Un festival de black metal néonazi a été organisé, ce samedi 24 février, sur la petite commune de Vézeronce-Curtin, malgré un arrêté d'interdiction de la préfecture de l'Isère. Le maire du village n'avait pas été prévenu sur la nature de l'événement. Selon lui, la salle avait été louée pour "un anniversaire".
Maurice Belantan était loin de se douter qu'un festival de black metal néonazi pouvait se tenir sur sa commune. Le maire de Vézeronce-Curtin, en Isère, a appris dans la soirée de ce samedi 24 février que plusieurs concerts à l'idéologie néonazie étaient organisés dans une salle communale réservée depuis des semaines.
"La salle a été réservée il y a deux mois et demi environ. Les personnes qui ont réservé sont venues faire un contrat de location. Dans le contrat de location, il est précisé que les personnes doivent payer le montant indiqué. Ce qui a été fait dans les temps. Ils ont fourni une assurance pour la soirée d'hier. Tout était en ordre pour une location, comme ça se passe assez régulièrement", se souvient l'édile en charge de la commune depuis 2001.
"On ne s'était pas inquiété"
Ce n'est qu'à l'approche de l'événement que Maurice Belantan a été prévenu de l'organisation du festival. Mais sans qu'il sache la localisation précise : "On avait eu une réunion des maires à la communauté de communes jeudi soir. On avait eu l'information qu'une organisation de ce type pouvait se tenir éventuellement sur notre territoire. J'avais vérifié le lendemain en mairie si la salle était louée. Elle était louée pour un anniversaire, donc on ne s'était pas inquiété plus que ça."
"Hier vers 18 heures, mon premier adjoint a été appelé. Il a été prévenu que le rassemblement se tenait à Vézeronce-Curtin, a-t-il expliqué ce dimanche. Je suis arrivé en même temps que les forces de l'ordre. On a vu arriver du monde. Les personnes qui arrivaient hier soir ne laissaient pas supposer quoi que ce soit. (...) À aucun moment on ne pouvait soupçonner qu'il y avait ce type de manifestation."
On pensait que c'était un anniversaire ou un mariage. Mais une rave-party néonazie... On l'a appris ce matin.
Un habitant de Vézeronce-Curtin (Isère).
Même constat de la part d'un riverain rencontré ce dimanche : "On pensait que c'était un anniversaire ou un mariage. Mais une rave-party néonazie... On l'a appris ce matin. On ne les a pas entendus. Ça n'a pas fait plus de bruit que certains mariages."
Celui-ci a constaté que certains "festivaliers" ne venaient pas de la région : "Ils ne parlaient pas tous français. J'ai cru entendre de l'italien, explique-t-il. Puis, pas mal de plaques d'immatriculation ne venaient pas du 38 (le département de l'Isère, ndlr)."
150 participants
Le festival de NSBM (national-socialist black metal) "Call of terror", proche de l'idéologie néonazie, était annoncé depuis plusieurs jours dans la région Auvergne-Rhône-Alpes. Sans en connaître le lieu précis, plusieurs préfectures dont celles de l'Isère et du Rhône avaient pris des arrêtés d'interdiction.
L'événement s'est tout de même déroulé ce samedi 24 février, date de la création du parti NSDAP d'Adolf Hitler en 1920. Les autorités ont appris "vers la fin d'après-midi" que le concert interdit se tenait dans ce petit village de 2 000 habitants.
L'organisateur du festival "Call of terror" s'est vu notifier par la gendarmerie l'arrêté d'interdiction mais "a refusé d'en respecter les termes", selon la même source. Cinq points de contrôles ont alors été mis en place par la gendarmerie sur les principales routes d'accès, à moins d'une heure de Lyon. Ces "contrôles systématiques" sont menés en vue "des poursuites qui pourront être engagées contre les organisateurs ou les participants", selon la préfecture.
Une plainte déposée
Les organisateurs risquent jusqu'à six mois d'emprisonnement et 7 500 euros d'amende et les participants une contravention de quatrième classe, passible de quelques centaines d'euros au plus. "Plusieurs infractions ont été constatées sur le champ (et) ont fait l'objet de verbalisation", a indiqué la préfecture.
Au total, le festival a rassemblé "150 personnes dans une salle pouvant en accueillir 1 000", a précisé la préfecture de l'Isère ce dimanche matin. L'événement s'est terminé vers 1h30. Le maire de la commune, Maurice Belantan, a annoncé avoir porté plainte ce samedi soir en gendarmerie. De son côté, le Crif Grenoble-Dauphiné demande à la préfecture et au parquet d'"engager des procédures" : "Le Crif Grenoble-Dauphiné se constituera alors partie civile aux poursuites ainsi engagées."