Le gouvernement avait été sommé d'agir en juillet 2020, notamment à Grenoble, sous peine d'une astreinte record. "Si des mesures ont été prises", le Conseil d'État estime "qu’elles sont incertaines, que leurs effets n’ont pas été évaluées", et que l'Etat doit donc verser des amendes aux associations
En juillet 2020, le Conseil d'État avait ordonné au Gouvernement d’agir pour améliorer la qualité de l’air dans plusieurs zones en France, sous peine d’une astreinte de 10 millions d’euros par semestre de retard.
Le Conseil d'Etat avait notamment ciblé la pollution de l'air dans huit villes et régions de France dont Grenoble. Pour la vallée de l'Arve, les mesures prévues sont jugées "crédibles".
Si des mesures ont été prises, le Conseil d'État estime aujourd’hui qu’elles ne permettront pas d’améliorer la situation dans le délai le plus court possible, car la mise en œuvre de certaines d’entre elles reste incertaine et leurs effets n’ont pas été évalués.
"C’est pourquoi il condamne l’État à payer l’astreinte de 10 millions d’euros pour le premier semestre de l’année 2021 à l’association Les Amis de la Terre qui l’avait initialement saisi, ainsi qu’à plusieurs organismes et associations engagés dans la lutte contre la pollution de l’air." commente-t-il en rendant sa décision ce 4 août.
⚖ Pollution de l’air : le Conseil d'État condamne l’État à payer 10 millions d’euros ⤵
— Conseil d'État (@Conseil_Etat) August 4, 2021
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Le Conseil d'État avait jugé, il y a trois ans, que l'État ne respectait pas ses engagements contre la pollution de l'air, responsable de près de 50 000 morts prématurées par an dans le pays, dont un mort tous les trois jours rien que dans la capitale iséroise.
L'institution avait alors enjoint à l'État de mettre en oeuvre des plans de réduction des niveaux de particules PM10 (diamètre inférieur ou égal à 10 microns) et/ou de dioxyde d'azote (NO2, polluant notamment associé au trafic routier) dans treize zones.
A nouveau saisi par plusieurs associations de défense de l'environnement, le Conseil d'État constate que "les valeurs limites de pollution restent trop souvent dépassées notamment en Haute-Savoie, Grenoble et Lyon pour le dioxyde d'azote.
À Grenoble, c’est d’abord le NO 2 (dioxyde d’azote) qui est en cause. Si ce polluant a baissé de 48 % depuis 2000 sur ce territoire, 1 200 personnes (dont 700 à Grenoble) sont encore surexposées, essentiellement le long des axes routiers ou autoroutiers (comme l’A480 par exemple). Produit à 59 % par la circulation et à 28 % par l’industrie, le NO 2 est, avec les particules fines, le responsable de décès prématurés (entre 45 000 et 68 000 par an en France selon les études).
Même si la Métropole de Grenoble assure se mobiliser pour améliorer la qualité de l'air, " le dépassement des taux reste récurrent " estime le Conseil d'Etat. Les mesures prises par le gouvernement au premier semestre 2021 "ne sont pas suffisantes", estime la plus haute juridiction administrative française.
"On est au-delà du symbole", s'est félicité l'avocat de l'association Les Amis de la Terre, Louis Cofflard, interrogé par franceinfo après l'annonce du Conseil d'Etat. Les 10 millions d'euros constituent cependant une "somme qu'on peut relativiser au regard de ce que coûte la pollution de l'air annuelle pour la France : cela a été évalué à des sommes qui sont près de 100 fois supérieures, voire 1 000 fois supérieures, puisqu'on parle de 90 milliards d'euros par an".
Le Conseil d’État évaluera les actions du Gouvernement pour le second semestre de l’année 2021 au début de l’année 2022 et décidera si l’État devra verser une nouvelle astreinte.