"C'est quoi la solution, dormir dehors ?" : le désarroi des habitants d'un immeuble à Échirolles, contraints de partir face au trafic de drogue

Les habitants de l'immeuble le Carrare, considéré comme un important point de trafic de drogues de l'agglomération grenobloise, sont concernés par un arrêté d'évacuation des lieux, depuis ce mardi 24 septembre. Sur place, les occupants doivent gérer cette situation dans l'urgence.

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"À l'hôtel, j'y vais pour combien de temps ? Est-ce que ça va être gratuit ? Pour déménager, pour emporter mes affaires, c'est moi qui fais tout, tout seul ? Je vais reprendre ma chambre plus tard ?" L'air hagard, un habitant de l'immeuble le Carrare multiplie les interrogations devant la maire d'Échirolles.

Depuis ce mardi 24 septembre au matin, les habitants de ce bâtiment, considéré comme un important point de deal de l'agglomération grenobloise, sont concernés par deux arrêtés de mise en sécurité et d'évacuation. Autrement dit, ils ont 72 heures pour quitter les lieux avant que des travaux de sécurisation ne soient engagés par la copropriété.

Cages d'escalier vandalisées, fenêtres brisées, murs tagués, mais aussi et surtout, des installations électriques complètement détournées. Les conséquences du deal ont conduit la maire d'Échirolles, Amandine Demore (PCF), à boucler les lieux.

"On a eu une expertise qui nous montre qu'il y a un danger de mort permanent dans cet immeuble, lié aux installations électriques qui ont été dégradées par le deal qui est présent 24h/24. Il y a eu de grosses dégradations dans cet immeuble. On ferme le bâtiment, et on enjoint la copropriété à faire de travaux rapidement", explique-t-elle.

Selon l'édile, les conditions de vie se sont dégradées ces dernières années, voire ces dernières semaines qui ont été marquées par plusieurs épisodes de violences dans l'agglomération de Grenoble. "Ça ne pouvait plus durer. Ça fait quelque temps que le deal s'est installé. Ça s'est durci après le Covid et, ces derniers mois, avec l'épisode que l'on connaît sur l'agglomération et les fusillades, le climat s'est largement dégradé. Il fallait une décision radicale", justifie l'édile.

Détresse sociale

En entrant dans l'immeuble ce mardi, Amandine Demore croise la route d'Anne, une employée municipale chargée depuis quelques heures de remettre en main propre les arrêtés à tous les occupants. Celle-ci confie : "Il y a des situations de détresse sociale. Il y a un petit monsieur qui avait les larmes aux yeux. Ce sont des situations extrêmement touchantes et j'espère que ce qu'on fait permettra aux habitants de vivre dans de meilleures conditions. J'espère que c'est aussi une porte d'entrée pour engager un accompagnement social."

Les services du Centre communal d'action sociale (CCAS) sont chargés de "mettre en place un accompagnement social, ainsi que de veiller à la mise à l'abri, par un relogement d'urgence, des habitants impactés par la fermeture de ce bâtiment".

Pour la maire, la situation devenait critique : "Ce qui m'importait aussi, c'était de mettre en sécurité les habitants. Ça devenait indispensable." Mais, dans l'immeuble, tous ne comprennent pas cette décision. "Les sentiments sont mitigés. Les habitants sont au courant de la situation qui est très compliquée au quotidien. Ils sont soulagés de notre action, ils sont contents que l'on réagisse. Mais ils sont au pied du mur, le délai est assez court pour préparer leurs affaires", relate un policier municipal engagé sur l'intervention.

"Qui paie les pots cassés ?"

Raphaël* fait partie de ces locataires pris au dépourvu : "Je viens d'arriver. Je descends de la voiture pour rentrer chez moi. Je rentre dans l'immeuble et la police me dit que je n'ai plus le droit d'habiter là. Pourquoi ? J'ai mon bail, je paye comme tout le monde... C'est un truc de fou, c'est du jamais-vu", lâche-t-il sur le pas de sa porte.

"Il fallait nous avertir quelques mois auparavant. C'est facile de prendre des décisions et de les faire tomber sur des gens qui n'ont rien fait. Mais, c'est quoi la solution ? Je vais dormir dehors ? Si je refuse de partir de chez moi, ça fait de moi un délinquant ?", se demande-t-il, lui qui refuse d'être logé à l'hôtel.

Conscient de l'évolution du point de deal et des débordements, il reproche une action tournée contre les habitants de l'immeuble : "La situation était invivable. Mais qui paie les pots cassés ? C'est nous, ce ne sont pas les responsables."

Tous les occupants devront avoir quitté les lieux ce vendredi 27 septembre. L'immeuble sera ensuite bouclé pour permettre le bon déroulement des travaux, qui devraient durer trois semaines.

* Le prénom a été modifié à la demande de l'intéressé.

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