Les stations renforcent la sécurité et multiplient les opérations de sensibilisation
Face à la hausse des accidents de ski et à l'aggravation des blessures, les professionnels
de la montagne, contre lesquels les pratiquants n'hésitent plus à se retourner, redoublent d'efforts pour diminuer les règlements de comptes coûteux devant la justice.
Les Ménuires ont mis en place ce 16 février sur les pistes du domaine un village d'information et de sensibilisation au public. Objectif : encourager les bons comportements.
<<<< le reportage d'Alban Alvarez & Julien Voigt
Une condamnation qui a fait exemple
Reçue comme un coup de massue par les acteurs de la montagne, la condamnation
en janvier de la petite commune pyrénéenne de Font-Romeu à payer un million d'euros
à une jeune femme devenue tétraplégique à la suite d'un accident de ski fait suite
à une série de procès qui ont conduit les professionnels à prendre davantage en
compte la sécurité des skieurs.
"Il est nécessaire de redresser la situation, de ne plus être dans l'euphorie.
Pendant très longtemps, on n'a communiqué que sur le positif au détriment des risques encourus en montagne", souligne Christian Reverbel, directeur du service des pistes de l'Alpe d'Huez et vice-président de l'Association nationale pour l'étude de la
neige et des avalanches (ANENA).
Lui-même avait été condamné en 1998 avec un autre responsable à six mois de prison
avec sursis et 250.000 francs d'amende, ainsi qu'à 190.000 francs de dommages et
intérêts, après le décès d'un skieur en 1996 dans une avalanche sur une piste de
la station.
"Il faut prévoir l'imprévisible", soupire M. Reverbel, qui déplore l'augmentation
des conduites inadaptées sur les pistes, avec notamment des vitesses excessives
sur les zones pour débutants.
"Est-ce qu'on peut reprocher à un skieur victime d'accident de demander des comptes à une station alors qu'elle met en avant principalement le côté loisir?", s'interroge de son côté le commandant du Peloton de gendarmerie de haute-montagne (PGHM) de l'Isère, Sébastien Rigault.
"Il n'est pas question pour autant de déresponsabiliser le skieur", nuance le
gendarme, alors que la collision entre usagers, en progression depuis dix ans, est la principale cause d'accidents sur les pistes, selon le rapport annuel 2011 de l'association des Médecins de montagne.
"Notre secteur n'échappe pas à la judiciarisation générale de la société, mais
le nombre de contentieux dans notre secteur, une trentaine par an environ, est
stable", assure Laurent Reynaud, délégué général de Domaines skiables de France,
qui rassemble les opérateurs de remontées mécaniques.
Dernièrement, c'est la société des remontées mécaniques de la station de Vars,
dans les Haute-Alpes, qui a comparu devant le tribunal correctionnel de Gap pour
homicide involontaire après la mort d'un skieur.
Il est reproché à l'entreprise, en attente de son jugement, "des négligences dans
l'organisation de la sécurité", la victime, qui avait perdu le contrôle de ses
skis, ayant dérapé sous un filet de protection avant de percuter un poteau dépourvu
de matelas.
"Les acteurs de la montagne ont une conscience plus aigüe des risques juridiques
qu'ils encourent", reconnaît Laurent Reynaud, à l'image du DVD sorti dernièrement
par le syndicat de l'Ecole de ski français (ESF) avec l'appui du parquet d'Albertville.
Un support dans lequel sont, entre autres, évoqués les risques et les responsabilités
des moniteurs de ski et de leurs clients lors de la pratique hors-piste.
"Il faut rappeler constamment la limite entre cette fameuse liberté des pratiquants
de la montagne qui peut paraître sans limite et la sécurité", souligne Patrick
Quincy, procureur de la République d'Albertville.