La Ville de Genève veut déposer un recours pour s'opposer au projet d'autoroute du Chablais, pourtant validé par le gouvernement français fin décembre. La municipalité suisse craint une mise en concurrence avec le Léman Express.
L'autoroute du Chablais semblait sur de bons rails, mais l'action en justice que la Ville de Genève veut intenter pourrait y mettre un coup d'arrêt. Le projet autoroutier devant relier Machilly à Thonon-les-Bains, en Haute-Savoie, a été déclaré d'utilité publique (DUP) le 24 décembre, ce qui devait donner le feu vert aux travaux de ce projet, dans les cartons depuis une vingtaine d'années.
C'était sans compter sur la plainte que la municipalité de Genève a annoncé vouloir déposer, estimant que cette future desserte concurrencera le tout nouveau Léman Express, dont le tracé est presque identique. Bon nombre d'associations de défense de l'environnement craignent également que les habitants du Chablais privilégient la voiture au détriment des transports en commun.
Il faut dire que le calendrier est mal tombé : le décret du Premier ministre validant le projet autoroutier a été publié quelques jours seulement après la mise en marche du RER transfrontalier. Un "cadeau climaticide" pour le porte-parole d'Europe Écologie-Les Verts Alain Coulombel. "Les élus locaux arc-boutés sur ce projet vieux de 30 ans sont aveugles au point de ne pas voir que le tout-voiture, c'est fini", a-t-il fustigé auprès du journal suisse Le Temps.
"Non-sens écologique"
"La mobilisation massive des citoyens pour le climat est balayée d'un revers de main par un gouvernement qui continue de prendre des décisions climaticides", estime pour sa part l'association Inspire. La vallée de l'Arve, près de Chamonix, est déjà l'une des plus polluées de France et les associations craignent que le projet d'autoroute n'aggrave la situation s'il est mené à son terme.
Pour ses défenseurs, au contraire, la future A412 vise à "désenclaver le Chablais", une zone qui ne bénéficie pas de grands axes routiers. Une enquête publique dont les résultats ont été communiqués en octobre 2018 a d'ailleurs démontré "de façon très majoritaire le souhait des habitants et de tous les acteurs économiques d’améliorer la circulation" dans ce secteur.
Son impact environnemental reste toutefois critiqué, notamment par les élus régionaux du Rassemblement citoyens écologistes et solidaires (RCES) qui y voient un "non-sens écologique". La construction de cette infrastructure "va déverser des dizaines de milliers de voitures dans l'Etat de Genève", selon Fabienne Grebert qui s'était opposée au projet. A ce même titre, l'autorité Environnementale avait émis un avis réservé, relevant "des insuffisances sur l’évaluation des impacts et sur les mesures de compensation à la destruction d’habitats naturels constituent une faiblesse majeure dans la démonstration de l’utilité publique du projet."
Si la Ville de Genève intente bel et bien une action en justice, cette dernière pourrait retarder à nouveau le projet autoroutier, déjà annulé par deux fois en 1995 et 2006. Le calendrier initial avait fixé la fin des travaux en 2024.