Dans le cadre de son opération "Préserve ta montagne", France 3 Alpes dresse un premier bilan du programme de réintroduction des pygargues à queue blanche dans les Alpes. Depuis son lancement en 2022, 14 aiglons ont été relâchés dans la nature par le centre "Les Aigles du Léman", situé en Haute-Savoie. Nombre d'entre eux parcourent désormais des centaines de kilomètres. Deux accidents ont toutefois été recensés.
Depuis leur naissance au sein du parc des "Aigles du Léman", les petits pygargues à queue blanche ont bien grandi. Ces deux dernières années, quatorze aiglons ont été relâchés dans la nature dans le cadre d'un ambitieux programme de réintroduction.
Certains parcourent des centaines de kilomètres, franchissent les frontières, quand d'autres préfèrent rester à proximité de leurs parents : "Nous sommes très contents des deux premières années de ce programme. Les aiglons relâchés ont montré qu'ils ont su s'adapter mieux que prévu à leur milieu naturel. Ils vivent bien et parcourent de grandes distances", explique Jacques-Olivier Travers, fondateur du parc.
La plupart de ces aiglons sont nés au printemps dernier. Il s'agissait alors d'un événement pour cette espèce éradiquée il y a 130 ans et dont le dernier couple a été tué en 1892 à Thonon-les-Bains.
Les "résidents", les "aventuriers" et les "voyageurs"
C'est sur ces mêmes rives du lac Léman que certains rapaces ont trouvé leur terrain de jeu : "Chez tous les pygargues, nous constatons les mêmes comportements : il y a des 'résidents', des 'aventuriers' et des 'voyageurs'. Les résidents sont ceux qui sont le plus attachés à leurs parents, ils vont rester plus longtemps autour d'eux."
Un des aiglons nommé "Le Pal" fait partie de ces résidents. Entre deux sorties dans le ciel lémanique, cette femelle revient régulièrement au parc pour s'alimenter et accorder une visite à ses géniteurs.
D'autres pygargues se montrent plus téméraires : "Excenevex est une 'aventurière'. Elle est partie très loin. Elle est actuellement dans les Alpes du Sud. On peut voir qu'elle est passée juste au-dessus de La Meije. Elle a enroulé un thermique pour se trouver à presque 4 000 mètres d'altitude. Là, nous sommes vraiment sur un vol exceptionnel. Nous n'avions même pas idée que ces oiseaux pouvaient monter aussi haut et faire des distances pareilles dans leur première année", analyse Jacques-Olivier devant son ordinateur, les yeux rivés sur les données recueillies par les balises GPS accrochées sur le dos des rapaces.
Quant aux 'voyageurs', ils partent plus tard, mais s'aventurent beaucoup plus loin. D'après leur GPS, certains se trouvent dans le nord de l'Espagne ou encore en Norvège.
Deux accidents
Pour d'autres, l'envol aura été plus compliqué. "Châtel", un mâle relâché début septembre, a été blessé puis retrouvé par les équipes des "Aigles du Léman" : "Il a percuté un câble. Il avait toute une articulation en vrac et ne pouvait plus voler. Dans ce cas-là, la balise ne nous a pas servis uniquement pour des recherches scientifiques, mais aussi pour sauver un oiseau."
Récupéré puis soigné, Châtel ne retrouvera pas la liberté : "Même s'il ne peut pas retourner dans la nature, c'est un oiseau qui va pouvoir survivre, faire des petits, qui pourront eux aller dans la nature. C'est une bonne chose pour une espèce qui compte aussi peu d'individus."
Quelques mois plus tôt, un autre drame a eu lieu. "Sciez", un mâle, a été retrouvé décapité en avril dernier en Allemagne, à plus de 800 km de son lieu de naissance. Une enquête a été ouverte et confiée aux autorités allemandes. "Depuis le début de ce programme de réintroduction, on remarque que tous les accidents ou les morts d'aiglons sont liés à l'activité humaine", regrette Jacques-Olivier Travers.
Malgré ces deux "accidents", le programme de réintroduction va se poursuivre dans les prochaines années. Au total, 85 pygargues seront relâchés d'ici 2030.