Agression dans un collège près de Grenoble : "Je ne suis pas un monstre, je regrette" se défend l'un des suspects

Deux frères, auteurs présumés de l'agression du personnel du collège de Corenc, près de Grenoble, comparaissaient ce jeudi 7 décembre devant la justice. Le frère aîné a tenté de s'excuser avant de laisser parler sa colère. Compte-rendu d'audience.

Silhouette mince, cheveux noirs, barbe taillée, il est arrivé tête baissée dans le box des prévenus, deux jours après avoir fait irruption dans le collège de Corenc. Le jeune majeur, âgé de 19 ans et quelques mois, était jugé ce jeudi 7 décembre en comparution immédiate pour "violence aggravée par trois circonstances", "dégradation ou détérioration de bien d'autrui en réunion" et "menaces de mort à l'encontre de personnes chargées de mission de service public", par le tribunal correctionnel de Grenoble. 

Mardi soir, il s'était introduit dans l'établissement scolaire avec son frère mineur pour s'en prendre à l'équipe de direction. Les deux jeunes hommes ont agressé la principale et son adjointe, ainsi que d'autres membres de l'équipe du collège, à la suite d'un signalement pour violences familiales et d'un placement de leur petite sœur en foyer.

La jeune fille, scolarisée dans l'établissement, s'était confiée à ses professeurs et à des amis, disant "qu'elle s'était fait frapper", par ses proches.

Fou de colère, le jeune homme aurait alors lancé : "Je vais tous vous tuer, je vais tous vous buter" à l'équipe de direction, relate la présidente du tribunal.

Ce jeudi, les deux femmes, à la tête du collège de Corenc, ont assisté à l'audience, malgré la peur. Elles ont fait face à une "situation d'une violence extrême. Mes clients sont terrifiés", rapporte Me Michèle Girot-Marc, au point que deux des victimes n'ont pu venir au tribunal, étant "toujours en état de choc".

Rapidement, le prévenu demande le report de l'audience pour pouvoir préparer sa défense. Demande à laquelle aucune des parties ne s'est opposée.

Déjà condamné en janvier 2023

Le jeune majeur doit néanmoins s'expliquer pour déterminer si oui, ou non, il attendra son procès en détention ou sous contrôle judiciaire, d'autant qu'il est accusé de récidive.

En janvier 2023, il avait déjà été reconnu coupable "d'outrage", "d'usage de stupéfiants" et de "violences aggravées par trois circonstances sur personnes dépositaires de l'autorité publique", en l'occurrence des gendarmes.

Mes clients sont terrifiés après ce traumatisme pour l'institution scolaire

Me Michèle Girot-Marc

Avocate des parties civiles

"Vous vous êtes fait soigner après vos condamnations ?", lui demande la présidente du tribunal. "Non", répond-il. "Mardi, vous n'avez pas su tenir vos nerfs. Vous avez l'impression d'avoir un problème par rapport à cela ?", l'interroge à nouveau la juge. "Non", se contente-t-il de dire à nouveau.

"Je veux juste que ma sœur n'aille pas en foyer. Moi et mes frères, on n'est pas des exemples", continue-t-il, "mais ma petite sœur, on veut qu'elle fasse des études, on ne veut pas qu'elle dérive et en allant en foyer, c'est ce qu'il risque d'arriver", argue le jeune homme qui parle d'une voix posée.

Éviter "les pressions" et "les représailles"

Face au "traumatisme pour l'institution scolaire" qu'a constitué l'agression, l'avocate des parties civiles demande le maintien en détention du jeune homme.

La substitut du procureur souligne, de son côté, "la rage, l'excitation, la violence manifeste et la volonté d'en découdre" du prévenu, qui "n'entend rien ni personne et a un sentiment de toute-puissance".

Elle demande son incarcération pour éviter les "pressions sur les témoins, les victimes et leurs familles", "les représailles" possibles après "des menaces de mort maintes fois réitérées".

La représentante du ministère public craint également un nouveau passage à l'acte pour récupérer sa petite sœur, alors qu'une seconde enquête est en cours pour violences intrafamiliales. 

Plus que de la colère, c'est une extrême inquiétude pour sa sœur qui a guidé son geste.

Me Célia Lamy

avocate du prévenu

Me Célia Lamy met en avant les "efforts d'insertion" de son client, en CDI comme chef de salle dans un restaurant depuis un an. "L'émotion est redescendue" depuis mardi, argue-t-elle. "Plus que de la colère, c'est une extrême inquiétude pour sa sœur" qui a guidé son geste, avance l'avocate.

Le prévenu reprend la parole, d'une voix plus forte. Il se défend d'être "un monstre". "Je suis quelqu'un d'honnête, de droit. Avant, j'ai fait des bêtises, mais maintenant je me suis rattrapé. J'ai eu deux-trois dérivations, c'est humain", dit-il. "Pas des dérivations, des infractions", le corrige la présidente du tribunal.

Le jeune homme continue, tentant de convaincre les juges de sa prise de conscience : "je n'aurais pas dû m'énerver, je le regrette, je regrette ce que j'ai dit. M'envoyer en prison, ce serait la pire des choses. C'est moi qui dois assumer ma famille, mes parents sont malades".

Coup de colère en fin d'audience

Après délibération, la cour a décidé de maintenir le jeune majeur en détention provisoire. Il a été placé sous mandat de dépôt et va attendre son procès à la prison de Varces. L'audience aura lieu le 8 janvier 2024.

"Je ne mérite pas ça, Madame la juge", a réagi le prévenu, qui perd, alors, son calme apparent. "Vous êtes bien fières...", a-t-il lancé d'un ton narquois en direction des victimes avant de sortir du box.

Dans le couloir attenant à la salle d'audience, des bruits de coups contre les murs et des insultes jaillissent.

L'aîné en prison, le mineur sous contrôle judiciaire

Dans le même temps, ce jeudi 7 décembre, son frère, qui aura 18 ans dans quelques jours, a lui été présenté au juge des enfants. À l’issue de l'audience, il a été "placé sous contrôle judiciaire", a indiqué le procureur de la République de Grenoble.

La mesure a été assortie de plusieurs obligations, notamment "de ne pas contacter les victimes", "de ne pas paraître au collège de Corenc", "de respecter un couvre-feu", "de travailler ou de suivre une formation", a précisé Eric Vaillant.

Le jeune frère a également interdiction de détenir une arme et l'obligation de répondre aux convocations de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ).

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