C'est dans une fenière de Saint-Pierre-de-Chérennes que Christine Vial a découvert un trésor : les romans oubliés d'Yvonne Martinet, une cousine de sa grand-mère. Séduite par son style, elle les fait lire à un ami éditeur qui décide de leur donner une seconde vie, dans une nouvelle édition.
On la connaissait enseignante, fille d'un commissaire priseur de Saint-Marcellin, elle était aussi romancière. On la disait fantasque, voire même folle, elle était libre.
Au travers de ses livres, c'est l'histoire de vie hors norme d'Yvonne Martinet qui est mise au jour. Une découverte que l'on doit à Christine Vial, dont la grand-mère était la cousine de la romancière.
"Je cherchais des illustrations, des vieux journaux d'époque. Je savais que ma mère en avait, je suis allée les chercher dans une maison qui aujourd'hui n'existe plus. Après avoir emprunté un escalier très raide, je me suis trouvée devant un meuble dont les portes étaient battantes et au pied duquel se trouvait un amas de miettes de papiers, grignotés par les rats", raconte Christine Vial.
Il s'agit en fait des restes des livres invendus écrits par Yvonne dans les années 1950.
"Un style d'une envergure étonnante"
"Je crois que sa qualité d'écriture est telle qu'il faut s'y intéresser", témoigne Christine. Elle contacte alors un ami éditeur pour lui faire lire ces romans et une thèse "monumentale" de 800 pages sur Alphonse Daudet rédigée par Yvonne.Pour Teddy Greaves, des Editions d'En Face, c'est une révélation :
"j'ai découvert un style d'une envergure étonnante, qui est comparable aux plus grands auteurs de l'époque. Elle est un peu à cheval entre ce qu'on aurait écrit 30 ans plus tôt et ce qu'on a écrit 30 ans plus tard, comme une transition. elle parle d'environnement, elle parle de féminisme, de plein de choses qui sont au goût du jour à notre époque. Elle avait vraiment une figure de pionnière, tout en étant rattachée au passé et au classicisme littéraire", estime-t-il.
Christine Vial retrouve également une correspondance fournie entre la romancière et sa grand-mère. Elle se plonge avec gourmandise dans sa lecture. "Je me suis régalée", confie-t-elle.
Un personnage hors norme
"Toutes les personnes qui l'ont connue, auront un petit sourire en coin en se souvenant d'elle, parce que elle était fantasque, elle était originale, c'était une personne hors norme et elle marquait les gens".Grâce à cette correspondance, Christine réussit aussi à reconstituer son parcours professionnel.
Elle enseigna l'anglais dans des institutions pour jeunes filles en France et en Algérie, puis termina sa carrière au lycée Stendhal de Grenoble dans les années 1960.
Dès les premières pages de ses romans, Christine est frappée par ce qu'elle lit. Elle retrouve à chaque ligne le personnage qu'elle a connu dans son enfance. Car Yvonne Martinet se projetait dans ses romans, autour d'un thème unique : le bonheur rendu impossible par les circonstances.
Trois romans sur le déracinement et le manque d'amour
Dans La Tache, "dont l’action se déroule près de Nîmes et se termine à Lyon en 1914, elle raconte l’histoire d’un malheur de naissance", indique sa maison d'éditions.Dans La Folle, c'est "une enfance douloureuse à Saint-Marcellin et sa suite tragique à Marseille en 1918" que l'on découvre.
"Moucheron retrace l’existence d’un bâtard de notable né à Saint-Pierre-de-Chérennes dont le destin noué à Oran culmine dans le Vercors en 1944", dévoile l'éditeur.
Les trois romans sont réédités dans un seul volume, publié aux Editions d'En Face.