Dans les Alpes, les initiatives visant à réparer les articles de sport usagés, une solution économique et écoresponsable, se développent chez certains fabricants et autres petits artisans. Cette alternative séduit de plus en plus les consommateurs face à l'inflation.
Un travail précis et minutieux. Julie Mogeny, couturière professionnelle chez Lafuma à Annecy-le-Vieux, répare des articles de sport abîmés renvoyés par les clients. Il suffit souvent de quelques points sur l'emmanchure d'une veste ou de repriser de petits détails. "Les sacs à dos sont souvent à reprendre pour un petit zip ou un accroc. On va aussi avoir des boutons-pression qui s’arrachent à force de les ouvrir et de les fermer", détaille-t-elle.
Alors que 70 000 tonnes d’articles de sport sont jetés chaque année en France, le spécialiste haut-savoyard de l'équipement outdoor Lafuma s'est engagé à réparer, désormais gratuitement et à vie, certains de ses produits. Un choix assumé par l'entreprise qui met en avant une démarche écoresponsable, malgré le coût qu'engendrent pour elle ces réparations.
"On s’est aperçu que quand on faisait réparer un zip principal sur une veste membranée, on réduisait quasiment de moitié l’impact du produit par rapport à un achat neuf. (…) C’est un intérêt environnemental. On le fait parce qu’on y croit, on pense que c’est important et on a envie que nos clients y croient aussi et comprennent que c’est important", assure Bénédicte Desreux, responsable RSE chez Lafuma.
Un choix économique
Faire réparer son matériel est déjà devenu un réflexe pour certains consommateurs. C’est la troisième fois que Frédéric fait ressemeler ses chaussons d’escalade chez un professionnel. "La réparation, c’est 37,50 euros et un chausson neuf, ça vaut entre 100 et 150 euros, donc ça vaut quand même le coup", résume-t-il.
Si la réparation peut devenir un choix économique en raison de l’inflation, Yves Piantoni, lui, a eu le déclic il y a bientôt 40 ans. Le cordonnier installé à Barberaz, en Savoie, était à l’époque l’un des rares en France à se spécialiser dans la réparation d'articles de sport. "Je ne me posais pas la question. On m’apportait un article, que ce soit des chaussures ou des bottes, et je me disais que si quelqu’un l’avait fait, alors je pouvais le réparer", se rappelle-t-il.
Aujourd’hui, son fils a repris la cordonnerie et perpétue la tradition avec un carnet de commandes bien rempli. Le matériel de montagne représente 70 % de son activité. "C’est une chaussure qui a une dizaine d’années, le client est bien dedans, explique le nouveau gérant Guillaume Piantoni en désignant une chaussure de randonnée. On remet une nouvelle semelle et si ça peut encore durer 5 ou 10 ans, c’est déjà mal parce qu’aujourd’hui, une paire de chaussures comme ça, c’est facilement 250 à 350 euros."
Des initiatives pour réparer soi-même
D'autres spécialistes misent sur l'accompagnement en proposant à leurs clients de réparer eux-mêmes leur matériel. C’est le pari depuis 30 ans de l'entreprise Guidetti, spécialiste des bâtons de marche et de trail basée à Fontaine, près de Grenoble. Avec 200 pièces détachées disponibles sur sa boutique en ligne, elle offre la possibilité au consommateur de consolider lui-même ses bâtons de marche.
"En cas de casse, les gens commandent uniquement ce dont ils ont besoin et le changent eux-mêmes avec un petit tutoriel sur notre site qui permet de le faire soi-même et facilement", affirme Olivier Prudhon, responsable du service après-vente chez Guidetti.
De quoi faire des économies considérables : une pointe coûte 10 euros quand des bâtons neufs sont jusqu’à 17 fois plus chers. Au-delà de prôner la réparabilité, l’entreprise iséroise travaille avec des fournisseurs locaux afin de limiter son empreinte carbone.
"L’idée, c’est de respecter le terrain de jeu de nos consommateurs. On est sur un écosystème relativement fragile et on essaie de le préserver au mieux. (…) On sent que les gens sont de plus en plus sensibles à cet impact qu’ils ont sur l’environnement et nous, on leur apporte la solution", complète le directeur commercial de Guidetti, Nicolas Buisson.
Alors que les crises écologiques se multiplient, cette solution touchera-t-elle les industriels et les consommateurs dans une plus large mesure ? En croissance depuis 10 ans, le marché des articles de sport génère toujours du gaspillage et donc, un impact sur l'environnement.