Témoignages. "Nos journées sont rythmées par les descentes de police" : leur école est à côté d'un point de deal, des étudiants inquiets

Publié le Écrit par Antoine Belhassen et Damien Borrelly
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L'évacuation du Carrare, immeuble d'Échirolles considéré comme un important point de deal de l'agglomération grenobloise, a mis en lumière la situation des étudiants de l'École de journalisme de Grenoble (EJDG), située à quelques mètres. Ils racontent un quotidien de plus en plus tendu.

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Ils sont des journalistes en devenir et se retrouvent au cœur de l'actualité. Mais certains s'en passeraient bien. Plusieurs élèves de l'École de journalisme de Grenoble (EJDG), située à côté du Carrare, un immeuble d'Échirolles en cours d'évacuation à cause d'un "danger de mort permanent", ont fait part de leur inquiétude et d'un climat anxiogène.

Pour cause, le Carrare est considéré comme l'un des principaux points de deal de l'agglomération grenobloise. Face à l'insécurité et à d'importantes dégradations, la Ville d'Échirolles a pris deux arrêtés de mise en sécurité de l'immeuble : tous les occupants doivent avoir quitté les lieux d'ici vendredi.

Ces derniers mois, plusieurs fusillades ont éclaté dans le bâtiment ou à proximité. D'importantes opérations de police y ont été menées. Tout cela devant les yeux des étudiants, qui ont appris à "cohabiter avec les dealers".

Les locaux de l'EJDG sont situés à seulement quelques mètres. "L'école est un établissement délocalisé de l'université, comme il y en a plusieurs dans la métropole. Nous, on se retrouve à Échirolles, en plein cœur du centre-ville, à deux pas de la mairie. Mais aussi, nous sommes attenants au Carrare", explique Justine, en deuxième année de Master.

"Une angoisse qui grandit"

La jeune femme étudie depuis trois ans dans ce bâtiment, qui abrite aussi l'Institut de communication et des médias (ICM). Elle est témoin d'un climat de plus en plus tendu : "Nos journées sont rythmées par les descentes de police, les appels des dealers et tout ce qu'il s'y passe", raconte-t-elle.

"Depuis plusieurs années, on était habitués à cette proximité avec le point de deal. Jusqu'à maintenant, ce n'était pas un problème pour nos études. Mais depuis cet été, les fusillades et cette actualité un peu plus chaude, il y a une angoisse qui a grandi au sein des étudiants, raconte Justine. Il y a des faits qui se sont produits lors de matinées, à 9 heures, là où on commence nos cours."

"L'année dernière, plusieurs étudiants ont été pris à partie devant l'ICM, continue l'étudiante. C'est compliqué, le matin, avant de venir en cours, de regarder les médias pour voir s'il n'y a pas eu une tuerie pendant la nuit. Ce n'est quand même pas ce qu'il y a de plus serein comme climat pour étudier."

L'une de nos sorties donne directement sur le point de deal. On nous demande d'éviter cette sortie, notamment quand on prend du matériel.

Hugo, étudiant en deuxième année à l'EJDG

Même son de cloche pour Hugo, 22 ans, lui aussi étudiant en deuxième année de Master : "On voit toute l'actualité, ce qu'il se passe à côté. On voit les infos, les fusillades, les arrêtés préfectoraux... Beaucoup de choses s'accumulent. On voit des choses que l'on ne voyait pas avant, des descentes de police de plus en plus régulières."

Pour assurer le maintien de l'ordre, un vigile a été mis en place à l'entrée des locaux. Mais les étudiants craignent toujours pour leur sécurité : "L'une de nos sorties donne directement sur le point de deal. On nous demande de l'éviter, notamment quand on prend du matériel. Vu qu'on est une école de journalisme, on a forcément du matériel : des caméras, des micros qui ont une certaine valeur et qui peuvent attirer l'œil. On veut éviter d'avoir des problèmes avec les dealers."

Les étudiants demandent un éclairage sur la situation actuelle et davantage de "respect" de la part de l'Université, dont dépendent les écoles. "Ce qu'on aimerait, c'est qu'on nous dise ce qu'il va advenir de cet immeuble. Mais on aimerait avoir un peu plus d'infrastructure, que l'on soit plus respectés comme étudiants", détaille Hugo. "Les occupants du Carrare ont été évacués pour danger de mort permanent. Mais qu'en est-il de nous qui étudions à cinq mètres de ce point de deal ?", appuie sa camarade.

La question d'un déménagement

Contactée, la direction de l'Université Grenoble-Alpes (UGA) n'a pas donné suite à nos sollicitations ce mercredi au moment de la publication de cet article.

Yassine Lakhnech, président de l'UGA, s'était exprimé sur la situation de l'EJDG le 11 septembre lors d'une conférence de presse : "Si nous estimons que la sécurité n'est pas au rendez-vous, nous serons obligés de déménager. Ce serait regrettable et ce serait aussi une capitulation du service public face à la délinquance", avait-il déclaré, cité par le Dauphiné Libéré.

"La position de l'UGA est claire, c'est la sécurité des personnels et des étudiants avant tout. J'ai demandé aux autorités une sécurisation du bâtiment par les forces de l'ordre en attendant l'amélioration de la situation", avait-il ajouté. Mais avec l'évacuation du Carrare, les interrogations demeurent pour les étudiants.

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