Eprouvés par le manque d’eau, la chaleur et les nuisibles, les épicéas isérois souffrent. Face au défi du changement climatique, les professionnels de la forêt ont lancé de nouvelles approches pour rendre ces milieux plus résilients.
C’est un insecte de 3 millimètres qui fait mourir des arbres cinquantenaires. Dans les collines du Nord-Isère, le scolyte fait des ravages. Après avoir provoqué l’abattage de 7 000 arbres dans le Semnoz, en Haute-Savoie, il s’attaque désormais aux épicéas de la forêt de Semons.
La chaleur et le manque d'eau provoquent chez ces arbres un tel stress qu’ils ne parviennent plus à se défendre face aux envahisseurs.
"Plus l’arbre est en stress, plus le scolyte va attirer ses congénères avec ses phéromones pour leur indiquer un endroit propice au développement de l’espèce", explique Henri Moulin, expert en sylviculture pour l'Office national des forêts (ONF) de l’Isère. En quelques semaines seulement, la colonie bloque la circulation de la sève et provoque la mort de l’épicéa.
Seule solution pour l’ONF : couper les arbres et valoriser leur bois avant qu’il ne soit trop tard. Mais que replanter à la place ? Comment remplacer ces arbres vulnérables à la sécheresse et aux insectes sans commettre les mêmes erreurs ?
Replanter une forêt mosaïque
L’ONF mise désormais sur les "forêts mosaïques", composées d’une quarantaine d’essences différentes dont certaines résistent mieux à la chaleur. "On a des essences qui viennent des landes, d’Italie et de Provence qui sont plus résilientes face au climat de demain, poursuit Henri Moulin.
"On essaye d’adapter nos essences au réchauffement climatique et de diversifier pour ne pas mettre tous nos œufs dans le même panier. Comme ça, si demain on a une crise climatique sur une essence, on pourra se rattraper sur une essence secondaire", ajoute-t-il.
Faire confiance aux oiseaux
En forêt de Chartreuse, où les épicéas souffrent aussi, l’ONF adopte une autre stratégie inédite en montagne : collaborer avec les oiseaux en offrant des glands de chênes aux geais. "Ils vont naturellement les enfouir pour faire des réserves. Mais comme ils en cachent plus que ce qu’ils en ont besoin, ils vont en oublier et ces glands vont faire des semis. Et donc des arbres pour la forêt de demain", détaille Jérémy Vincendon, technicien forestier territorial ONF Isère.
Ainsi, sans le savoir, le geai plante des chênes en altitude. Pour sauver les arbres, le forestier semble s’être trouvé un nouvel allié.