"A la prochaine attaque, j’arrête" : le désarroi d’un éleveur de brebis, dont 11 bêtes ont été dévorées par les loups

Le troupeau d’Adrien Ravanat, éleveur à Cholonge, a été victime de deux attaques de loups en un mois. Au total, 11 de ses bêtes ont été dévorées. A 30 ans, l’agriculteur craint de devoir mettre la clé sous la porte si rien n’est fait pour protéger les cheptels de ces prédateurs.

" Hier, je me suis levé pour ramasser des carcasses et abattre des animaux agonisants. J’en chialais".

Adrien Ravanat a passé un dimanche particulièrement éprouvant. Ce 1er août, alors qu’il descendait voir son troupeau, il a trouvé trois brebis mortes et trois autres à moitié dévorées, encore agonisantes.

Ses bêtes, qui pâturaient en bordure du hameau de La Coirelle, près de Cholonge, ont été attaquées par une meute de loups pendant la nuit. Au petit matin, Adrien a dû abattre les trois brebis blessées : "J'ai l’habitude de le faire pour les consommer, mais là, devoir abattre ces bêtes à moitié dévorées qui ont souffert pendant des heures, ça m’a tordu le ventre".

Au total, six brebis ont été tuées par les loups cette nuit-là. Cinq autres ont été dévorées lors d’une précédente attaque début juillet. "En tout, sur 70 bêtes, j’en ai perdu 11 et il y en a encore 7 qui sont blessées, se désole l’éleveur. Je suis vidé et je me dis qu’à la prochaine attaque, j’arrête, je mets la clé sous la porte. A cause de ça, j’ai perdu la moitié de ma production cette année. Les brebis blessées étaient gestantes, elles vont perdre leur agneau et ça aura de grosses répercussions économiques".

Selon la DREAL, près de 10 400 brebis ont été tuées par les canidés en 2019. En France, les éleveurs victimes d’attaques de loups sont indemnisés entre 80 et 700 euros en fonction du sexe et de l’âge de la brebis décédée. Mais pour Adrien cela ne suffit pas. "Il faut racheter des bêtes et compter environ un an le temps qu’elles produisent. A force, je n’aurai plus de quoi payer mes charges".

 

Des attaques "de plus en plus fréquentes"

Adrien Ravanat a repris le troupeau familial en 2016, en plus de ses 35h hebdomadaires en tant que boucher-charcutier. Fils d’éleveur, il a le sentiment que ses conditions de travail sont bien plus compliquées que celles de ses prédécesseurs, notamment depuis la réapparition du loup il y a trente ans. "Le boulot d’éleveur est plus difficile qu’avant. On nous demande de travailler avec un prédateur et de mettre en place plein de mesures de protections, souffle-t-il. Aujourd’hui le loup ne craint pas l’homme, il n’a plus de prédateur. Donc les  attaques sont de plus en plus lourdes et fréquentes. Ce n’est pas tenable". 

Selon les estimations de l’association Les éleveurs face au loup, les mesures de protection des troupeaux contre la prédation du loup coûteraient près de 30 millions d’euros chaque année. 

 

Une cohabitation difficile

Aujourd’hui, le berger dit s’exprimer au nom de tous les éleveurs victimes d’attaques de loups : "Les attaques sont de plus en plus fréquentes et je veux que notre colère soit entendue. On prône l’écologie, mais ce n’est pas tout beau tout rose. Certes, il faut protéger le loup et la nature, mais si demain il n’y a plus d’éleveurs et qu’on ne protège pas les alpages, je ne donne pas cher de l’environnement".

Il en appelle aux élus et au gouvernement afin de trouver un terrain d’entente entre la protection du loup et celle des troupeaux. "Il faut que chacun trouve sa place, même si j’ai l’impression que l’élevage n’a plus sa place en France. Quand vous trouvez la moitié de votre troupeau décimé, dans ma situation, certains pourraient songer au pire" prévient-il.

Réapparu en France en 1992, le loup est toujours une espèce menacée dans l'hexagone. Le réseau loup-lynx estime que la population de loups gris comptait environ 580 individus à la sortie de l’hiver 2019-2020, la majorité se situant dans le sud-est du pays. 

 

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