A Grenoble, le combat de Nadia(s) contre la prostitution

Il aura fallu le courage d’une fille Nadia, l’attention d’un gendarme et la ténacité d’un juge pour faire tomber les proxénètes de Grenoble. Un web documentaire retrace l’histoire. Entre BD et polar, une nouvelle forme de narration puissante et interactive à découvrir sur nadias.docinteractif.fr.

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Ce web documentaire inédit s’inscrit comme le prolongement du film « La guerre des clans » de Eric Merlen et Frédéric Crotta. Le film retrace un demi-siècle d’histoire du  grand banditisme à Grenoble.

Cliquez sur l'image ci-dessous 

Le web documentaire nous plonge au cœur de l’enquête qui a conduit aux procès des proxénètes de Grenoble en 1980 et 1981.

Dans le web docu, le lecteur est la greffière

 « La contrainte est de savoir à quelle place on met le lecteur, dit Fabien Collini, réalisateur. J’ai choisi de lui laisser celle de la greffière du juge Weisbuch. Et tous les dessins offrent cette perspective. Le lecteur voit ce que voit la greffière ».

Il voit et agit car le web documentaire est interactif offrant au lecteur la possibilité de faire des choix. Libre à lui d’aller cliquer ou pas, sur ce qui  est proposé : témoignages vidéo, procès-verbaux des auditons etc…

Si l’ambiance est celle d’une BD policière, qu’on ne s’y trompe pas : «  La narration n’est pas une fiction, précise Fabien Collini. C’est la vie de Nadia. Le souci majeur est de ne trahir ni ses propos, ni sa confiance. Quand je lui ai montré, elle m’a juste dit c’est ça, oui c’est ça. Ça m’a touché ».

Nadia, qui la première a eu le cran de dénoncer son proxénète, a aujourd’hui 62 ans. Entre elle et le juge Weisbuch des liens d’amitié se sont tissés au fil des années. Tout comme avec une assistante sociale de l’association l’Appart qui a pris le temps de l’écouter : « Dédi, comme on l’appelait, a été la première personne à donner la main pour nous en sortir. Si elle n’avait pas été là, je n’en serais pas où j’en suis. Les autres filles non plus, dit Nadia ».

Dédi était assistante sociale à l’Appart. Une association créée en 1967 à Grenoble. Elle a pour mission d’accueillir et d’accompagner les personnes en risque ou en situation de prostitution. En 1980, l’Appart est au côté des victimes dans le procès des proxénètes.

La prostitution n’est pas un état… Elle s’inscrit dans un parcours de vie

Lauriane Mounier, éducatrice spécialisée et coordinatrice à l’Appart

Après le procès des proxénètes des filles de Grenoble en 1980, la prostitution a disparu des rues de la ville. Elle s’est alors pratiquée dans des lieux privés comme les bars à champagne, les bars américains etc. où elle existe toujours. Les années 2000 ont vu le retour de filles sur le pavé. Des filles liées aux réseaux de traites d’humains.

Elles viennent essentiellement du Nigéria, de Bulgarie et de Roumanie : les Nigérianes, la nuit, principalement dans le quartier de la gare, les filles de l’Est, le jour, sur les nationales et les départementales : « Depuis 2018, on constate que les filles sont de plus en plus jeunes, explique Lauriane Mounier. Elles ont souvent connu une grande précarité et d’énormes carences affectives. Si la prostitution peut apparaitre comme un recours en situation de détresse elle n’est pas un état. Elle vient s’inscrire dans un parcours de vie ».

« Si les formes prostitutionnelles changent, la violence reste… »

Il y a le pavé et la prostitution discrète, presque invisible. Celle qui se cache dans les lieux privés, les bars à hôtesses, les appartements, les hôtels. Celle qui passe par les réseaux sociaux. Elle est exponentielle et difficile à quantifier. Elle passe par des réseaux connus de sites de rencontres et « Elle est très codifiée par les textes, les images. Pas d’annonce pour des passes mais là où il y des roses au bas de photos, ce sont les prix… ». Le confinement a vu se développer une autre forme de prostitution. Une prostitution virtuelle, sans contact. Celle-ci aussi est difficilement quantifiable.

L’Appart est pour les prostitués-es le dernier recours. Le lieu où l’on vient parler quand on est à bout. Et Lauriane Mounier de constater : « Presque toutes les personnes ont eu une enfance difficile : carences affectives, violences, placements de foyers en familles d’accueil. Elles présentent souvent un syndrome post-traumatique important lié à la violence. Violence de leur parcours de vie dans lequel est venu s’inscrire la prostitution, violence des clients, des macs, des passants. »

Dans les années 70-80, on comptait plus de 200 000 prostitués-es en France. Aujourd’hui, les chiffres officiels font état de 30 à 35 000. Ces chiffres ne prennent pas en compte la prostitution « discrète », ni la prostitution occasionnelle. D’après Eric Merlen, coauteur du film «  La guerre des clans », on peut multiplier ce nombre par deux.

« Nadia(s) , un combat contre la prostitution, Grenoble 1980 » web documentaire de Fabien Colloni ( coproduction Nomade Productions/France3 AURA) à voir ci-dessous : cliquez sur l'image pour accéder au webdoc' 

 

L’Appart

L’Appart a vu le jour à Grenoble en 1967. L’association accueille, accompagne et aide à l’insertion toute personne en situation de prostitution ou en risque de prostitution. Et par prostitution elle entend « tout échange d’un acte sexuel contre de l’argent ou des services ». Les services peuvent être, un hébergement, des courses etc. Elle accueille dans ses locaux ou va directement à la rencontre des prostitués-es. Déclarée d’utilité publique depuis 1975, elle peut se porter partie civile devant les tribunaux. Dans les années 70-80 l’Appart a accompagné les « filles de Grenoble ».

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