Préfet de l'Isère et président du Conseil départemental ont rencontré, ce mardi 23 août, des membres de la Coordination Rurale Auvergne Rhône-Alpes, afin de faire un point sur la crise du lait qui, ici comme ailleurs, menace des exploitations qui travaillent à perte.
Alors qu'à Laval (Mayenne) les éleveurs poursuivent leur bras de fer sur le prix du lait avec le groupe Lactalis, -premier groupe mondial des produits laitiers-, en Isère l'exaspération se mesure aussi dans les exploitations.
Lionel Beffre, Préfet, et Jean-Pierre Barbier, président LR du Département, se sont rendus sur la ferme "Les 13 Fontaines", un GAEC de Brézins.
Car la crise est mondiale, rappelons-le. Depuis la fin des quotas laitiers, en avril 2015, les pays européens ont vu la production laitière augmenter fortement. Au même moment, la consommation a ralenti. La surproduction s'est donc installée et les cours mondiaux ont chuté.
Selon l'organisme FranceAgriMer, le prix du lait en France avait atteint une moyenne de 365,4 euros les 1.000 litres en 2014 pour chuter à 309,1 euros en 2015, soit en dessous des coûts de production pour certains éleveurs. La crise s'est encore aggravée en 2016.
Le pire, témoignent ces agriculteurs, c'est qu'ils travaillent "à l'aveugle", "on ne sait jamais combien on va toucher". En revanche, les coûts qui pèsent sur l'exploitation sont fixes et "il faut sans arrêt se mettre aux normes".
Interview réalisée par Aurélie Massait et Florine Ebbhah
Quelles solutions pour sortir de la crise?
Le gouvernement a lancé en 2015 un plan de soutien à l'élevage, pour un montant total de 700 millions d'euros auxquels s'est ajoutée une baisse des charges de plus de 700 millions d'euros sur les cotisations personnelles des agriculteurs entre 2014 et 2016.Par ailleurs, Bruxelles a annoncé en juillet une nouvelle enveloppe d'aide de 500 millions, censée inciter les éleveurs à réduire leur production, notamment en Europe du Nord. Mais les syndicats français restent sceptiques sur son efficacité.
Au niveau français, le gouvernement comme les syndicats agricoles poussent à une réorganisation de la filière.
Une porte de sortie possible pour les éleveurs est de tenter de monter en gamme pour trouver de nouvelles niches de consommation. Ainsi, en 2015 plus de 500 élevages de bovins allaitants se sont convertis à l'agriculture biologique. Mais ces conversions demandent d'importants investissements et il n'y aura pas des débouchés pour tout le monde.
Jean-Pierre Barbier, le président du Conseil départemental de l'Isère, milite, lui, pour que les agriculteurs récupèrent de la valeur ajoutée grâce à la vente directe à grande échelle.
Interview
Pourquoi prendre Lactalis pour cible?
Selon les chiffres de la Commission européenne pour juillet 2016, à 277 euros la tonne, le prix moyen d'achat du lait en France est l'un des plus élevés d'Europe. Cependant cette moyenne cache de grandes disparités, et selon les chiffres relevés par la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL), le géant mondial Lactalis est l'entreprise qui rémunère le plus mal ses éleveurs, par rapport à ses concurrentes.A 256,9 euros la tonne en juillet, Lactalis se retrouve loin derrière le groupe Laïta et la société Silav (290 euros la tonne) ou encore la laiterie Saint-Père, filiale d'Intermarché, qui rémunère les éleveurs 300 euros les 1.000 litres.
Un producteur sur cinq en France travaille pour Lactalis soit 20% de la collecte française et 5 milliards de litres de lait collectés pour 25 milliards de litres produits annuellement en France.