Pour les habitants qui avaient porté plainte, c'est une satisfaction en demi-teinte. La justice a reconnu l'Etat "fautif" dans ce dossier, sans pour autant le condamner,"faute de lien direct et certain" entre la pollution et les maladies des plaignants.
"Fautif" mais pas condamné", une décision qui fait écho à la formule "responsable mais pas coupable" déjà entendue, dans bien d'autres combats du même acabit."Pas de lien direct et certain"entre la pollution et la maladie des plaignants
La justice a donc, ce lundi 30 novembre, reconnu la "carence fautive" de l'État dans la lutte contre la pollution en vallée de l'Arve, sans pour autant le condamner "faute de lien direct et certain entre la pollution et les maladies des plaignants".
Dans sa décision, le tribunal administratif de Grenoble rejette les neuf requêtes d'habitants de la vallée de l'Arve qui demandaient la condamnation de l'État pour "carence fautive" dans la lutte contre la pollution de l'air.
La vallée, qui s'étend d'Annemasse à Chamonix au pied du Mont-Blanc, peuplée de 155.000 habitants permanents, fait régulièrement l'objet d'alertes de pollution aux particules fines. Selon une étude de 2017, 8% de la mortalité prématurée constatée localement serait attribuable à ce phénomène, soit 85 décès chaque année.
"Une nouvelle avancée historique dans la lutte contre la pollution"
Trois des neuf requérants, qui demandaient des indemnisations allant de 115.000 à 300.000 euros pour leurs préjudices, avaient fait le déplacement à l'audience le 10 novembre, pour ce recours attendu depuis trois ans.
Le tribunal "considère que la persistance d'un dépassement des valeurs limites de trois polluants entre 2011 et 2016 dans la vallée de l'Arve révèle, en dépit de l'adoption et de la mise en oeuvre d'un plan de protection de l'atmosphère (PPA) le 16 février 2012, une carence fautive de l'État au regard de ses obligations".
Il a toutefois rejeté les neuf requêtes "dès lors que les éléments médicaux et scientifiques produits ne permettaient pas d'établir de lien direct et certain entre les dépassements des valeurs limites de pollution et la contraction ou l'aggravation des pathologies invoquées par les requérants".
Le collectif Coll'Air Pur, dont font partie la majorité des plaignantes, et l'association Écologie Sans Frontière se sont félicités de cette reconnaissance d'une "carence fautive de l'État à empêcher cette pollution" : "c'est une nouvelle avancée dans la lutte contre la pollution".
"Le tribunal considère que l’Etat, par son inaction, n’a pas permis que soient atteints les objectifs de qualité de l’air fixés au niveau national et européen et qu’il n’a pas agi suffisamment efficacement pour atteindre ces objectifs dans les délais les plus courts possibles, et c'est une avancée a réagi dans un communiqué Muriel Auprince, représentant le collectif Coll’Air Pur et requérante à la procédure, considérant même que c'est une victoire historique pour les malades de la pollution et une reconnaissance pour les citoyens de la vallée de l'Arve".
Me François Lafforgue, avocat des habitants, a regretté toutefois que le tribunal ne soit pas allé "au bout du raisonnement en considérant que les déboires médicaux, l'aggravation de symptômes des victimes lors des épisodes de pollution et leurs conditions de vie dégradées ne seraient pas en lien avec cette inaction de l'État".
Des requérantes ont indiqué, ce lundi 30 novembre, leur intention de faire appel de cette décision.