Le projet Rhônergia qui visait à construire un barrage sur l'une des dernières zones sauvages du Rhône, entre l'Ain et l'Isère, a été abandonné par l'Etat. Les opposants saluent cette décision et demandent désormais la protection définitive de ce tronçon du fleuve.
Il n'y aura pas de barrage sur le dernier tronçon sauvage du Rhône. L'Etat a abandonné jeudi 29 août le projet Rhônergia, une installation hydroélectrique qui devait voir le jour entre Saint-Romain-de-Jalionas (Isère) et Loyettes (Ain).
"Sur ce tronçon, le Rhône coule à plein débit, dans son lit historique, depuis plusieurs milliers d'années. Cela a une valeur exceptionnelle. En plus, le site abrite une faune et une flore importante. Il fallait préserver tout ça pour le transmettre à nos enfants, c'est vital", se réjouit Raphaël Quesada, directeur de l'association Lo Parvi qui s'était opposée au projet.
La Compagnie nationale du Rhône (CNR) portait ce projet dont l'idée remonte à 1935 et avait déjà fait l'objet d'un projet abandonné en 1980. Celui-ci visait à construire un barrage-usine avec une chute de 6,8 mètres, une retenue de 22 kilomètres de long pour ralentir le débit du fleuve et une digue de 4 km. Il prévoyait surtout un détournement du Rhône pour un rendement en production de kilowatt jugé faible par ses opposants compte tenu de l'ampleur du projet.
"Carnage environnemental"
"Si vous déplacez le Rhône de son lit, c'est un carnage environnemental quoi qu'il arrive", estime le maire (sans étiquette) de Saint-Romain-de-Jalionas, Jérôme Grausi, qui s'était érigé contre le projet. "Notre commune a une histoire gallo-romaine et tout notre patrimoine allait valser en éclat. Pour ces raisons, c'était inconcevable que ce projet arrive à son terme."
On n'était pas dans un affrontement brutal, plutôt un affrontement intellectuel. C'est ce qui a fait la différence et j'en suis très fier.
Jérôme Grausi, maire de Saint-Romain-de-Jalionas
L'histoire de ce projet avorté, c'est aussi l'histoire d'une concertation saluée par les nombreux opposants. Élus, collectifs citoyens et associations environnementales ont tous œuvré dans le même sens pour proposer des alternatives au barrage.
"Les opposants ont organisé des manifestations pacifiques et tout au long de la concertation, ils ont produit des arguments pour des alternatives. On n'était pas dans un affrontement brutal, plutôt un affrontement intellectuel. C'est ce qui a fait la différence et j'en suis très fier", salue Jérôme Grausi.
Les opposants restent mobilisés
Portés par cette "mobilisation collective", les associations et collectifs ayant milité contre le projet veulent désormais aller plus loin. Ils lancent un nouvel appel à l'Etat "pour un Rhône libre", espérant obtenir la protection définitive de ce dernier tronçon naturel du fleuve.
"L'abandon de ce projet est une première victoire, mais on ne veut pas en rester là. Maintenant que la CNR gère ce tronçon du Rhône, on voudrait qu'elle devienne notre partenaire pour le préserver durablement et mettre en place, avec les services de l'Etat, un outil de protection fort", souhaite Raphaël Quesada.
La CNR, qui supervise 19 barrages hydroélectriques sur le Rhône, avait estimé que le projet Rhônergia, était le dernier projet de cette nature envisageable en France. Elle s'apprête à engager "une nouvelle phase de discussion avec l’État pour identifier des projets alternatifs en lien avec le fleuve."