Il leur manque une signature pour adopter une fillette ukrainienne : la vie en suspension d'une famille italienne

Difficile de savoir combien de familles sont dans la même situation que Marzia et Simone. Le témoignage de ce couple, qui devait adopter une fillette ukrainienne en mars, en dit long sur la dureté de la guerre en Ukraine.

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"Au milieu d'événements aussi dramatiques que la guerre en Ukraine, les grands leaders oublient toujours qu'il y a des gens simples comme nous". Il y a comme une pointe de fatalisme dans les premiers mots de Marzia C., une habitante de Turin qui, avec son mari, était engagée dans une procédure d'adoption en Ukraine quand la guerre s'est déclenchée. Marzia est une femme, comme tant d'autres, prête à tout donner pour qu'un jour un enfant l'appelle simplement: "Mamma"!

Après deux années de recherches, marquées par d'innombrables démarches administratives aux allures de parcours du combattant, Marzia et Simone (son mari), se retrouvent devant un "grand saut dans le vide", comme elle le raconte à France 3 Alpes.

Une signature et la guerre

"Et dire qu'il ne nous manquait plus que la signature du juge ukrainien pour devenir enfin les parents d'Anastasia", constate Marzia, dans une nostalgie teintée d'angoisse. 

En décembre dernier, la première rencontre avec leur future fille augurait tellement bien de la suite. "Cette enfant, dès les premiers instants passés ensemble, c'était un vrai spectacle pour nous ! Elle et moi, on n'a pas eu besoin de parler la même langue pour se comprendre: tout est passé par le regard ! D'ailleurs, d'après ce que m'a dit Madame Elena, elle ne nous a pas oublié...au contraire."

Elle et moi, on n'a pas eu besoin de parler la même langue pour se comprendre

Madame Elena, c'est celle qui veille sur leur fille au centre d'adoption de Vinnytsia, la ville de 350 000 habitants où Anastasia est née il y a 5 ans. Un orphelinat qui est loin de faire figure d'exception en Ukraine: toutes les grands centres urbains du pays en possèdent un ou plusieurs. 

"C'est au début de la pandémie que nos recherches ont commencé pour adopter. Beaucoup de pays, comme la Russie ou la Chine avaient interrompu tout rapport avec les organismes d'adoption.  D'autres pays, en Afrique ou en Amérique du Sud étaient en grande difficulté: seule l'Ukraine semblait rester ouverte à l'adoption. Et mon mari et moi avons toujours aimé ce pays...depuis la catastrophe de Tchernobyl notamment, pour le courage dont ont fait preuve ses habitants".

L'espoir suspendu à un appel vidéo

Mais pour l'heure, c'est sur l'écran de son portable que Marzia doit se contenter de rendre visite à sa petite ukrainienne. Un rayon de soleil pour la future maman, qui ne voit plus guère de différence entre la nuit et le jour. "Je me lève comme une folle vers une heure du matin. Je fais un tour dans la cour de la maison. De toute façon, à peine couchée, je repense à elle dans son lit d'enfant".

"Tout vaut mieux que cette attente insupportable"

Alors, les jours d'appel vidéo, c'est un peu la fête dans la maison de la banlieue de Turin. "On lui a présenté Papa, Maman, la maison...les chats aussi. Et puis la "Nonna" (grand-mère). On lui a appris son nom en italien. Elle nous répond en mélangeant un peu tout: l'ukrainien, l'italien... Babussia pour dire Nonna: c'est pas mal aussi!". 

Mais le rayon de soleil n'illumine que peu de temps les journées du couple. C'est qu'il faut y aller sur la pointe des pieds pour entrer dans la vie d'une enfant dont les yeux n'ont vu que les murs de l'hôpital avant de passer, à l'âge de 5 mois, à ceux de l'orphelinat. 

Et puis, les nouvelles n'arrivent qu'au compte-gouttes. "Seul un pont aurait sauté aux abords de la ville, pour l'instant d'après ce que l'on sait". Ce qui n'empêche pas la future maman d'avouer: "si Madame Elena me disait aujourd'hui que la petite a besoin de moi: je partirai sur-le-champ ! Tout vaut mieux que cette attente insupportable".

C'est le 20 mars que Marzia et son mari devaient partir pour l'Ukraine. C'est deux jours plus tard, que la petite Anastasia devait devenir officiellement leur fille grâce à la signature du juge. À la seule date qui comptait vraiment sur le calendrier du couple, il leur faut désormais ajouter celle de la fin de la guerre en Ukraine.

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