse de séjourner chez son père. Elle vit un temps chez sa mère, qui a un nouveau compagnon. Celui-ci entretient des relations plutôt bonnes avec le jeune frère de Cécile Bourgeon, mais le courant ne passe pas avec l'accusée. Il souhaitait remplacer le père des enfants et cela ne plaisait pas à Cécile Bourgeon. Dès lors, elle explique se sentir seule, sa mère n'ayant que peu de gestes d'affection envers elle.
Je voulais être mère jeune, j'étais contente.
A l’âge de 15 ans, elle rencontre Nicolas Chafoulais –le père de Fiona – alors qu’elle vivait en foyer et qu’elle travaillait dans un bar. « Je comprends que je suis en dépression depuis mon plus jeune âge » dit-elle.
Cécile Bourgeon a des sanglots dans la voix lorsqu'elle évoque la découverte de sa grossesse, en 2007. "Je voulais être mère jeune, j'étais contente", confie-t-elle. "J'ai découvert la drogue avec M. Chafoulais, qui se fournissait avec son meilleur ami. J'ai arrêté de fumer lors de ma grossesse, car je voulais qu'elle se passe bien". Assis dans la zone réservée aux parties civiles, Nicolas Chafoulais est prostré. “Ça n'allait pas très bien avec M. Chafoulais. Pour se rapprocher, on voulait avoir Eva. Ça a finalement fait l'effet inverse. Ce n’était pas une bonne idée, parce qu'un enfant supplémentaire donne beaucoup de travail. On s'est finalement séparés.” Cécile Bourgeon et Nicolas Chafoulais resteront 8 ans ensemble.
« Une manipulatrice »
« Si je comprends bien, vous avez quitté Nicolas Chafoulais parce qu'il devenait violent, lui aussi?" lance le président. « Oui » répond Cécile Bourgeon. "Et c'est lui qui vous a initiée aux drogues? C'était que du cannabis?" poursuit le président. « Oui, mais il m'a fait aussi découvrir la cocaïne, l'héroïne, la MDMA, la méthadone..." indique Cécile Bourgeon pendant que Nicolas Chafoulais, penché sur son siège, écoute attentivement. Cécile Bourgeon a tenté d'arrêter "brutalement" sa consommation de drogue pendant sa grossesse. Trop dur. "Pour Fio", elle a dû "taper quelques traces," reconnaît-elle.
Appelée à la barre, Camélia est une amie d’enfance de Cécile Bourgeon qu’elle décrit comme une personne « manipulatrice ». « Elle a un caractère fort Cécile, elle n'est pas faible. Je l'ai déjà vu mettre des droites en boîte de nuit. Elle est tout à fait capable de se défendre. »
Une tentative de suicide
Au début de ce procès Cécile Bourgeon évoque sa tentative de suicide en prison, en juillet 2017. "Quand on souffre trop, on devient égoïste », dit-elle, « On ne voit plus que les gens nous aiment". “Je me suis scarifiée il y a trois jours, je peux vous montrer si vous voulez. J'ai besoin de faire ça. Lorsque je ne peux pas pleurer, j'ai besoin de faire sortir la douleur" ajoute-t-elle à la barre.
"Je vais vous dire ce que tout le monde pense : c'est du pipeau !" attaque l'avocate des parties civiles. Cécile Bourgeon explique qu'elle ne prenait pas son traitement depuis plusieurs semaines. Après un parloir avec sa mère, elle a ingéré une centaine de comprimés, tout le stock qui lui restait. Personne ne l'a vue faire dans la prison.