Pour limiter le risque incendie à l’approche de l’été, les services de l’Etat ont engagé un débroussaillement sur les pentes de la Bastille à Grenoble. Trois associations de protection de l’environnement dénoncent cette action qu’elles jugent "irréversible pour la faune et la flore".
"C’est une catastrophe environnementale", s’insurge Jean-Pierre Taupiac, le directeur territorial de la LPO (Ligue de Protection des Oiseaux) en Isère. En plein cœur de Grenoble, sur les pentes vertes de la Bastille, plus de deux hectares de végétation viennent d’être débroussaillés, entre la cité du Rabot et les fortifications de la Bastille. "Tout a été rasé avec des engins mécaniques très puissants qui ont ravagé le sol. Il est foutu, il va mettre des années à repartir."
Limiter le risque incendie
Conséquence d’une loi qui oblige le débroussaillement dans un rayon de 50 mètres autour des habitations afin de protéger du risque d’incendie. L’Etat a donc appliqué cette réglementation.
Mais pour la LPO, FNE et l’association de protection de la nature Gentiana, il est allé bien au-delà : "Il aurait fallu conserver des îlots de végétation pour que ça puisse représenter des zones de refuges pour la biodiversité, élaguer simplement à 2 mètres pour ne pas trop impacter les arbres dans leurs besoins vitaux au quotidien et puis ne rien broyé, c’est-à-dire maintenir au sol tous les branchages qui ont été débroussaillés pour permettre d’abord une alimentation, un apport en compostage pour l’humus, car ça se fait progressivement avec le temps," explique Julien Perrier, administrateur bénévole à France Nature Environnement.
Ces travaux ont impacté la vie, des oiseaux sont morts.
Jean-Pierre Taupiac, directeur territorial de la LPOà France 3 Alpes
Si ces trois associations environnementales ne s’opposent pas au débroussaillage, elles s’indignent de son ampleur et du moment de l’année auquel il intervient : "Là, on est en pleine période de reproduction, avril mai juin, c’est la période où les oiseaux sont sur les nids, ils sont en train de nourrir et pour eux, c’est une période sensible, il ne faut pas intervenir sur la végétation, car il peut y avoir des impacts irréversibles sur certaines espèces d’oiseaux."
À cet endroit, la LPO avait dénombré, en 2021, pas moins de 62 espèces d’oiseaux comme le Pic épeichette, le Serin cini, le Chardonneret élégant (classé "vulnérable" en France)… "On avait tout une nature qui permettait à la faune de s’installer et notamment aux oiseaux de vivre et de se nourrir, car il y avait plein d’insectes, il y avait de la mousse, il y avait tout un micro système qui avait mis des années à se créer."
"Au cœur de Grenoble, capitale verte en 2022, c’est inadmissible que l’état puisse agir de cette manière à l’heure même où l’on parle de biodiversité d’urgence climatique. Là, on a des travaux qui ont impacté la vie. Des oiseaux sont morts, des insectes ne se sont pas reproduits, c’est une catastrophe environnementale", conclut le directeur territorial de la LPO.
Une plainte envisagée ?
"En raison de la gravité de ces faits, FNE Isère, Gentiana et la LPO AuRA envisagent de porter plainte pour destruction d’espèces protégées et de leurs habitats," précisent les associations dans un communiqué commun. À l’heure actuelle, les trois associations demandent l’arrêt immédiat de ces travaux ainsi que la mise en place rapide de mesures de protections efficaces pour protéger la biodiversité.
De son côté, la préfecture de l’Isère, à l'origine de l'arrêté ordonnant le débroussaillement n’a pas encore trouvé le temps de répondre à nos sollicitations, mais a fait savoir que les travaux avaient, pour l'instant, été stoppés.