Au lendemain du débat Le Pen-Macron, à Grenoble, les électeurs font encore la queue pour établir des procurations. Mais ils sont aussi très nombreux à ne toujours pas savoir quoi faire dimanche.
Le débat d'hier soir a-t-il fait changer d'avis les électeurs ? Bien malin qui saura le dire... en tout cas ils font toujours la queue devant le Commissariat de Grenoble pour faire établir des procurations. 250 chaque jour. Mais ils sont aussi très nombreux encore à s'interroger sur la conduite à tenir dimanche.
Equipe France 3 Alpes : Céline Aubert Florine Ebbhah Clémentine Fayolle
A J moins 3 du second tour, beaucoup d'électeurs sont encore indécis
Même après le débat Macron-Le Pen. C'est ce que les politologues appellent le dilemne du "choix impossible". Entre deux candidats qui ne les représentent pas. Entre "la haine et la finance".
Parmi ces indécis, certains en ont "marre du vote utile". Ils n'ont toujours pas digéré le vote pour Jacques Chirac, ou plutôt contre Le Pen, père, en 2002.
D'autres voudraient limiter la victoire d'Emmanuel Macron, qui leur semble acquise.
Ces questionnements, voire ces déchirements entre le vote utile, l'abstention, le vote blanc, ne sont pas réservés aux seuls électeurs de Jean-Luc Mélenchon. Le journal Le Monde a lancé un appel à témoignages fort instructif sur la question. On y trouve des électeurs de Benoit Hamon, de François Fillon, entre autres.
Voter... oui, mais comment ?!
Cette élection, au déroulement rocambolesque, pleine de rebondissements, semble avoir stimulé l'imagination des citoyens français. Pour le meilleur ou pour le pire. Abstenons-nous... de juger.
En tout cas, sur le net et ailleurs, on voit fleurir des initiatives insolites : comme celle qui invite à voter, mais seulement après 17H...
"Le ministère de l’intérieur publie à 12h puis à 17h les chiffres de la participation. En allant voter après 17h, nous pouvons faire en sorte que notre opposition soit entendue et comptabilisée à travers les différents niveaux d'abstention au cours de la journée (...) Que M. Macron, qui appelle à un « vote d’adhésion », puisse prendre la mesure de notre opposition en étant obligé de compter ses voix avec humilité et sans triomphalisme." explique Entends MAVOIX. Plus de 40 000 soutiens sur change.org
La stratégie plutôt que la conviction
D'autres vont beaucoup plus loin. Hier soir sur France Inter, Alain, un auditeur qui a voté Besancenot puis Poutou, se dit "hostile à Le Pen". Pourtant dimanche, il votera... Front National !
"Tout le monde sait qu'elle n'a aucune chance d'être élue... faut mettre un gant avant de prendre le bulletin, et voter Le Pen... que Macron soit élu avec 52% serait le rêve pour moi... il faut que l'écart soit le plus réduit possible... ça lui rabattrait son caquet... et puis ça réveillerait la vraie gauche, et tout le petit peuple qui va trinquer... on peut espérer une cohabitation avec un recentrage au niveau de l'Assemblée Nationale" explique-t-il.
En pleine crise de la représentativité, crise de confiance envers les politiciens, la conviction laisserait-elle désormais la place à la stratégie ?
Pour la sociologue et chercheuse en science politique Anne Muxel, les électeurs utilisent de plus en plus leur bulletin de vote comme une arme stratégique. En se projetant vers les législatives, en imaginant de quelle légitimité, de quelle majorité le futur Président disposera pour réformer.
Les derniers chiffres
Selon le sondage Ipsos- Sopra Steria du 2 mai pour Radio France, (en partenariat avec France 2/Le Point/Le Monde/RFI/France 24/Les chaînes parlementaires), 19% des électeurs certains d'aller voter peuvent changer d'avis, un chiffre en progression de quatre points par rapport au dernier sondage. 25 % des électeurs pourraient s'abstenir. En 2012, ils étaient 19,66%, 16% en 2007, 20% en 2002 et 1995.