Le rectorat de Grenoble s'est opposé à l'ouverture d'une école musulmane à Bourgoin-Jallieu, en Isère. Une décision validée par le tribunal administratif au motif que la directrice n'avait pas l'expérience requise. L'avocate de l'association porteuse du projet dénonce une volonté d'entrave.
Il n'y aura pas d'école musulmane à Bourgoin-Jallieu (Isère) en cette rentrée scolaire. Le tribunal administratif de Grenoble, dans une ordonnance rendue lundi 30 août, a donné raison au rectorat qui s'était opposé à son ouverture. "La loi a été surinterprétée pour faire échec à l'ouverture de cette école en utilisant des moyens déloyaux", dénonce l'avocate de l'association porteuse du projet, l'Union pour l'enseignement privé musulman (UEPM), Me Nohra Boukara.
L'association a acquis, aménagé des locaux sur la commune et désigné une directrice pour cette école élémentaire hors-contrat qui devait accueillir une trentaine d'élèves. Mais le dossier a été retoqué par le rectorat au motif que la directrice ne disposait pas d'une expérience suffisante - la loi exige un minimum de cinq ans dans l'enseignement. "Le rectorat est d'une totale mauvaise foi", estime Me Boukara qui se questionne sur "les véritables motivations de ce refus". Contacté, le rectorat de Grenoble n'a pas encore donné suite à nos sollicitations.
La "laïcité de l'enseignement" en question
L'Union pour l'enseignement privé musulman a donc déposé un recours devant le tribunal administratif pour contester ce refus. Mais la justice a donné raison au rectorat, suspendant l'ouverture de l'établissement pour cette rentrée. Le tribunal s'est basé sur le manque d'expérience de la directrice qui n'aurait pas cumulé les cinq ans d'expérience nécessaires, à six jours près.
En ajoutant cinq mois de contrat à tiers-temps en 2014, cette dernière aurait eu l'ancienneté requise, selon l'avocate. "Mais il n'est donné aucune précision sur la nature" de ce contrat, "alors qu'il ressort des fiches de salaires que l'activité exercée (...) ne correspondait qu'à un temps partiel de peu d'heures", observe le tribunal dans son ordonnance.
Consultée par le rectorat, la ville de Bourgoin-Jallieu avait rendu un avis défavorable à l'ouverture de cette école en questionnant notamment "la laïcité de l'enseignement", fait savoir le maire (LR) Vincent Chriqui. "Nous avons examiné le dossier et il ne nous semblait pas répondre aux exigences en raison de la structure de l'association et de sa gouvernance", ajoute l'édile.
En question, les liens que cette dernière entretiendrait avec Millî Görüs, une fédération musulmane qui a notamment refusé de signer la "charte des principes pour l'islam de France". La confédération, proche de la Turquie, avait été mise sur le devant de la scène avec le projet de construction d'une mosquée à Strasbourg, et d’une école musulmane à Albertville (Savoie). Mais l'UEPM réfute tout lien avec Millî Görüs, selon l'AFP. Elle se réserve le droit de faire appel.