La commune de Menthon-Saint-Bernard, en Haute-Savoie, a été condamnée à verser 2,5 millions d'euros à un couple d'habitants qui souhaitait faire bâtir des villas sur un terrain en bord de lac. La commune leur avait finalement refusé les permis de construire.
La commune de Menthon-Saint-Bernard (Haute-Savoie), 1 800 habitants, a été condamnée à verser 2,5 millions d'euros à un couple d'habitants. Tous deux avant acquis des terrains situés au bord du lac d'Annecy, finalement classés inconstructibles.
Dans son arrêt rendu la semaine dernière, la Cour administrative d'appel de Lyon estime que la délibération du conseil municipal de la commune est "entachée d'illégalité". Les élus avaient approuvé le classement en zone constructible des parcelles concernées, malgré leur localisation sur un "couloir vert" soumis à la "loi littoral".
"La commune de Menthon a ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité", écrit la juridiction lyonnaise. Les plaignants avaient acquis en 2011 différentes parcelles d'une superficie totale d'environ 10 000 m² pour quelque 4,7 millions d'euros. Ils souhaitaient y faire bâtir cinq villas. Mais le conseil municipal de Menthon-Saint-Bernard avait finalement refusé de délivrer à ses administrés les deux permis de construire déposés le 15 avril 2014 après l'intervention de la préfecture.
"L'État avait fait observer que l'application de la loi littoral rendait ces terrains inconstructibles dans la mesure où il s'agissait d'une coupure d'urbanisation au sens de la jurisprudence de la loi littoral", explique le maire de la commune, Antoine de Menthon.
Deux mois pour déposer un recours
Jugeant ce refus illégal, les plaignants avaient saisi le tribunal administratif pour le contester. "À l'époque, bien placé, avec vue sur le lac, c'était entre 450 et 500 euros le mètre carré", indique le propriétaire. Aujourd'hui, le prix est tombé "entre 35 et 40 euros" en raison de son classement en zone inconstructible.
Le 15 novembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble avait tranché en faveur des deux habitants mais leur avait cependant imputé les deux tiers des responsabilités. Il avait condamné la commune de Menthon-Saint-Bernard à leur verser 1,5 million d'euros en réparation du préjudice. Deux mois plus tard, le 14 janvier 2019, les deux parties interjetaient appel devant la Cour administrative d'appel de Lyon, les plaignants réclamant cette fois 6,3 millions d'euros de réparation financière.
Mais dans son arrêt, la Cour a considéré qu'en faisant "l'acquisition des premiers terrains (...) sans condition résolutoire de délivrance d'un permis de construire, alors qu'ils ne pouvaient ignorer l'application à ces terrains des dispositions applicables aux communes littorales", les plaignants avaient "commis des imprudences fautives de nature à exonérer la commune de Menthon-Saint-Bernard de la moitié de sa responsabilité". Les deux parties ont deux mois pour se pourvoir en cassation devant le Conseil d'État.