Le tribunal administratif de Grenoble examine, ce jeudi 20 octobre, le référé déposé en septembre par cinq associations pour demander la suspension en urgence de l’autorisation accordée au chantier de la retenue collinaire de la Clusaz, en Haute-Savoie. Si la justice donne raison aux associations, les travaux ne pourront pas démarrer cet automne. La décision devrait être rendue ce mardi.
Le 19 septembre dernier, via un arrêté, le préfet de la Haute-Savoie, a déclaré d’utilité publique le projet d’aménagement de la retenue collinaire de la Colombière, sur le plateau de Beauregard, autorisant ainsi les travaux à démarrer à tout moment dans la station de ski de La Clusaz.
Empêcher le début des travaux
Pour empêcher le début de ces travaux, les membres d'associations locales et d'organisations environnementales se sont installés nuit et jour sur le plateau de Beauregard créant ainsi la ZAD de La Clusaz. En parallèle, ils ont déposé un recours auprès du tribunal administratif de Grenoble. Et c’est aujourd’hui, jeudi 20 octobre, que le tribunal examine la demande portée par cinq associations, dont France Nature Environnement (FNE), la Ligue de protection des oiseaux (LPO) et Mountain Wilderness France.
Ces dernières veulent démontrer que l’autorisation préfectorale qui permet de déroger aux règles interdisant de porter atteinte aux espèces protégées est illégale. Selon eux, "la dérogation pour la destruction d’espèces protégées n’est pas justifiée par un impératif d’intérêt majeur comme ça doit être normalement le cas."
Lors de l'audience, maître Cohendet, l'avocate des associations affirme qu'"il n'y a pas d'impératif d'intérêt public majeur suffisant pour justifier l'impact sur 40 espèces d'oiseaux et 16 espèces de chauves-souris."
Ce à quoi l’avocat de la commune de la Clusaz, maître Eard-Aminthas a répondu : "Il faut de l’argent pour financer la transition du modèle économique. La neige de culture sert à financer la transition vers un tourisme quatre saisons. Ce n'est pas une lubie du lobby du ski"
La préfecture de son côté, représentée par le chef de cellule juridique et le responsable du service eau et environnement, dramatise : "Une décision d'annulation pourrait mettre en péril l'ensemble des stations de moyenne montagne du massif alpin."
Décision rendue mardi
Ce référé est une procédure d’urgence. Si le tribunal administratif donne raison aux opposants, les travaux ne pourront probablement pas commencer cet automne. Car pour respecter la période d’hibernation de la nature, ils ne peuvent avoir lieu au-delà du 30 novembre. À l’inverse, si les associations n’arrivent pas à convaincre la justice, les forces de l’ordre pourront faire évacuer très rapidement la ZAD de la Clusaz.
La décision du tribunal administratif est attendue pour ce mardi 25 octobre.
Pour rappel, la retenue implantée à 1500 mètres d'altitude doit permettre d'alimenter les habitants de la commune en eau potable, d'irriguer les activités agricoles mais aussi, et surtout, de produire de la neige de culture.
Tensions dans le village de La Clusaz
Dans la station de ski de La Clusaz, l’ambiance n’est pas des plus légères depuis quelques semaines, avec d’un côté, les opposants au projet, les associations de défense de la nature, les habitants, et de l’autre les porteurs du projet, les élus, éleveurs et acteurs du tourisme. Un "appel à manifester pacifiquement" est d’ailleurs lancé ce vendredi soir à La Clusaz en faveur de la retenue collinaire.
Un projet contesté depuis longtemps
Ce projet de nouvelle réserve collinaire avait été voté le 29 avril 2021 par le Conseil municipal. "Nous avons un besoin cruel en eau", avait alors assuré le maire, Didier Thévenet, pour défendre ce projet de retenue d'altitude de 148 000 mètres cubes.
Le 24 octobre 2021, une commission d'enquête publique rendait un avis favorable au projet, le déclarant "d’intérêt public pour la population de la vallée des Aravis qui vit du tourisme sous la forme actuelle", pouvait-on lire dans le rapport, qui pointait toutefois quelques limites, notamment un rendement énergétique "discutable", la "destruction d’habitats et de spécimens d’espèces protégées" pour le mener à bien et un "impact négatif sur la biodiversité", surtout en phase de travaux.