Après le décès d'une hôtesse de caisse de Carrefour à Saint-Denis (93) annoncée ce vendredi 27 mars, les réactions se multiplient. Au niveau national la CGT dénonçe des manquements. Nous avons recueilli le témoignage de Karine, employée d'un autre grand groupe à Saint-Martin-d'Hères.
C'est nous qui avons appris à Karine le décès de l'hôtesse de caisse employée au Carrefour de Saint-Denis (93). Elle n'a pas eu le temps d'en parler avec ses collègues et ne sait pas encore si cette triste nouvelle va entraîner une angoisse, voire une panique... Karine travaille à l'accueil d'un hypermarché situé à Saint-Martin-D'Hères.
"Bien sûr qu'on a peur d'attraper le virus" explique Karine, "mais il faut avouer que chez nous on est bien protégés". Très rapidement, des mesures sanitaires ont été mises en place dans son entreprise. "On a tout, masques, gants, gel, lingettes pour désinfecter les postes de travail" énumère-t-elle. Les masques ? Elle ne sait pas exactement mais ce serait plutôt des chirurgicaux. "On les garde 4 heures, les gants on les jette aussi au bout de 2 heures".
Dans les salles sociales, une personne a été employée pour tout nettoyer régulièrement. "Après cela dépend de nous", ajoute Karine. "Dans la salle de pause on laisse une chaise libre entre deux personnes, on fait attention".
Les salariés sont aussi moins nombreux à se croiser dans le magasin. Ils sont 230 d'ordinaire. Une bonne partie, ceux qui mettent les produits en rayon, sont passés en horaires de nuit. Ils travaillent désormais de minuit à 6 heures du matin.
Le problème, ce sont les clients
Les employés du magasin de Saint-Martin-d'Hères apprécieraient donc les mesures de protection décidée par leur directeur, d'après Karine. Et pourtant, l'hôtesse de caisse ne mâche pas ses mots. Déléguée syndicale SNPA-FO, elle s'est déjà opposée à sa direction lorsque l'hypermarché avait commencé à ouvrir le dimanche et le soir en caisses autonomes. A vrai dire, ce qui inquiètent les employés, ce sont surtout les clients. "On en parle tout le temps" relate Karine.
Car les personnes qui fréquentent le magasin ne respecteraient pas vraiment les mesures de confinement. "Ils ont l'air de ne pas avoir compris, d'être hors du temps", se désole Karine. "Ils viennent pour acheter des bricoles, une baguette de pain"...
L'hôtesse de caisse et ses collègues se sentent protégées par les vitres en plexiglass installées aux caisses et à l'accueil. "Mais lorsque nous sommes dans le magasin, les gens nous arrêtent pour nous demander quelque chose, et ils sont tout près de nous". "On a peur qu'on nous tousse dessus" confesse-t-elle.
Karine ne comprend pas : "on leur donne des lingettes pour désinfecter les caddies et des gants, mais ils ne veulent pas les mettre". Et c'est sûr, d'après elle "il y a plein de cas dans le magasin".
Elle craint pour sa santé et celle de ses proches. Sa fille de 19 ans, son père de 84 ans qu'elle voit souvent parce qu'elle lui fait les courses. "Tous les jours quand je rentre du travail, je me douche et je lave mes vêtements. C'est le minimum".
Ce 27 mars le groupe Carrefour a confirmé le décès d'Aïcha, 52 ans, employée dans un magasin de Saint-Denis Basilique, et déléguée syndicale CGT. Le syndicat recense "aujourd'hui (dans ses secteurs) plus de 550 cas supposés et 181 cas avérés, dont plusieurs graves" et réclame que les salariés soient équipés de masques. Il demande aussi au gouvernement d'imposer à la grande distribution "de n'ouvrir que les rayons des produits de première nécessité, de restreindre les amplitudes d'ouverture et de fermer le dimanche."