"Si on ne pèse pas au niveau national, on n'existe pas" : la noix de Grenoble face à une crise sans précédent

La noix de Grenoble traverse une saison plus que difficile. Avec des prix en baisse et une consommation en berne, le fruit sec a du mal à exister. Les nuciculteurs se sont donc réunis au sein d'une association mardi, espérant obtenir plus de visibilité au niveau national.

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Régis Lacroix a repris l'exploitation de ses parents à Beaulieu (Isère) en 2015. Ses quarante hectares de terrain sont entièrement dédiés à la production de noix de Grenoble AOP. "Celle-là est plutôt belle. Elle est saine, elle est blanche : il y a tout pour une bonne qualité", désigne le nuciculteur.

Même si la qualité est au rendez-vous, Régis reste inquiet. Les stocks accumulés l'année dernière sont encore importants. En 2022, 15 000 tonnes de noix ont été récoltées contre 12 000 pour une année moyenne. Un volume qui dépasse toutes les attentes. Mais sur un marché saturé, les prix au kilo se sont effondrés.

"L’année dernière, on les a vendues entre 1,30 et 1,40 euro (le kilo) pour celles de bonne qualité alors que les années antérieures, on était plutôt autour de 2,50 euros", explique Régis Lacroix. C’est une crise sans précédent pour le fruit sec. Tous les nuciculteurs ont travaillé à perte cette saison, selon la chambre d'agriculture de l'Isère, et certains ont même cessé leur activité.

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Face à une crise sans précédent, les nuciculteurs se regroupent en association pour peser dans la balance ©France Télévisions

"Si on ne pèse pas au niveau national, on n'existe pas"

Alors au printemps 2023, la filière a entamé des discussions en vue de réunir tous les producteurs français dans une association pour avoir plus de poids. La première assemblée générale constitutive de l'Association des producteurs de noix Sud-Est s'est tenue mardi 5 septembre à Chatte. Jusqu’ici, les noix de Grenoble, celles du Périgord et toutes les autres cohabitaient indépendamment.

"Aujourd'hui, on est regroupé dans une coopérative, dans un syndicat Noix de Grenoble. Mais aucun de ces regroupements ne nous permet d'avoir des échanges avec les services de l’Etat", regrette le nuciculteur isérois.

La noix du Chili ou des Etats-Unis arrive quasiment sans droits de douane. Mais nous, quand on veut exporter sur des pays du Maghreb, on est complètement saturés de doits très importants.

Jean-Claude Darlet, président de la chambre d'agriculture de l'Isère

à France 3 Alpes

Le programme est ambitieux : mieux rémunérer les producteurs, assurer la qualité du produit ou encore s’adapter au changement climatique. Des mesures essentielles pour faire face à une concurrence étrangère toujours plus importante.

"Si on ne pèse pas au niveau national, on n’existe pas. C'est la même chose sur les droits de douane. Aujourd'hui, la noix du Chili ou des Etats-Unis arrive quasiment sans droits de douane. Mais nous, quand on veut exporter sur des pays du Maghreb, on est complètement saturés de doits très importants", expose le président de la chambre d'agriculture de l'Isère, Jean-Claude Darlet.

Dans le monde de la noix, la France a du mal à se faire une place. Avec 40 000 tonnes produites par an, elle est loin derrière la Chine et son million de tonnes ou même des Etats-Unis avec 700 000 tonnes.

Miser sur la promotion

Pour la chambre d’agriculture de l’Isère, à l'initiative de la création de l'association, l’oléagineux manque de promotion pour se démarquer. Et pour relancer la consommation, il faut savoir saisir toutes les opportunités. "On est à la veille des Jeux olympiques en France. En 2024, tout sportif qui veut gagner une médaille doit manger barre vitaminée à base de noix de Grenoble", sourit Jean-Claude Darlet.

La noix doit d’abord séduire des consommateurs moroses. Un Français en mange en moyenne 200 grammes par an contre 1 kilo pour un Italien. Au travers d’affiches et de spots publicitaires, l’appellation d’origine protégée (AOP) tente de remettre la noix de Grenoble à l’honneur.

"En argument commercial, on a notre AOP, la qualité, on a la saveur, la typicité du terroir. C'est ce qu'il faut mettre en avant", estime la coordinatrice du comité interprofessionnel de la noix de Grenoble (CING), Nathalie Gaillard.

Faute de ressources suffisantes, une promotion à grande échelle n'est toutefois pas envisageable. "Par exemple, des campagnes de communication où on passe des publicités sur France 2 tous les jours, c'est complètement hors budget. C'est là où on manque de visibilité au niveau national", complète Nathalie Gaillard.

La noix de Grenoble est la plus vieille AOP de France pour un fruit. A sa création en 1938, elle avait permis de structurer toute la filière Sud-Est. Une structuration que la nouvelle association veut élargir au niveau national. A terme, la chambre d’agriculture espère que 70 % des nuciculteurs en feront partie.

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