Haute-Savoie : les taxis français manifestent contre des restrictions de déplacement dans le canton de Genève

Environ 350 taxis et VTC sont réunis à la frontière franco-suisse depuis 6h30 ce lundi 12 avril, entraînant d'importants bouchons aux douanes. Ils protestent contre l'application d'une directive limitant leur activité dans le canton de Genève. 

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Le trafic est fortement perturbé sur les routes qui mènent de la Haute-Savoie vers la Suisse ce lundi. Environ 350 taxis et VTC français se sont donné rendez-vous aux douanes de Bardonnex, Vallard, Veigy-Foncenex et Ferney-Voltaire pour manifester. Ils demandent le droit de transiter dans le canton de Genève sans restrictions. 

Les conducteurs s'opposent à une directive limitant leur activité à 90 jours par an dans le canton de Genève, et les obligeant à déclarer 8 jours au préalable les courses effectuées sur le territoire genevois. 

 


 

Des mesures "injustes et inapplicables"

Taxi indépendante depuis 12 ans à Massingy (Haute-Savoie), Gaëlle Dunoyer fait partie des manifestants. "La limite des 90 jours n'est pas suffisante pour moi", explique-t-elle. "Je suis toute seule dans mon entreprise. Cela veut dire que durant les 9 mois qui restent, il faut que je renonce à la plus grosse partie de mon chiffre d'affaires." 

Avant la crise du Covid, les transferts entre la France et l'aéroport de Genève représentaient en effet 60% de son activité, avec comme clients "des entreprises locales, des Français partant en vacances ou des touristes visitant notre région". Avec ces nouvelles restrictions qui s'ajoutent à la crise du Covid, elle s'est recentrée sur les transferts médicaux. 

L'autre raison de sa colère, c'est l'obligation de déclarer une course 8 jours à l'avance. "Ce n'est pas possible", s'agace-t-elle. "Mes clients me préviennent souvent 48 heures avant, voire à la dernière minute".

Pour elle, la solution serait de "faire un détour pour aller déposer les clients à l'aéroport de Genève côté français en évitant de transiter par la Suisse, mais cela rajoute environ 25 kilomètres et cela pénalise les clients". "Cette manifestation, ce n'est pas que pour nous. Tout cela risque d'avoir un impact sur le tourisme local, bien au-delà des taxis", ajoute la conductrice.

 

Accord tacite

Cette réglementation n'est pas tout à fait nouvelle, puisqu'il s'agit d'une directive de 2005 limitant l'exercice des professions réglementées. "Jusqu'à maintenant, nous avions un accord tacite qui nous permettait de travailler sans restriction dans le canton de Genève", explique Marc Ogorek, président de la Fédération des Taxis Indépendants de Haute-Savoie. 

"Tout se passait bien jusqu'à présent mais depuis la crise du Covid, les autorités genevoises ont commencé à mettre cette directive en application. Il y a eu des intimidations envers certains chauffeurs et des contrôles sous peine de verbalisations", selon Marc Ogorek.

Selon lui, la limite de 90 jours est inapplicable. "Pour un aller-retour d'une heure, on nous compte une journée", regrette-t-il. "Cela ne tient pas compte du temps effectif passé sur le territoire suisse. Une application mobile qui se déclencherait aux postes frontaliers et qui décompterait précisément le temps passé en Suisse serait plus appropriée".

Le représentant revendique également la réciprocité de ces mesures envers la Suisse. "Il faut que ces mesures s'appliquent aussi à nos collègues genevois qui viennent chercher ou déposer quelqu'un en France", explique Marc Ogorek. Dans une pétition en ligne qui a recueilli 700 signatures, le syndicat demande l'annulation de ces nouvelles mesures, un système jugé "injuste et inapproprié". 


Pour le canton de Genève, il n'y a "pas de changement de pratiques"

Interrogé par France 3 Alpes, Mauro Poggia, conseiller d'Etat à Genève, a "beaucoup de peine à comprendre ce qui a déclenché ce mouvement". Selon lui, il n'y a pas d'obligation d'annoncer sa course 8 jours auparavant. "Il y a une application qui permet d'annoncer sa course sur le moment, immédiatement. La règle des 8 jours s'applique pour les travailleurs détachés, ce n'est évidemment pas le cas des chauffeurs de taxis." 

Quant à la règle limitant le travail à 90 jours par an, "il n'y a pas de changement de pratique", s'étonne Mauro Poggia. L'élu genevois rappelle qu'il s'agit d'une "règle européenne qui s'applique aux travailleurs détachés quels qu'ils soient", mais qui n'est dans les faits pas appliquée aux taxis français. "Je pense qu'il y a eu des contrôles qui relèvent davantage des gardes frontières et des services des douanes et non pas de la police genevoise." 

Mauro Poggia regrette l'action des taxis français et son impact sur le trafic. "Le blocage des fronières a des conséquences déplorables. On attendrait des autorités françaises qu'elles appliquent le droit et qu'elles ne laissent pas des particuliers faire des opérations de blocage de frontières. S'il y avait des taxis suisses qui décidaient de bloquer la frontière du côté genevois, je peux vous dire que les autorités genevoises interviendraient. Il s'agit de lieux de passage. Il n'est pas question de prendre en otage des travailleurs transfrontaliers pour des revendications de ce type". 

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