La prime au covoiturage, mise en place par le gouvernement en janvier 2023, est reconduite pour une année supplémentaire. Une pratique encore minoritaire, mais dont la part grossit régulièrement sous l'impulsion de plateformes telle que Ynstant, créée il y a quelques mois par un Isérois pour cibler les trajets de dernière minute.
Rendez-vous était donné devant la gare de Voiron. Benoit et Sébastien ont décidé de faire voiture commune pour un trajet d'une poignée de kilomètres, l'un pour un rendez-vous professionnel, l'autre pour rendre visite à un ami.
"Autrement, on se serait sûrement déplacés avec deux voitures au lieu d'une, ce qui est un peu dommage quand on voit le monde sur les routes et les problèmes environnementaux", remarque Benoit, passager de ce trajet.
Tous deux ont organisé la course via l'application Ynstant, dédiée aux covoiturages instantanés. La plateforme aspire à transporter un maximum de passagers sur des trajets courts, en dessous de 80 km.
"On a créé cette application parce qu'on s'est rendu compte que BlaBlaCar [l'application leader du covoiturage, NDLR] présentait un certain nombre de freins pour les conducteurs en termes de planification. Sur Ynstant, on publie son trajet seulement 20 minutes avant de partir", compare le fondateur de l'application, Lancelot Salomon.
Forte de quelque 30 000 utilisateurs par mois, la plateforme mise sur l'instantanéité. "On peut proposer un trajet en 3 secondes et partir 10 minutes après, cela permet de garder une flexibilité. C'est un nouveau réflexe qu'on cherche à créer chez les conducteurs", complète Lancelot Salomon, Isérois d'origine.
Attrait financier
Les passagers sont notifiés des trajets disponibles sur l'itinéraire qu'ils recherchent et les conducteurs, qui proposent 100 000 trajets chaque mois, y trouvent une compensation financière grâce, notamment, à la prime au covoiturage mise en place par le gouvernement.
"On touche un peu d'argent à son premier trajet. Je suis en train de faire mes 10 trajets et à la fin, on touche l'autre moitié de la prime. Sinon, chaque trajet vaut le coup parce que dès que j'en publie un, je gagne quelques centimes [accordés par Ynstant, NDLR] donc c'est toujours bon à prendre", assure Sébastien, un automobiliste utilisateur de la plateforme.
La prime gouvernementale de 100 euros annuels, mise en place en janvier 2023 pour inciter les Français à covoiturer, a été reconduite en 2024 en ciblant davantage les trajets courts. Quelque 180 000 primes ont été distribuées l'année passée bien que la pratique demeure minoritaire.
En proposant une prime supplémentaire - jusqu'à 20 euros - pour les conducteurs activant l'application à chaque trajet, même s'ils ne trouvent pas de passagers, Ynstant entend se placer parmi les leaders d’un marché prometteur.
"Il y a 40 millions de trajets qui sont faits chaque jour en voiture et le gouvernement cherche à avoir plus de 3 millions de covoitureurs par jour contre 1 million aujourd'hui. On s'attend à voir le marché tripler dans les trois prochaines années. Pour répondre aux enjeux de planification écologique, c'est essentiel", assure le fondateur de l'application.
Une pratique minoritaire
De nombreuses plateformes proposent des offres comparables à l'image de BlaBlaCar Daily ou Klaxit, avec des services centrés sur les itinéraires du quotidien. Le service M covoit’ Lignes+, conçu pour les trajets depuis le Voironnais et le Grésivaudan en direction de Grenoble, fonctionne pour sa part sur le modèle des transports en commun avec des arrêts dédiés au covoiturage et un service gratuit pour les passagers.
D'autres applications existent, mais elles se positionnent surtout sur des trajets domicile-travail à horaires réguliers et pas tellement sur du dernière minute comme Ynstant où on propose son trajet quelques minutes avant de partir. Mais on s'attend à avoir d'autres concurrents sur le secteur.
Lancelot Salomon, fondateur de l'application Ynstant
Atteindre 3 millions de trajets quotidiens réalisés en covoiturage à horizon 2027 permettrait d'économiser jusqu'à 4,5 millions de tonnes de CO2 par an, soit 1% des émissions de gaz à effet de serre annuelles de la France, d'après le secrétariat général à la Planification écologique
Mais un bilan sur le covoiturage publié le 6 novembre 2023 par le ministère de la Transition écologique estime à 70% la part des déplacements domicile-travail réalisés avec des véhicules individuels, la plupart en voiture seule, et à 3% la part du covoiturage quotidien.