Nouvelle journée difficile pour les habitants de Bozel en Savoie avec les obsèques de 3 membres de la famille Lénisa.
Vingt-quatre heures après, les enquêteurs s'interrogent toujours sur les ressorts du drame familial survenu jeudi soir, à Bozel, en Savoie. Le meurtrier présumé, 24 ans, fils d'une famille connue de la Tarentaise, a reconnu être l'auteur de la tuerie familiale, dans laquelle son père et son plus jeu
Ce 1er août, plusieurs centaines de personnes ont assisté aux obsèques du père et de ses deux enfants tués par son fils aîné, auquel le prêtre a demandé de penser, afin "qu'après ce coup de folie, il se sente aimé de Dieu".
Devant l'église avaient été dressées des tonnelles de toile blanche pour abriter les personnes qui n'avaient pas pu prendre place dans l'église.
A l'intérieur, les trois cercueils avaient été alignés côte à côte. Dessus, avaient été déposés les portraits du père et de ses deux fils de huit et dix-sept ans.
La cérémonie, à laquelle étaient présentes la mère, qui avait réussi à échapper à la tuerie, et la fille, Charlène, âgée de 22 ans, a débuté au son de la chanson "New-York New-York".
"Tu étais gentil, discret, tu avais toujours le sourire", a dit Charlène, avec des sanglots dans la voix, à propos de son frère Benjamin. Puis elle a rendu hommage à son petit frère Victor, "le rayon de soleil de la famille".
Des amis de la famille ont aussi pris la parole. L'un d'eux a décrit le père de famille, Florent, un passionné des voitures de course, comme un homme qui "croquait la vie à 300 à l'heure" et qui était "attentif aux autres".
Au moment où les trois cercueils ont quitté l'église, les amis du père ont fait vrombir les moteurs de leurs bolides garés devant l'édifice.
Les trois victimes ont été inhumées au cimetière de Bozel. De nombreux commerçants du village avaient fermé boutique le temps de la cérémonie.
"C'est un gâchis. on savait qu'il y avait des problèmes de communication entre le père et le fils, mais on n'aurait jamais pu imaginer ça", a réagi un ami de la famille avant l'office religieux.
"Au début, on a été troublé", a témoigné un camarade de classe de Benjamin, Everiste, 17 ans. "On a essayé de comprendre mais on n'a pas trouvé de solution. La leçon de tout ça, c'est qu'il faut profiter de la vie", a-t-il déclaré.
Jordan Lénisa, âgé de 24 ans, a été écroué après sa mise en examen pour assassinat et tentative d'assassinat.
Jordan Lénisa
Comment justifie-t-il son acte ?
"Il déclare avoir des souvenirs partiels et ne fournit aucune explication concrète quant à ses actes", a déclaré samedi le vice-procureur de Chambéry, Pierre Filliard, lors d'une conférence de presse.
Selon lui, le jeune homme de 24 ans a demandé "de l'aide pour comprendre" ce qu'il a fait.
"Jordan Lénisa n'est pas irresponsable, son état ne nécessite pas une hospitalisation", en deux phrases voilà résumé le rapport du psychiatre. Un rapport réclamé par la justice dans la foulée du drame familial de Bozel.
Son passé psychiatrique avait été évoqué par des proches, des voisins, dès le début de l'enquête.
Alors qui est réellement Jordan Lénisa ? Qu'est-ce qui a motivé son geste fatal ?
Le champ des recherches s'élargit peu à peu.
On l'imagine en opposition permanente avec ce père qui l'employait et lui faisait souvent des reproches, en raison de son faible investissement.
On le dit accro aux jeux vidéos sous son pseudo Ombr'mortel.
Des ingrédients qui ne font pas un assassin. Mais la présence d'un pistolet automatique dans une maison où il n'y avait pas d'arme laisse à penser que le jeune homme a préparé son "massacre". La préméditation, principale hypothèse désormais des enquêteurs. Une enquête de flagrance pour assassinat a été ouverte.
A Bozel, les volets de ce grand chalet de bois et de pierre sont fermés et des scellés apposés sur la porte d'entrée. Des fleurs ont été apportés par des voisins.
La petite commune savoyarde est sous le choc, une cellule de soutien psychologique a été mise en place par le maire.
Le suspect a été arrêté dans ce domicile familial jeudi 26 juillet en fin d'après-midi, peu après les coups de feu.
Une arme, qui serait celle du crime, a été retrouvée au domicile familial et n'appartiendrait pas à la famille. Il s'agit d'un pistolet automatique de calibre 6,35 mm.
Les victimes ont toutes été tuées par balles. Les corps ont été retrouvés dans des pièces différentes.
Après son père de 49 ans, son frère de 8 ans, les coups de feu ont tué un autre frère de 17 ans.
Benjamin est décédé des suites de ses blessures au lendemain du drame alors qu'il était plongé dans coma profond au CHU de Grenoble.
La mère a pu prendre la fuite et donner l'alerte
La mère du suspect, qui a été hospitalisée et n'a pas encore pu être entendue, serait arrivée au domicile alors que son fils était en train de tirer sur ses proches ou qu'il venait de le faire. Elle a pu s'enfuir et donner l'alerte.
Le fils travaillait dans l'entreprise paternelle
Les enquêteurs se sont penchés sur la personnalité du tueur supposé, qui vivait seul depuis quelques temps dans un appartement, et sur de possibles dissensions liées au fait qu'il travaillait dans l'entreprise paternelle.
Le père avait fondé il y a deux ans sa société de vente de produits haut de gamme pour voitures, baptisée "Avenir Performance" et basée à Frontenex, à une cinquantaine de kilomètres de Bozel, après avoir fait fortune en brevetant un isolant pour maison et développé une entreprise à Gilly-sur-Isère.
Jeux vidéos
Selon le parquet, le père reprochait régulièrement à son fils "son peu d'entrain au travail et son addiction pour les jeux vidéos en ligne".
Sous le pseudonyme "ombr-mortel", il postulait ainsi en février dernier sur internet pour intégrer une guilde, "les loups d'Amakma". "Je bosse énormément mais passe mes week-ends, sauf sortie en boîte, sur Dofus", un jeu de rôle en ligne, écrivait-il, ajoutant: "Je suis quelqu'un de très droit et drôle".
Une commune sous le choc
Christian Seigle-Ferrand, le maire de cette petite localité de 2.000 habitants, se dit sous le choc d'"un drame épouvantable", mettant ce geste sur le compte d'un jeune ayant "disjoncté" au sein de cette famille paisible de quatre enfants. La fille aînée, âgée de 22 ans, était absente lors du drame.
Le maire a précisé que le frère de huit ans tué aurait dû fêter son anniversaire vendredi.
Le drame s'est déroulé le jour des obsèques à Auxerre d'un père et de toute sa famille, qu'il est soupçonné d'avoir tuée avant de se suicider.
Avant cela, le dernier cas marquant d'un drame familial sanglant remontait à 2011 avec l'affaire Dupont de Ligonnès. Les corps d'Agnès Dupont de Ligonnès et de ses quatre enfants de 13 à 20 ans, dissimulés dans la terre sous la terrasse de leur maison, avaient été découverts en avril 2011 à Nantes.
Le père, Xavier Dupont de Ligonnès, principal suspect, avait été vu ensuite dans le Var mais n'avait jamais redonné signe de vie.
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