Pollution : la circulation différenciée est-elle vraiment efficace ?

Mise en place ces derniers jours en raison du pic de pollution lié à la canicule, la circulation différenciée contribue à lutter contre la pollution à l'ozone. Mais son impact reste pour l'instant difficile à quantifier. Explications

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Ces mesures de restriction de la circulation automobile ont été mises en place ces derniers jours en raison de l'épisode de pollution estivale à l'ozone, notamment à Grenoble, Annecy, en Nord-Isère et en zone Alpine. Si la circulation différenciée contribue à lutter contre la pollution à l'ozone, en réduisant les émissions de polluants, son impact reste difficile à évaluer. Et du côté des ONG, la mesure est jugée insuffisante.
 
Il est difficile de lutter contre l'ozine car c'est un polluant de l'air dit "secondaire": contrairement à d'autres, par exemple les particules fines, il n'est pas directement rejeté par une activité. Ce gaz irritant est issu de réactions chimiques, sous l'effet du soleil, impliquant des polluants présents dans l'air, comme les oxydes d'azote, émis principalement par le trafic routier, et les composés organiques volatils (hydrocarbures, solvants...), rejetés notamment par l'industrie.

    L'ozone est d'autant plus difficile à gérer que ses origines sont multiples, explique à l'AFP Laurence Rouïl, de l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris).


Les "processus physico-chimiques" de sa formation "s'amplifient sur plusieurs jours" et ne sont "pas locaux géographiquement", poursuit-elle, évoquant des "panaches transfrontaliers ou transcontinentaux". Ainsi, une décision à un endroit, en ville par exemple, peut avoir un impact plus loin, à la campagne.
 

La circulation différenciée a-t-elle limité le pic d'ozone ?

 L'épisode de pollution à l'ozone commencé la semaine dernière a entraîné dans plusieurs villes (Paris, Lyon, Marseille, Strasbourg...) la circulation différenciée, en vigueur notamment à Grenoble jusqu'au mardi 2 juillet.
 
Malgré ces mesures, le seuil d'information des populations de 180 microgrammes/m3 en moyenne horaire a été largement dépassé par endroits, comme en Ile-de-France avec vendredi et samedi des concentrations maximales respectivement de 195 et 234 µg/m3. 

Mais "on a évité que la pointe de pollution ne soit plus importante qu'elle ne l'a été", assure à l'AFP Serge Pellier, de l'organisme de surveillance de la qualité de l'air ATMO Auvergne-Rhône-Alpes.

Difficile toutefois à ce stade de quantifier cet impact. "On a besoin des chiffres sur l'application effective des différentes mesures (circulation différenciée, limitations de vitesse, contournement pour les poids-lourds, mesures sur les industries...)", souligne-t-il. En théorie, appliquée à 100%, la circulation différenciée aurait permis de réduire de 24% le nombre de kilomètres parcourus dans le périmètre de l'A86 et ainsi de 50% les émissions d'oxydes d'azote du trafic routier sur cette zone, explique-t-il.

Mais l'interdiction de circulation des véhicules les plus polluants n'est pas forcément respectée par les automobilistes qui ne sont pas encore systématiquement verbalisés. Jeudi matin, à Grenoble, 12 conducteurs sur 18 contrôlés lors des premières heures de la mise en place de la mesure étaient en infraction.

"Une mesurette"


La circulation différenciée est "une mesurette" qui "évidemment ne suffit pas", dénonce Olivier Blond, président de l'association Respire. Comme d'autres ONG, il réclame des plans d'ampleur à long terme contre la pollution de l'air. Par exemple, la mise en place de zones à faibles émissions, comme celle qui interdit depuis lundi la circulation des véhicules les plus polluants dans plus de la moitié des communes du Grand Paris (sans verbalisation avant 2021). 

Agir contre la circulation routière seule, et donc l'émission de dioxyde d'azote, ne suffit pas non plus contre un polluant particulier comme l'ozone, selon les experts."Il faut d'autres mesures contre les composés organiques volatils (industries, usages domestiques, solvants, aérosols, produits ménagers, transports maritimes)", insiste Laurence Rouïl.

 Pour limiter les pics, mais aussi la pollution de fond et donc l'exposition chronique responsable de 500 décès par an selon Santé Publique France.

Depuis 20 ans, il y a "une tendance à la baisse des pics de pollution à l'ozone" et de leur intensité, mais les niveaux de fonds "ne diminuent pas du tout", indique la chercheuse, évoquant notamment l'influence du réchauffement climatique.
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