Trop de trains supprimés, des rames "défraîchies" : en Auvergne-Rhône-Alpes, la fédération des associations d’usagers de transports en commun (FNAUT) critique la qualité de service des TER. Un constat partagé par la chambre régionale des comptes, qui épingle la politique ferroviaire de la Région.
"Dans la région, il manque 30 trains par jour. C’est énorme", s’inquiète Gérald Petitgand, président Auvergne-Rhône-Alpes de la FNAUT (Fédération nationale des associations d’usagers de transports en commun).
Dans un communiqué diffusé ce lundi 7 octobre, l’association alerte sur la dégradation des lignes TER de la région et veut "maintenir la pression". Depuis la rentrée, de nombreux usagers se plaignent de retards à répétition et de suppressions de trains. "On a beaucoup de trains en tension et on paye cher ce manque de rames", renchérit Gérald Petitgand.
Pas assez de rames de TER en Région AuRA : les usagers en ont marre d’attendre d’avoir des rames neuves et en nombre suffisant. pic.twitter.com/U8GNsAE4Au
— FNAUT Auvergne Rhône Alpes (@fnaut_aura) October 7, 2024
Selon les associations d’usagers, la région Auvergne-Rhône-Alpes, compétente en matière de transport ferroviaire, accuse un grave retard d’investissements. Pas assez de trains, manque d’entretien et de moyens de maintenance : autant de facteurs qui contribueraient à un "service fortement dégradé".
Ce constat est partagé par la Chambre régionale des comptes. Cette dernière a épinglé la gestion des transports ferroviaires dans un rapport publié en juin 2024, estimant que la situation ne contribuait pas "à la qualité de service attendue". Selon l'institution, ces perturbations dues à "l’insuffisance de rames et l’inadaptation des matériels actuels aux besoins des usagers" pourraient se prolonger jusqu'en 2027, et nécessiter un investissement de 3,8 milliards d’euros.
Du retard à rattraper
"C’est le minimum, ajoute Gérald Petitgand. Avec l’entretien des voies, il y en a pour plus de 5 milliards d’euros. Sachant qu’on est déjà en retard, car il y a un délai de cinq ans pour obtenir de nouvelles rames. Or, on va passer à 300 000 passagers d’ici 2035 et le retard se creusera."
Chaque année, beaucoup de personnes arrivent début septembre avec la volonté de prendre le train pour aller travailler. Et en octobre, dégoûtés, ils reprennent la voiture.
Gérald Petitgand, président de la FNAUT Auvergne-Rhône-Alpes
Premier réseau régional ferroviaire après celui de l’Ile-de-France, les trains express régionaux (TER) Auvergne-Rhône-Alpes transportent près de 220 000 voyageurs tous les jours.
"Alors que le trafic TER augmente de l’ordre de 25 % depuis 2019, preuve que le TER plaît et répond à un besoin, la Région n’a commandé aucune rame depuis cinq années, précise la FNAUT dans son communiqué. Au contraire, la Région a décidé de prolonger la vie des vieilles rames des années 1970 […] offrant ainsi en AURA, pendant encore une dizaine d’années, des mauvaises conditions de transports avec des rames vieillissantes et défraîchies, peu faciles d’accès, sans wifi, des rames du siècle dernier !"
"On ne pouvait pas prévoir"
De son côté, la Région invoque une succession d’imprévus. Dix-neuf nouvelles rames, commandées en 2019, ont bien été livrées cet automne, mais seules dix circulent actuellement.
"Quand on a commandé ces nouveaux trains, la SNCF devait lancer en parallèle la construction d’un nouvel atelier de maintenance à Saint-Etienne, justifie Frédéric Aguilera, vice-président de la Région en charge des transports. Il devait être inauguré en septembre, mais à cause d’une autorité environnementale qui a exigé une étude d’impact sur la biodiversité, on vient juste d’obtenir le permis de construire. Résultat, deux ans de perdus, des gens sur les quais et des rames neuves qu’on ne peut pas mettre en circulation car on ne peut pas les entretenir correctement".
Pour éviter qu’ils ne restent trop longtemps sans circuler, certains trains neufs ont même été loués à d’autres régions. Une "caricature" du système administratif français, selon Frédéric Aguilera, qui regrette aussi l’inertie du système industriel ferroviaire. "Aujourd’hui, il y a six ans d’attente quand on commande de nouveaux trains", regrette-t-il, tout en invoquant un fort taux de progression des usagers depuis 2019 "impossible à prévoir".
"On va connaître une période difficile avec ce croisement des courbes, c’est une réalité", admet le vice-président, parvenant finalement à la même conclusion que l’association d'usagers.